Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Ados séquestrés à Vence: prison ferme pour les auteurs

- JEAN STIERLÉ

Maxime et Florent, deux jeunes ados de 17 ans, décident le 29 septembre dernier de quitter une soirée qu’ils jugent sans intérêt, pour rentrer en stop à leur domicile à Vence. Il est aux alentours d’une heure du matin lorsqu’une Peugeot 206 s’arrête sur la route de Saint-Jeannet, sombre et peu fréquentée à cette heure de la nuit. À son bord, deux hommes fortement alcoolisés leur proposent de monter dans le véhicule, à l’arrière. Les ados hésitent mais les deux hommes insistent. Ils finissent par grimper dans l’auto et c’est là que leur cauchemar commence. Ils vont être séquestrés, menacés de mort et vont courir des risques insensés aux mains des deux individus ivres et inquiétant­s, qui ont immédiatem­ent verrouillé les portières arrières. Le conducteur, c’est Didier Margarello, un Cagnois de 39 ans qui roule sans permis. Le passager, Nicolas Mauffait, est natif de Fourmies, dans le Nord. Confondus et appréhendé­s notamment grâce au repérage de leur voiture décrite par les victimes, ils comparaiss­aient lundi devant le tribunal correction­nel de Grasse, présidé par Martin Delage. Les familles des victimes, présentes à l’audience, sont fortement choquées par les faits.

Des versions bien différente­s

Les versions qui sont relatées à l’audience sont bien différente­s pour les uns comme pour les autres. Côté prévenu, Didier Margarello décrit ainsi les faits : « On sortait d’un restaurant de Gattières et on avait bu du vin et un digestif. On les a pris en stop au retour. Mais chemin faisant ils ont mal parlé de notre quartier, là ou l’on vit. Ça m’a pas mal énervé. On les a déposés à un autre endroit pour qu’ils restent en galère. Y’a rien eu de spectacula­ire dans tout cela. » Nicolas Mauffait lui aussi nie les faits et minimise l’incident : « Il n’y a jamais eu de menaces de mort ! » Côté victimes, il en va tout autrement. Chacun à son tour, les deux garçons témoignent. «Ils nous ont forcés à monter dans le véhicule. Ils ont verrouillé les portières et commencé à nous menacer. Ils nous ont conduits sur un petit chemin menant au fond d’un bois où se trouve une caravane abandonnée. Là, ils ont dit : ‘‘Il y a des armes à l’intérieur, on va vous tuer, on va creuser un trou, vous aller pas vous en sortir’’ ». Et un des garçons, terrifié, livre un dernier détail sordide du dialogue agressif : « Tu as beau avoir un beau petit c… serré, je vais te violer!». Après d’autres péripéties, ils finissent par « s’échapper », comme le précise naïvement l’un des bourreaux, demandant tout au long de ce supplice d’arrêter le véhicule conduit à grande vitesse, et de les laisser sortir. On retrouvera le véhicule des agresseurs, deux pneus crevés, sur un parking, en piteux état car le chemin emprunté à vive allure n’était pas carrossabl­e. Les deux jeunes hommes, tétanisés par la peur, restent cachés pendant une heure dans le jardin d’une villa, puis regagnent le domicile de l’un d’eux et y passent le reste de la nuit au premier étage de la maison. Ils parleront de leur sinistre aventure à leurs parents, seulement le lendemain, ce qui étonne les avocats de la défense Mes Emmanuelle Boukobza et Stéphanie Dantzikian qui se demandent pourquoi ils ont préféré envoyer des SMS à des copains plutôt que prévenir leurs parents. De même, la plainte est venue selon elles bien après les faits. Pour Me David Allouche, qui défend la partie civile, «on assiste à une tentative d’inversion des responsabi­lités. L’un des mis en cause pense que les faits sont ridicules voire risibles, l’autre, qu’au pire, on a roulé un peu vite ». Il indique que le traumatism­e est pourtant immense et demande 10 000 euros de dommages et intérêts pour chacune des victimes.

« On se retrouvera quand on sortira ! »

Le procureur de la République, Julien Pronier, rappelle le casier de chacun. Neuf mentions pour Nicolas Mauffait, père de deux enfants, technicien de laboratoir­e en CDI. Dix-huit mentions pour Didier Margarello qui est sorti de prison en mars dernier. Bien sûr, dans ce genre d’affaires, il y a une forme de culpabilit­é qui étreint les victimes souligne-t-il. « On sait que l’on ne doit pas faire d’auto-stop et qu’il vaut mieux dormir sur place, des consignes parentales qu’on a transgress­ées. » Ce qui explique la réaction des garçons. Pour les prévenus, il s’agit plus d’une escalade de menaces de personnes alcoolisée­s que de réelles intentions de violences. Le procureur de la République a requis 4 ans de prison pour Didier Margarello et 3 ans pour Nicolas Mauffait avec maintien en détention. À la défense, les avocates ont plaidé certaines incohérenc­es du dossier, et que la volonté de séquestrat­ion n’était pas caractéris­ée. Elles posent aussi la question : « Vont-ils être victimes de leurs casiers judiciaire­s ? ». Le tribunal a condamné Didier Margarello à 5 ans de prison et 4 ans pour Nicolas Mauffait avec maintien en détention. Ils quittent le box en hurlant « bâtards, fils de p… on se retrouvera quand on sortira » pour impression­ner encore une fois les deux lycéens qui ont eu du mal à supporter cette épreuve supplément­aire.

 ?? (Photo doc Nice-Matin) ?? Les deux prévenus, un Cagnois de  ans et un natif de Fourmies dans le Nord, ont été condamnés par le tribunal correction­nel de Grasse à de la prison ferme. Ils étaient déjà connus par la justice pour des faits de violence avec armes et menaces de mort.
(Photo doc Nice-Matin) Les deux prévenus, un Cagnois de  ans et un natif de Fourmies dans le Nord, ont été condamnés par le tribunal correction­nel de Grasse à de la prison ferme. Ils étaient déjà connus par la justice pour des faits de violence avec armes et menaces de mort.

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