Le pouvoir renforcé d’Edouard Philippe
Les mécanismes de la Ve République produisent toujours les mêmes effets. La relation qu’ils instituent entre le président de la République et ‘’son’’ Premier ministre crée en effet une situation complexe qui tourne inéluctablement au rapport de force : à Matignon, le chef du gouvernement se voit pousser peu à peu des ailes élyséennes et devient de fait un rival du chef de l’Etat. Nous n’en sommes pas là entre Emmanuel Macron et un Edouard Philippe soucieux de ne rien dévoiler de ses ambitions et jamais pris en défaut sur le terrain de la loyauté. Reste que, à côté d’un Président omniprésent, il a imposé son image dans l’opinion. Au point qu’il est désormais plus populaire qu’Emmanuel Macron comme le montre le sondage Ifop-Journal du Dimanche publié le novembre. Après jours de mandat, le Président se retrouve avec % des Français mécontents et % seulement satisfaits alors qu’Edouard Philippe engrange encore % de satisfaits pour % de mécontents. Ces chiffres, qui reflètent malgré tout la crise de confiance qu’affronte le couple exécutif, confirment un fait politique important : le socle politique d’Emmanuel Macron à gauche et chez les écologistes étant friable, sa solidité dépend de plus en plus des électeurs du centre et de la droite. Dans les enquêtes d’opinion, le diable souvent se cache dans les détails. Celui-ci n’aura sans doute pas échappé aux stratèges électoraux élyséens : dans l’électorat Les Républicains Edouard Philippe compte % de satisfaits contre % seulement pour Emmanuel Macron. Bref, le chef du gouvernement est indispensable pour capter les voix de droite dans la perspective de la présidentielle. La situation de l’ancien maire du Havre est d’autant plus confortable qu’il fait jeu égal avec le chef de l’Etat auprès des centristes et le talonne dans l’électorat des Marcheurs. Il est en outre un peu moins rejeté par les socialistes et les écologistes. En d’autres temps, cette situation aurait conduit à de fortes tensions entre l’Elysée et Matignon. Rien de cela ne transparaît entre Macron et Philippe mais la donne a bel et bien changé entre eux. Le Président ne peut désormais se séparer de son Premier ministre sans courir le risque d’une rupture avec un électorat de droite qui lui est indispensable. D’ailleurs, plus Edouard Philippe est loyal, plus il ligote Emmanuel Macron. Les municipales qui pourraient bien sourire aux Républicains, tant ils ont de maires sortants bien placés pour être réélus, devraient même renforcer la position du chef du gouvernement et rendre de plus en plus difficile un acte final du quinquennat sans lui.