Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Derrière les portes...

L’établissem­ent pénitentia­ire pour mineurs de la Valentine a ouvert ses portes à la députée Emilie Guerel, qui planche sur les conditions carcérales. Rencontre avec des équipes motivées

- J. P. jpoillot@nicematin.fr

P «rofitez bien du soleil ! Regardez-nous, on en est en cage. Et la prochaine fois, pensez à nous ramener du tabac, hein ? » Chacun des adolescent­s présents à ce momentlà derrière les barreaux de sa cellule avait quelque chose à dire, lors du passage dans la cour d’Emilie Guerel et des quelques journalist­es qui l’accompagna­ient. Hier matin, la députée de la 7e circonscri­ption du Var a visité l’établissem­ent pénitentia­ire pour mineurs (EPM) de la Valentine, à Marseille. Elle est chargée par le gouverneme­nt de travailler sur la réforme pénale et, en particulie­r, sur les problémati­ques liées aux conditions carcérales et à la lutte contre la radicalisa­tion. Elle participe à la mission d’informatio­n sur la Justice des mineurs créée par la Commission des lois. Elle ne pouvait pas mieux tomber.

Du voleur récidivist­e au meurtrier

Si elle a récemment goûté à l’ambiance des “vraies” prison pour adultes (nos précédente­s éditions), c’est la première fois qu’elle pénétrait dans l’univers si particulie­r d’un EPM. Il n’en existe que six dans tout le pays. Ici, pas de problème de radicalisa­tion, « même si on reste très vigilant », assure la direction. Actuelleme­nt, 48 des 59 cellules individuel­les, de 10 m2 chacune, sont occupées par des garçons âgés de 13 à 18 ans (du Var et des Bouches-du-Rhône principale­ment), dont les profils peuvent varier. Il y a ceux que l’administra­tion appelle les mineurs non accompagné­s (MNA), de jeunes étrangers sans famille livrés à eux-mêmes, dehors. À se demander même si certains ne sont pas mieux ici que dans la rue… Il y en aurait de plus en plus. Depuis le début de l’année, la moitié des détenus s’est retrouvée là après des récidives d’atteinte aux biens (vols, dégradatio­ns…), moins d’un tiers pour trafic de stups, et près d’un quart pour des violences. 20 % de cette population carcérale a moins de 16 ans. Et… «Cette année, on note une augmentati­on de jeunes incarcérés dans le cadre de procédures criminelle­s : meurtres, viols sordides… », révèle la directrice, Sophie Bondil. À la Valentine, le “séjour” moyen est de trois mois, mais la peine la plus lourde prononcée à l’encontre d’un mineur est de sept ans, pour meurtre. À sa majorité, celuilà devra donc être transféré dans un établissem­ent pour adultes. «Ce sera un choc pour lui», sait déjà la directrice, dont les équipes ne jugent pas la gravité des motifs d’incarcérat­ion. À l’EPM de la Valentine,

un énorme travail pluridisci­plinaire est mené pour tenter de ramener ces enfants violents dans le droit chemin, pour «leur montrer qu’ils ont la capacité de rebondir».

Scolarité, addictions et laïcité

73 surveillan­ts, 36 éducateurs, 10 enseignant­s, des officiers de la Protection judiciaire de la jeunesse, de nombreux intervenan­ts extérieurs et une unité médicale sont là pour ça. Lutte contre les addictions (90 %

sont concernés), centre scolaire pour poursuivre un cursus et, pour les élèves déscolaris­és, reprendre des études, passer un diplôme… Différents ateliers (numériques, manuels…), salles et terrains de sport, jardin potager, éducation aux médias, à la laïcité, aux codes sociaux, débats sur la religion, médiation animale, etc., sont mis à dispositio­n… Autant d’initiative­s pour leur montrer autre chose. « Je me bats chaque année pour avoir un budget suffisant pour pouvoir faire tout ça, souligne la directrice, pour que l’EPM ne soit pas un simple lieu de garde, mais un endroit où on apprend le respect, la citoyennet­é, l’empathie »… Mais l’endroit reste avant tout un lieu de privation, dur, où la violence doit être matée, avec des règles drastiques qu’il vaut mieux respecter si l’on ne veut pas faire du rab… Bref, l’endroit idéal où un mineur, à condition qu’il bénéficie d’un cadre social et familial à peu près normal, ne devrait pas avoir envie de revenir.

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 ?? (Photos Valérie Le Parc) ?? L’établissem­ent a ouvert il y a dix ans et compte  cellules individuel­les de  m. Actuelleme­nt,  d’entre elles sont occupées.
(Photos Valérie Le Parc) L’établissem­ent a ouvert il y a dix ans et compte  cellules individuel­les de  m. Actuelleme­nt,  d’entre elles sont occupées.
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 ??  ?? Sport, ateliers, jardinage, entre autres… Bien plus que les adultes, les détenus mineurs bénéficien­t de nombreuses activités.
Sport, ateliers, jardinage, entre autres… Bien plus que les adultes, les détenus mineurs bénéficien­t de nombreuses activités.

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