Haro sur l’automobiliste !
Mais quel sens du timing ! Au moment où le prix du gasoil à la pompe dépasse celui de l’essence, annoncer à des automobilistes déjà passablement remontés qu’il faudra bientôt payer pour circuler dans les grandes villes frise le génie. Des péages à l’entrée des agglomérations pour fluidifier le trafic et diminuer la pollution, l’idée n’est ni très nouvelle ni, dans le fond, totalement incohérente. Elle risque juste de se révéler terriblement impopulaire du côté des usagers de la route et carrément suicidaire pour les maires qui seraient tentés de s’engager dans cette voie glissante à un an et demi des municipales. En 2018, l’image éculée de l’automobiliste vache à lait n’a malheureusement jamais été aussi proche de la réalité. Les conducteurs, incités pendant des années par les gouvernements successifs à acheter au prix fort des véhicules diesel économes mais polluants sont aujourd’hui sévèrement sanctionnés à la pompe où l’Etat prélève 60 % de chaque plein. Dans les agglomérations où l’Etat s’apprête à réinventer l’octroi, les péages existent déjà sous la forme du stationnement payant et des amendes dont la fréquence et les tarifs ont totalement explosé cette année. Depuis le 1er juillet, la limitation à 80 km/h sur le réseau secondaire a multiplié par deux le nombre de flashs sans rendre, pour autant, les routes moins dangereuses, ce que les chiffres inquiétants de septembre ont confirmé hier. Qu’importe : les recettes des radars devraient rapporter plus d’1,2 milliard d’euros en 2019. Voilà bien une affaire qui roule ! Faut-il pour autant ne rien faire en se résignant à vivre dans des centres-ville engorgés et pollués ? Bien sûr que non. Mais si, au lieu de taper encore une fois l’automobiliste au portefeuille, on préférait par exemple étendre les primes à la conversion pour l’achat d’autos plus propres et augmenter les aides pour l’acquisition de véhicules électriques ou hybrides, encore réservés à une clientèle huppée ? Alourdir encore la facture, c’est oublier un peu vite que la voiture est une obligation, pas un luxe, pour une majorité de Français. Et que les automobilistes sont aussi des électeurs.
« Alourdir encore la facture, c’est oublier un peu vite que la voiture est une obligation, pas un luxe, pour une majorité de Français. »