Disparition de l’héritier des anneaux à ans
Fils et exécuteur littéraire de l’oeuvre de son père J.R.R. Tolkien, Christopher est décédé dans la nuit de mercredi à jeudi, à 95 ans, à l’hôpital de Draguignan, non loin de sa résidence varoise
Tremblement de terre mondial au royaume de l’Heroïc Fantasy. Christopher Tolkien est disparu paisiblement, dans son sommeil, dans la nuit de mercredi à jeudi, au Centre hospitalier de la Dracénie (CHD), où il avait été admis cette semaine pour des tracas de santé. Notamment une forte douleur au bras. Toute sa vie, il aura vécu dans l’ombre des géants comme de celle des petits hobbits. La rançon de la gloire d’être l’héritier de l’un des écrivains les plus lus au monde. Mais aussi l’histoire d’une extraordinaire transmission littéraire entre un père et son fils...
Vie discrète dans la campagne
Celui qui soufflait ses 95 bougies le 21 novembre dernier dans le Var, avait beau avoir une aura planétaire, sa vie dans la campagne aupsoise était plus que discrète. Au village, s’il était connu qu’une figure liée au Seigneur des Anneaux età Bilbo le Hobbit résidait dans les parages, sa présence dans le centre se faisait depuis toujours rarissime. Dans sa propriété à l’écart du village, il coulait depuis 1975 des jours paisibles dans un décor de pins et d’oliviers, entouré de son épouse Baillie. En devenant l’exécuteur littéraire du Britannique John Ronald Reuel Tolkien (1892-1973), Christopher Tolkien a dû pourtant s’exposer à de multiples reprises. Notamment lorsque sont sorties les deux trilogies cinématographiques de Peter Jackson qu’il ne goûtait guère... L’an dernier encore, l’héritier sortait de sa réserve de concert avec le très pointilleux Tolkien Estate, structure juridique autour de l’oeuvre de J.R.R. Tolkien, pour condamner le biopic hollywoodien consacré à la jeunesse de son père et distribué sur les écrans le 15 juin dernier par Disney. Ce reniement de Tolkien –lefilm
– était une nouvelle faille creusée entre la Terre du Milieu, imaginée par son père, et celle édifiée par une postérité commerciale dans laquelle il ne se reconnaissait pas. « Tolkien est devenu un monstre, dévoré par sa popularité et absorbé par l’absurdité de l’époque », avait-il coutume de commenter. « Ils ont éviscéré le livre, en en faisant un film d’action pour les 1525 ans. Un tel degré de commercialisation réduit à rien la portée esthétique et philosophique de cette création...», déclarait-il même, en 2012 au Monde, au sujet de la trilogie du Seigneur des Anneaux.
«Interprète» de l’oeuvre
Né à Leeds, le jeune Christopher entre en juillet 1943 dans la Royal Air Force où il devient pilote. Il retournera terminer ses études à l’université d’Oxford après la guerre, et enseignera ensuite le vieil anglais et l’anglais moderne avant de se consacrer à l’oeuvre paternelle dont enfant, il fut le premier auditeur réceptif. Sans relâche, il exhumera les trésors des 70 boîtes d’archives, chacune bourrée des milliers de pages inédites, récits inachevés, poésies, etc., légués par son père. Et en poursuivra les publications, comme Le Silmarillion, à force d’un labeur acharné. Devenant de son propre aveu, « l’historien de l’oeuvre et son interprète ».
Obsèques varoises ?
Avant Aups, la famille résida durant quinze ans, dans les années 60-70, à La Garde-Freinet. Son fils, Adam, né en 1969, également très investi dans l’héritage littéraire du patriarche, et sa fille, furent même scolarisés au village. Ils demeurent d’ailleurs sudistes dans l’âme, puisqu’ils vivent dans le secteur marseillais. Tous deux ainsi que Baillie, sa femme, étaient mercredi soir réunis au chevet dracénois de Christopher pour une nouvelle chaleureuse visite. Bien loin d’imaginer que l’être cher ne se réveillerait pas... Pour l’heure, aucune date n’est confirmée pour ses obsèques qui devraient avoir lieu dans le Var. Terre d’adoption où Christopher Tolkien, naturalisé français, aur ait émis le souhait de reposer pétri des contes et légendes qu’il emporte avec lui.