Violences sexuelles et sexistes : l’Assemblée entame un débat sensible
L’Assemblée a entamé hier soir un débat sensible sur le projet de loi visant à renforcer la répression des violences sexistes et sexuelles, loin de faire l’unanimité en raison d’inquiétudes sur la protection des mineurs. «Notre objectif, c’est d’éviter les acquittements d’agresseurs sexuels. Trouver par tout moyen une manière de les faire condamner», a plaidé dans l’hémicycle la secrétaire d’État à l’Égalité femmes-hommes Marlène Schiappa, qui défend le texte au côté de la ministre de la Justice Nicole Belloubet. Très attendu après l’affaire Weinstein et #Metoo, il s’articule autour de quatre articles principaux. Il entend combler les « angles morts » de la législation pour «ne rien laisser passer», alors qu’à l’échelle d’une vie, une femme sur 7 vivrait une violence sexuelle, selon des données mises en avant par la rapporteure Alexandra Louis (LREM).
amendements
Sur un tel sujet, qui pousse souvent les députés à sortir des clivages politiques, comme en témoigne le nombre important d’auteurs des quelque 270 amendements devant être examinés, le premier article fait relativement consensus. Il prévoit l’allongement à 30 ans après la majorité, contre 20 ans actuellement, des délais de prescription pour les crimes sexuels commis sur mineurs. Certains élus entendent toutefois plaider pour une imprescriptibilité ou pour étendre la mesure aux majeurs. Le texte crée également un «outrage sexiste » pour le harcèlement de rue, passible d’une amende immédiate de 90 euros minimum, et prévoit des mesures pour pénaliser davantage le « cyberharcèlement ». En revanche, l’article 2 sur «la répression des infractions sexuelles sur les mineurs » est très contesté. Loin de fixer un âge de consentement sexuel à 15 ans, comme évoqué un temps, il prévoit que «lorsque les faits sont commis sur un mineur de [moins de] quinze ans », les notions de contrainte et surprise, constitutives d’un viol, peuvent « être caractérisées par l’abus de vulnérabilité de la victime ne disposant pas du discernement nécessaire pour consentir à ces actes ». Il double aussi, à 10 ans d’emprisonnement, la peine pour le délit d’atteinte sexuelle « avec pénétration », pour les cas où le viol, crime passible de 20 ans de réclusion, ne pourrait être établi.
« Une marche arrière »
Les associations de protection de l’enfance y ont vu « une marche arrière». Et près de 250 personnes, dont l’ex-ministre Yvette Roudy ou l’actrice Karin Viard, ont demandé hier dans une lettre ouverte de «retirer » cet article, estimant qu’il ouvre «la porte à une correctionnalisation massive des viols de mineurs ».