Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Monaco : une seconde vie après leur saisie par les douanes

- THIBAUT PARAT tparat@nicematin.fr

Des cigarettes, des stupéfiant­s ou encore de la contrefaço­n… Chaque jour, les douaniers du territoire mettent un coup d’arrêt à bon nombre de trafics. Plus rare, mais bien réel, les animaux vivants suscitent la convoitise d’individus guère scrupuleux, faisant fi de toute réglementa­tion et de compassion quant aux conditions de l’animal. En 2017, dans les Alpes-Maritimes, neuf constatati­ons ont été faites au titre de la convention de Washington

(1), dont six contentieu­x rien qu’à l’aéroport de Nice.

Deux saisies record

Dernière saisie en date: quatre tortues grecques – achetées une misère en Afrique du Nord et dissimulée­s au milieu de vêtements – étaient destinées à la revente. « Pour les carnivores domestique­s, on peut mettre en quarantain­e et réexporter l’espèce dans le pays d’origine, sans sortir du site aéroportua­ire. Pour les animaux protégés, compte tenu du stress, on les confie à des structures, possédant des certificat­s de capacité, afin de les conserver en vie. Comme le jardin animalier de Monaco (2) », détaille Marie-Catherine Kuntz-Pinguet, chef du pôle orientatio­n des contrôles à la direction régionale des douanes de Nice. Ce fut le cas, entre autres, en 2013 et 2017 avec deux saisies record. Des conditions de transport aussi abominable­s qu’inhumaines. Des animaux déshydraté­s par l’interminab­le trajet, parfois squelettiq­ues. À la limite du réel…

«Pas des magiciens»

Au Jardin animalier de Monaco, ces animaux saisis par les douanes ne sont pas présentés au public. «À part les douroucoul­is (primates nocturnes), partis depuis », précise Laurent Peyronel, directeur de la structure. Là, au pied du Rocher, ces êtres vivants sont chouchouté­s par les cinq employés. Choyés. Remis en forme après un voyage souvent dantesque. « On n’est pas des magiciens mais on essaye de les remettre sur pattes. Parfois, il y a de la perte tant les animaux sont affaiblis et dans un état déplorable. Certains parcs refusent de les accueillir car c’est à perte. A Monaco, la priorité va pour les animaux, le reste, on s’en fout », insiste-t-il. Les reptiles bénéficien­t d’une surveillan­ce accrue car ils sont incapables de réguler eux-mêmes la températur­e de leur corps, a

contrario des oiseaux. Dans le vivarium, côté coulisses, Laurent Peyronel nous en présente quelques-uns. Tortues, iguanes, caméléons… « Il doit faire entre 27 et 28 degrés avec un taux d’humidité de 60 à 70 % . Chaque espèce a ses particular­ités,

explique-t-il. Après la saisie, il faut les nourrir mais pas à profusion. Généraleme­nt, on laisse 48 heures de jeûne pour voir s’il y a des vers dans les selles. Si oui, on les vermifuge et on leur donne une alimentati­on adéquate. Après, on observe leur évolution. » Tout comme la direction départemen­tale de la protection des population­s (DDPP) – ou la Direction de l’environnem­ent pour Monaco – qui assure un suivi. « Les experts vétérinair­es de la DDPP ont en main le cahier des charges des soins délivrés aux animaux. Ils vérifient si les conditions d’hébergemen­t, d’accueil et de soins sont respectées. Que l’organisme ait l’agrément correspond­ant à l’espèce», confie Marie-Catherine Kuntz-Pinguet. Pour certaines espèces, le Jardin animalier de Monaco n’est qu’une transition. La structure, faute de place suffisante, doit parfois donner le relais à d’autres parcs spécialisé­s.

Abandons par les particulie­rs

Autre cas, plus fréquent, d’animaux récupérés : les abandons par les particulie­rs. «Des tortues, lapins, cochons d’Inde, iguanes, serpent, perroquets…, liste Laurent Peyronel. Souvent avant les vacances d’été d’ailleurs. Certains osent même nous demander de les garder pour deux mois. Avoir un animal, c’est un engagement… » Plus cocasse encore, les interventi­ons de secours aux animaux par les sapeurspom­piers. « Deux fois par an, on les forme là-dessus. Dès qu’ils ont de la faune locale blessée, rapaces ou mammifères, ça arrive chez nous. On les élève puis on les relâche. À Valbonne, on a récupéré un fouette-queue

(lézard). Un jour, on avait récupéré six flamants roses sauvages en migration. Cinq se sont envolés. » Le dernier vit toujours sur place. Visiblemen­t heureux de son nouveau logis. «Il n’est même pas dans mes inventaire­s puisqu’il n’est pas à nous. Demain, s’il veut, il peut s’envoler… »

1. Convention sur le commerce internatio­nal des espèces de faune et de flore sauvage menacées. 2. Parc Phoenix de Nice, parc zoologique de Fréjus, village des tortues de Carnoules (Var), ferme aux crocodiles de Pierrelatt­e (Drôme), Le Cannet-des-Maures

 ?? (Photos Jean-François Ottonello) ?? Parmi les animaux récupérés par le Jardin animalier de Monaco, on retrouve un caméléon casqué du Yémen (saisi en ), des tortues grecques saisies à l’aéroport de Nice, un iguane vert et un serpent des blés abandonnés par des particulie­rs.
(Photos Jean-François Ottonello) Parmi les animaux récupérés par le Jardin animalier de Monaco, on retrouve un caméléon casqué du Yémen (saisi en ), des tortues grecques saisies à l’aéroport de Nice, un iguane vert et un serpent des blés abandonnés par des particulie­rs.
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