La genèse de l’idée
« Potagers et compagnie » n’a pas fleuri en une saison. Le projet a mûri au fil des années. Un retour dans le temps s’impose, donc, pour connaître l’histoire de cette idée qui commence à tracer son sillon. Elle est liée au déménagement, au Val, en 2014, du Cabinet d’agronomie provençal, fondé il y a vingt-trois ans par Laurence Berlemont. Les bureaux des 35 salariés ont été aménagés dans la ferme d’un ancien domaine sur lequel, autrefois les cultures foisonnaient. L’installation passée, l’oenologue dressait un constat. « Je trouvais dommage que nous, spécialisés dans le conseil agricole, ne faisions rien sur ce domaine de 15 ha. » La rencontre avec le voisin curieux de connaître la destination des terres a été aussi un élément déclencheur. « Il m’a parlé d’un champ en particulier : ‘‘C’était le plus beau rendement de patates de tout le village’’. » Une parcelle bordée par la rivière. L’ingénieur agronome se dit alors : « Ce serait marrant de refaire un potager et que les légumes alimentent les salariés. Par ailleurs, j’avais entendu parler de la ferme Bec Hellouin (école de permaculture en Normandie, Ndlr) et souhaité participer à un de ses stages, il y a trois ans. »Un an et demi d’attente pour suivre une formation. Laurence Berlemont passe une semaine là-bas, en été 2018. Le potager se dessine avec une première idée : « Mettre le terrain à disposition ». Elle est vite évacuée. « Si je faisais ça, j’allais contribuer au schéma qui existe depuis au moins une dizaine d’années : un paysan qui va bosser cinquante heures par semaine, cinquante semaines par an et qui va toucher 500 euros par mois pour nourrir des cadres comme nous. Humainement, philosophiquement, intellectuellement, ce n’était pas possible. Il fallait que je trouve un autre truc. » Elle décide alors de bâtir ce projet à partir de sa société, le Cabinet d’agronomie provençale. « Puisque tout le monde parle de la Responsabilité sociétale des entreprises (RSE), pour contribuer
Laurence Berlemont.
au bien-être des salariés et à l’environnement, au lieu de laisser le maraîcher autonome, je le recrute. Il devient un salarié et c’est le nourricier de notre communauté. » Soit avec les familles des 35 salariés, une centaine de personnes. « L’entreprise investit – serres, plants, matériel… – et les légumes et fruits produits sont revendus au personnel au tarif normal d’une Amap classique. » Un retour sur investissement avec ces ventes ? « Si ça s’équilibre tant mieux. Dans le cas contraire, l’entreprise comble le trou dans le cadre de sa RSE. Le maraîcher continue à être payé. Il a des vacances comme tout le monde. »