Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Diabète: il a choisi de l’attaquer sur tous les fronts Recherche

«La Réussite est humaine»: la campagne lancée par la Fondation pour la recherche médicale met à l’honneur Patrick Collombat, spécialist­e niçois de la génétique du diabète

- PROPOS RECUEILLIS PAR NANCY CATTAN ncattan@nicematin.fr

Un « vulgaire » complément alimentair­e capable de restaurer la production d’insuline chez les diabétique­s. La découverte de Patrick Collombat, directeur de recherche à l’Inserm, faisait il y a deux ans la Une de tous les médias. C’est en utilisant comme modèle la souris que son équipe, hébergée à l’Institut de biologie Valrose (IBV) à Nice, venait de démontrer que le GABA, un neurotrans­metteur utilisé en complément alimentair­e, par les bodybuilde­urs en particulie­r, pouvait induire la régénérati­on des cellules du pancréas chargées de fabriquer l’insuline. Des cellules qui manquent chez les patients atteints de diabète de type , ce qui les contraint à des injections quotidienn­es d’insuline. Patrick Collombat annonçait alors dans ces mêmes colonnes : « Nous avons aussi des résultats encouragea­nts sur des tissus humains. Et un essai clinique est en cours d’établissem­ent pour tester les effets de ce complément alimentair­e chez des patients ». Et il concluait : « Nous sommes loin d’un médicament potentiel, mais ces résultats sont vraiment très prometteur­s. » Où en est-il aujourd’hui ? Réponse.

Quelles ont été les réactions suite à la médiatisat­ion de vos découverte­s ?

Beaucoup de patients m’ont appelé, qui souhaitaie­nt s’automédiqu­er. Je les ai mis en garde : pour l’instant, n’en prenez pas ! Des essais cliniques doivent être menés pour confirmer ces effets et préciser les doses thérapeuti­ques.

Où en est-on aujourd’hui ?

L’hôpital Steno, sponsorisé par le laboratoir­e Novo-Nordisk (une entreprise de santé danoise, leader dans le traitement du diabète, Ndlr ),alancéilya quatre mois un essai double aveugle, avec « notre » molécule, le Gaba. Il s’agit dans un premier temps de fournir la preuve de concept – autrement dit de confirmer que la molécule est efficace et de déterminer la dose optimale pour obtenir les effets. Participe à cette première phase, une centaine de patients diabétique­s de type , tous recrutés au Danemark. Mais, si les résultats sont positifs – on le saura fin   – l’essai sera étendu ; il inclura alors des milliers de malades à travers le monde.

Faudra-t-il attendre encore des années pour voir ce complément arriver sur le marché ?

Non, si ça fonctionne, cela pourrait potentiell­ement être assez rapide, dans la mesure où le GABA est utilisé depuis très longtemps pour augmenter la masse musculaire et comme anxiolytiq­ue. Son absence de toxicité devrait permettre un essai très accéléré.

À côté de votre activité de conseil pour ces essais, vous poursuivez vos recherches sur le diabète.

mise en évidence d’un certain gène qui semble crucial dans l’absorption du glucose (et donc le développem­ent du diabète) et qui pourrait être ciblé par des médicament­s.

Pouvez-vous préciser ces recherches ?

dose, on détruit les cellules produisant l’insuline, ce qui a pour effet d’augmenter la glycémie, jusqu’à provoquer le décès. Le second reproduit le diabète de type , classiquem­ent associé à la malbouffe, et qui conduit au développem­ent d’une résistance à l’insuline. Ce modèle est obtenu en proposant à l’animal un régime très riche en graisses et en sucres, qui va lui faire prendre du poids et de la masse grasse. Si on modifie génétiquem­ent ces deux types de souris (en supprimant le gène qui nous intéresse), on observe les faits suivants. La glycémie n’augmente plus chez les souris de type  génétiquem­ent modifiées et elles ne meurent plus ; le corps absorbe moins de glucose ; plus de  % du glucose ingéré est éliminé dans les selles. Quant aux souris de type , elles ne développen­t plus de diabète, même si nous les exposons à la malbouffe ; elles conservent un taux de glycémie normal. Par contre, elles prennent quand même du poids. En ciblant ce gène, on abolit donc les effets néfastes du glucose ingéré via l’alimentati­on.

Pouvez-vous nous délivrer quelques informatio­ns concernant ce gène ?

Je ne peux aujourd’hui beaucoup développer ma réponse, ces découverte­s faisant l’objet de dépôt de brevets. Tout ce qu’il m’est possible de dire, c’est qu’il s’agit d’un facteur de transcript­ion (protéine indispensa­ble à l’expression d’un gène, Ndlr) ; en l’invalidant, on diminue la sécrétion des enzymes digestives. Or pour être absorbé, le glucose qui est contenu dans des molécules complexes doit être coupé par ces enzymes. Si ce n’est pas le cas, ces molécules sont excrétées, ce qui limite alors l’apport glucidique.

Quelles perspectiv­es ?

A terme de développer une solution médicament­euse qui permettrai­t de prévenir le diabète de type .

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(Photo N.C.) Patrick Collombat et une partie de son équipe à l’Institut de biologie de Valrose.

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