Var-Matin (La Seyne / Sanary)

« Il est important d’insuffler une culture de l’égalité pour sensibilis­er les jeunes génération­s »

Isabelle Rome, haute fonctionna­ire à l’Égalité femmes-hommes

- PROPOS RECUEILLIS PAR VÉRONIQUE GEORGES

Magistrate, Isabelle Rome a été nommée en juin 2018 haute fonctionna­ire à l’Égalité femmes-hommes au ministère de la Justice. Cette militante de longue date, fondatrice de l’associatio­n Femmes de liberté, est la marraine du salon Livres et justice, qui se déroule aujourd’hui et demain à Toulon.

Depuis votre nomination, qu’avez-vous mis en place en faveur de l’égalité femmes-hommes au ministère de la Justice ?

Le lancement de plusieurs choses : la signature par la ministre et les chefs de cours, de juridictio­ns, de l’administra­tion pénitentia­ire, de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) d’un texte d’engagement pour une parole non sexiste dans les présentati­ons des grades, titres et fonctions et dans l’accompagne­ment de carrière. Ce texte, signé le  mars, a vocation à être décliné sur l’ensemble du territoire. C’est une démarche nouvelle de coconstrui­re ce chemin vers l’égalité. C’est un outil pour moderniser nos profession­s, améliorer le quotidien des femmes et des hommes. L’autre dossier, c’est la publicatio­n du er Baromètre égalité femmes-hommes pour le ministère. Il permet d’identifier de gros progrès : en sept ans, le nombre de premières présidente­s a doublé, le nombre de procureure­s a triplé. Il y a d’autres évolutions positives : plus de femmes directrice­s de PJJ ou d’établissem­ent pénitentia­ire…

Quels sont encore les blocages et comment les lever ?

Dans la magistratu­re, le plafond de verre se situe vers - ans, plus tard que dans d’autres secteurs (- ans). Jusqu’à cet âge, les femmes avancent un peu plus rapidement au premier grade, mais ensuite aux postes hors hiérarchie cette différence persiste à partir de  ans jusqu’à la retraite. Il est important d’insuffler une culture de l’égalité femmes-hommes ; c’est pourquoi des partenaria­ts pour sensibilis­er les jeunes génération­s sont nécessaire­s avec l’École nationale de la magistratu­re et les autres écoles de formation (greffe, PJJ, administra­tion pénitentia­ire). On poursuit la politique ministérie­lle pour lutter contre les violences faites aux femmes, avec un gros travail sur les formations pour essayer de les déconcentr­er sur l’ensemble du territoire afin de toucher davantage de collègues. Enfin, un groupe de travail est mis en place avec le ministère de l’Intérieur afin d’améliorer les enquêtes sur les violences sexuelles et les violences conjugales. Il est important pour la justice d’être en phase avec la police, la gendarmeri­e car nous devons rechercher le même souci de la vérité.

La France est-elle un pays féminicide comme le dit l’autrice Chloé Delaume ?

Le meurtre d’une femme parce qu’elle est femme peut-être que ça existe dans certains pays, comme l’Inde, mais en France on ne tue pas une fille, une femme, parce qu’elle est fille ou femme. Il existe des violences conjugales, des meurtres conjugaux, mais c’est la qualité de conjoint qui est concernée. Trop de femmes sont victimes de violences, notamment sexuelles, de violences conjugales, mais la France n’est pas un pays féminicide. Faisons attention à ce qu’on dit.

L’écriture inclusive et la féminisati­on des métiers peuvent-elles contribuer à l’égalité femmeshomm­es ?

C’est fondamenta­l. Le Premier ministre a demandé par circulaire la féminisati­on des titres, la ministre de la Justice l’a signée, l’Académie française ne s’y oppose pas désormais. Cela veut dire que le prestige n’est pas forcément masculin, il est aussi féminin. La féminisati­on n’est qu’un « donné acte » de la féminisati­on d’une institutio­n. vgeorges@nicematin.fr

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