Le petit Français
Buteur en demi-finale, Ivan Perisic présente la particularité d’avoir été formé à... Sochaux, où il n’a finalement jamais eu sa chance.
Personne ne peut être plus heureux que moi de jouer contre la France en finale. ”
Ivan Perisic s’est présenté face à la presse après la victoire face à l’Angleterre en demi-finale, mardi. Le joueur de l’Inter Milan, buteur face aux Britanniques, a le
sourire à plus d’un titre. « Personne ne peut être plus heureux que moi de jouer contre la France en finale », lâche celui qu’on surnomme « Ivan le terrible ». Et pour cause, à la sortie de son adolescence Ivan Perisic a filé à Sochaux où il a terminé sa formation entre 2006 et 2008, il avait 16 ans. « Même si je n’ai pas joué, ces deux ans en France restent un excellent souvenir pour moi ».
Comment un international accompli (72 sélections, 20 buts) et qui évolue à l’Inter Milan depuis trois ans a-t-il pu manquer la marche du FC Sochaux ? Pis, comment diable le natif de Split a-t-il atterri dans le Doubs ? Pour comprendre le parcours du milieu offensif, il faut rembobiner le fil de sa vie. 2006, l’immense Josip Skoblar, alors recruteur pour l’OM, repère son jeune compatriote à Split. Souci, l’ancien attaquant phocéen peine à lui trouver une place dans les Bouches-du-Rhône. Skoblar s’adresse alors à Jean-Claude Plessis, président de Sochaux. Dans les colonnes de So Foot, Plessis se rappelle de leur voyage en Croatie :
« On est allé le voir, chez lui en Croatie, à Split, et on n’a pas été déçus.» Pour assurer la traduction, le club sochalien embarque Enis Sadikovic de l’équipe marketing du club. Alain Perrin, coach de l’époque, est aussi du voyage. Le trio tombe sous le charme d’Ivan en le voyant jouer chez les jeunes de l’Hajduk. Dans la foulée, tout le monde se retrouve dans un restaurant bucolique du coin : la délégation sochalienne et la famille Perisic. La direction doubiste est tellement sous le charme que Perrin demande à l’adolescent s’il est motivé à l’idée de prendre l’avion retour avec eux. Les règles concernant les transferts de mineurs étant très strictes, il est impossible de le faire venir s’il n’a pas une attache territoriale. Ne voulant pas passer à côté du phénomène, Plessis promet alors à la mère de Perisic un boulot dans une entreprise partenaire si elle rejoint son fils. L’affaire est bouclée. La petite soeur d’Ivan sera aussi du voyage mais pas son père, Ante. Ce dernier, éleveur de poules, n’arrive pas à joindre les deux bouts et pousse fortement les siens au départ. Une déchirure qu’il avouera plus tard dans un canard croate, le Slobodna Dalmacija « Partir à Sochaux était la meilleure solution pour ma famille. Je voulais qu’ils s’éloignent de moi et de mes souffrances. » La belle histoire s’arrête là. Sur place, alors que certains voient en lui le plus gros talent de l’époque depuis Jérémy Menez, Perisic ne joue pas. Il va fréquenter l’équipe réserve pendant deux ans mais aussi les U19. En 2007, il est de l’aventure Gambardella remportée par les Lionceaux, mais regarde la finale depuis les tribunes car il n’est pas sur la feuille de match, on lui préfère Geoffrey Tulasne. Le Croate est surtout dans l’ombre de deux autres talents, Riyad Boudebouz et Marvin Martin. Perisic se renferme. Perd confiance. En 2009, après deux ans dans le Doubs sans une seule minute disputée avec les professionnels, Sochaux préfère finalement prêter Ivan au KSV Roulers, en Belgique, avant de le vendre au FC Bruges, là où le Croate va prendre son envol (16 buts en Jupiler Pro League en 2010-2011). La suite ? Borussia Dortmund (2011-2013), Wolfsburg (2013-2015) puis l’Inter Milan. Sochaux ne s’imagine pas, à l’époque, être passé à côté d’un tel joueur, même si JeanClaude Plessis vit mal le départ du jeune Croate. « J’étais en colère quand j’ai vu qu’on l’avait laissé partir, se souvient-il dans So
Foot. On n’a pas essayé de le valoriser, il est parti comme un joueur qui ne nous intéressait pas. Quand je vois ce qu’il fait aujourd’hui, c’est un vrai crève-coeur. Sochaux avait beaucoup investi sur lui. Et pas que financièrement. Le laisser partir, c’était une faute professionnelle. » Perisic, mordu de NBA, est surtout un compétiteur né. A Sochaux, il a toujours cru en lui malgré tout. Le gaucher est un homme de défi. D’ailleurs, l’été dernier, le joueur : de l’Inter s’est aventuré ailleurs que sur un terrain de football. Associé à son compatriote Niksa Dell’Orco, Perisic a représenté la Croatie au Porec major Event, une compétition de beach-volley réputée de son pays. Opposé à une paire brésilienne engagée aux derniers Jeux olympiques, Perisic a donné le change mais n’a pas fait de miracle. Une défaite en deux manches. Idem contre deux Américains lors de l’autre match de poule. « Ça a toujours été mon rêve, je joue au beach-volley depuis que j’ai dix ans. Je suis passionné par ce sport et chaque été, je m’entraîne avec mes amis à Split », déclare le buteur de la demi-finale à la sortie du tournoi. On imagine aisément que son autre rêve est de gagner une Coupe du monde. Surtout face à la France...
Le onze probable de la Croatie : Subasic -Vrsaljko,Lovren,Vida, Strinic (touché aux adducteurs) ou Pivaric - Modric (cap.), Brozovic, Rakitic - Rebic, Mandzukic, Perisic (bien que touché à une cuisse).