Le blues des territoires
Un h de Jean-Pierre Pernaut avec le Président dans une petite école de l’Orne, deux ou trois délocalisations de Matignon en région et quelques déplacements sur le terrain n’auront pas suffi à inverser la tendance. Entre l’exécutif et les territoires, l’incompréhension atteint un niveau inédit. Un président des villes d’un côté, des élus locaux à cran de l’autre : les fâcheries dégénèrent en divorce. Dernier épisode en date, la décision commune de l’Association des régions, de l’Assemblée des départements et de l’Association des maires de France de boycotter la prochaine Conférence nationale des territoires du juillet, « une instance qui n’est devenue qu’un fauxsemblant de concertation et de dialogue ». S’ils n’ont pas franchement la réputation d’être des boutefeux, Hervé Morin, Dominique Bussereau et François Baroin en ont gros sur la patate. Porte-parole des terroirs réunis, les présidents des trois organisations dénoncent une fracture qui n’a jamais été aussi violente, estimant que «le gouvernement s’enferme dans une politique de réforme hors-sol, décidée à Paris et inapplicable sur le terrain ». La liste des griefs s’allonge de jour en jour : mise sous tutelle financière des collectivités, recentralisation de l’apprentissage, transferts de charges sur les départements, fermeture de services publics de proximité… Alors que les maires des petites communes s’estiment délaissés et dénoncent la baisse des dotations, les grandes collectivités ont été sommées avant la fin du mois de juin de signer des contrats financiers avec l’État pour limiter la progression de leurs dépenses de fonctionnement. Si plus des deux tiers l’ont fait, bon gré mal gré, de nombreux élus considèrent que le gouvernement leur a mis le couteau sous la gorge, remettant ainsi en cause le principe de décentralisation. Ces mêmes maires, présidents de départements ou de métropoles, attendent avec inquiétude l’annonce, ce matin, par Bercy du détail de la réforme des impôts locaux, notamment les conséquences de la suppression de la taxe d’habitation. Des dispositions qui devaient justement être discutées le juillet lors de la conférence nationale des territoires. Ce jour-là, les chaises seront vides. Comme les caisses.
« Hervé Morin, Dominique Bussereau et François Baroin en ont gros sur la patate. »