L’avis du Dr Catherine Ciais
« La question de Bernard est légitime, et anime des débats tumultueux depuis des années. La loi actuelle en France répond à la problématique d’une personne atteinte d’une maladie grave, et qui, en phase terminale, ne souhaite pas vivre en conscience cette période : elle peut demander la sédation profonde et continue maintenue jusqu’au décès (SPCMD). Elle a alors accès à un sommeil profond jusqu’à son décès, lui évitant de vivre une situation qu’elle juge elle-même trop pénible. La nuance avec l’euthanasie est de taille : c’est un choix accompagné par les soignants et les proches. Quand ce type de décision s’impose à une personne, c’est toujours dans un contexte subtil, rempli de paradoxes, concernant à la fois ellemême et ses proches. C’est un moment crucial, fort, qui nécessite un accompagnement à la fois humain et technique. Cette pratique de la SPCMD, légale en France depuis février 2016, est en cours d’évaluation au niveau national. Laissons-nous le temps de réfléchir jusqu’au terme de ce travail. Les pays qui ont légalisé l’euthanasie commencent à s’interroger sur leurs propres dérives. Notre pays doit éviter de prendre ce même chemin. Par ailleurs, en tant que proches au quotidien des personnes en fin de vie, nos problématiques sont exceptionnellement orientées vers des « demandes d’euthanasie non entendues ». C’est plutôt au problème de la place que nous laissons dans notre société aux personnes fragilisées par une maladie grave que nous sommes confrontés tous les jours. La demande de la majorité de ces personnes est d’avoir un environnement qui leur permette de vivre dignement, même s’ils sont malades, en perte d’autonomie. Par exemple, lorsque le retour à domicile n’est pas possible, les alternatives sont très minces. C’est dommage que lorsqu’on parle dans les médias de la fin de vie, ce soit toujours autour de la problématique de l’euthanasie, alors que bien d’autres sujets, notamment la place laissée aux plus fragiles, méritent un vrai débat. »