Les petits patrons pêcheurs dénoncent les quotas
Mardi 26 mai a marqué le début de la campagne de pêche de thon rouge en Méditerranée. Une quinzaine de thoniers-senneurs de Sète, premier port méditerranéen pour le thon rouge, a pris la mer pour cinq semaines. Depuis dix ans, en effet, sont instaurés des quotas de prises et une réduction du temps de pêche, qui durait précédemment jusqu’à neuf mois. Résultat : alors que le thon rouge a failli disparaître de Méditerranée, les scientifiques de l’ICCAT (commission internationale pour la conservation des thonidés) constatent un accroissement de nombre de thons rouges, une reconstitution du stock digne d’il y a au moins dix ans. « Cette bonne nouvelle ne doit pas occulter le problème du partage entre pêche artisanale et pêche industrielle », explique Pierre Morera, prud’homme des Salins d’Hyères, président du comité varois des pêches. ne veulent pas qu’on travaille alors que c’est eux qui ont ruiné le stock. » Benoît Guérin, pêcheur aux Salins, résume : « Celui qui a beaucoup pêché continuera à le faire. C’est un problème de répartition, aucune nouvelle part du gâteau n’est accordée. Vu le faible nombre d’autorisations européennes de pêche (AEP) distribuées, il faut débourser au marché noir quand on n’a pas d’antériorité. C’est le même principe que les licences de taxis ». Sauf que cette pratique n’est en principe pas permise pour la pêche. Pierre Morera reprend : « Nous avons introduit un recours pour savoir s’il est normal que les thoniers-senneurs s’accaparent plus de 80 % des quotas. Étonnamment, nous n’avons pas de nouvelle de ce dossier depuis trois ans. Le gros problème, c’est que la pêche est fondée sur l’antériorité. Quand on est pêcheur artisan, il est très difficile de se lancer. Les autorisations sont délivrées au comptegouttes, le jeu est figé. Moimême, il a fallu que j’essuie dix ans de refus pour avoir enfin le droit de pêcher du thon rouge ». Les artisans pêcheurs sont 140 en Méditerranée à disposer d’une autorisation européenne de pêche pour le thon rouge, une vingtaine dans le Var. « On sait que des pêcheurs industriels rachètent des AEP pour en faire de “faux petits métiers”, sur des catamarans de 24 m. Ceci réduit au fil du temps le nombre de petits pêcheurs », relève Pierre Morera. Hier, il s’est fait un devoir de ramener un thon rouge de 46 kg, pêché à la ligne à 6 milles au sud de l’île du Levant, pour en faire profiter ses clients et tirer le signal d’alarme. D’autres patrons pêcheurs de tout le littoral français
(1) se sont mobilisés pour solliciter une équitable répartition des quotas qui permettrait, selon eux, de faire vivre des petits pêcheurs aux pratiques plus respectueuses de l’environnement. Ils veulent faire du 26 mai la journée de la pêche artisanale du thon rouge. 1. Le collectif thon rouge regroupe la plateforme française de la petite pêche artisanale, l’association Pleine mer et le comité départemental des pêches du Var.