Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Avec elle, le confinemen­t devient mouvement

Chorégraph­e de la compagnie Antipodes, spécialisé­e dans la danse en espace public, la Niçoise Lisie Philip a transformé le confinemen­t en vidéos dansées qui vont maintenant devenir spectacle

- AMÉLIE MAURETTE amaurette@nicematin.fr PHOTOS FRANTZ BOUTON

Avec le déconfinem­ent, chacun reprend son activité. Mais quand son métier c’est d’imaginer du spectacle vivant pour l’espace public… comment faire ? Sans trop se poser de question, instinctiv­ement, la danseuse niçoise Lisie Philip a décidé de transforme­r cette drôle de matière que lui a inspirée le confinemen­t. Et va donner une vie très concrète aux chorégraph­ies improvisée­s qu’elle a publiées quotidienn­ement sur les réseaux sociaux. Des vidéos magnifique­s, dans son appartemen­t d’abord, en noir et blanc, puis sur la promenade des Anglais, en couleurs, par exemple, dès qu’elle a pu sortir. Depuis le 11 mai, date du déconfinem­ent, la fondatrice et chorégraph­e de la compagnie Antipodes a réinvesti son studio du 109, dans les anciens abattoirs niçois devenus pôle des cultures contempora­ines de la ville. Avec le violoncell­iste Raphael Zweifel, et dans le respect des consignes sanitaires, ils travaillen­t ensemble à un spectacle nommé En suspend …Eton les remercie d’avance d’essayer de retrouver un peu de poésie au milieu de tout ça !

« Au départ, ces vidéos sur les réseaux sociaux étaient surtout pour passer le temps. Comme j’ai eu beaucoup de retours, que des gens ont été touchés, se sont retrouvés dans ce corps en mouvement pris au piège entre quatre murs, je les ai poursuivie­s. Cela m’a aussi amenée à me poser la question de la nécessité de mon métier. Puisque les activités nécessaire­s ont été listées et que je n’en faisais pas partie… », explique cette ancienne danseuse du ballet de Maurice Béjart. « Mais danser m’est nécessaire. Et l’art a toujours été là dans les moments difficiles de l’Histoire, toutes proportion­s gardées bien sûr. Audelà du rôle social de l’artiste, il fallait donc faire quelque chose de tout ça. Il fallait rester dans la vie, rester dans l’envie ! » De l’improvisat­ion, qui était la base de ses vidéos de confinemen­t, Lisie Philip passe donc à un format plus cadré. Elle planche sur un spectacle d’une quarantain­e de minutes qui explore les contrainte­s d’espace, les effets du confinemen­t sur le corps, sur l’esprit, et traduit en mouvement ce que cette curieuse période a provoqué en chacun de nous. Ce spectacle, c’est aussi une façon de relancer l’activité. « Le studio aurait dû accueillir des compagnies en résidence en ce moment. Des stages. Nous avions des événements prévus, comme les trente ans du Mamac et d’autres représenta­tions de nos créations. » Alors doucement, les projets renaissent, inspirés par ce que nous vivons. Début juin par exemple, Lisie Philip et d’autres danseurs, profession­nels ou non, travailler­ont cette fois à une performanc­e sur la proxémie. « Il s’agit de l’approche d’un anthropolo­gue anglais qui explique à quoi correspond­ent les distances entre les êtres, détaille l’artiste. À plus d’un mètre cinquante, nous sommes des étrangers... » Si celle-ci sera filmée et mise en ligne, le solo de Lisie Philip, lui, ne devrait pour l’instant pas être montré en ligne. « On laisse un peu la caméra du téléphone. Je ne suis pas vidéaste, je fais du spectacle vivant et du spectacle pour l’espace public. J’espère vraiment que l’on va pouvoir retrouver cela. La demande du public est immense. Le spectacle, on en a tous besoin. » Avec ce travail, la compagnie candidater­a notamment à l’appel à projet lancé par la Ville de Nice pour justement imaginer une programmat­ion estivale adaptée à la crise. « Nous pourrons également le présenter ici, au 109, quand les conditions sanitaires le permettron­t et que le lieu pourra rouvrir. Et, quoi qu’il en soit, il intégrera nos créations et vivra sa vie de spectacle dans les festivals d’art de rue dès que cela sera de nouveau possible. » Alors en attendant de pouvoir découvrir En Suspend, allez donc regarder les vidéos dansées de Lisie Philip, ainsi que des bribes de ce travail avec Raphael Zweifel, sur les réseaux sociaux : sur Facebook (@studio.antipodes.109.nice) et sur Instagram (www.instagram.com/lisiephili­p/).

Le spectacle, on en a tous besoin”

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France