Immersion au coeur du monastère DRAGUIGNAN
Installées depuis trente ans à Draguignan, les petites soeurs de la Consolation témoignent d’une vie monastique entièrement dévouée. Mais pas déconnectée de la réalité pour autant
Àquoi peut bien ressembler une existence menée entre les murs d’un monastère ? Comment vivent ces âmes pieuses, qui ont fait le choix d’entrer dans les ordres ? Comment s’organisent-elles au quotidien ? À toutes ces interrogations, les petites soeurs de la Consolation, installées à Draguignan depuis , apportent des réponses. En laissant parler leur coeur...
Reposant sa tasse de café, soeur Agnès, prieure des petites soeurs de la Consolation du Sacré-Coeur et de la Sainte Face, annonce : « Avant d’aller plus loin, il me faut vous conduire dans un endroit particulier. Là où se trouve le coeur de notre vie. » Sans perdre une minute, la soeur s’engouffre dans l’une des nombreuses coursives du monastère, jusqu’à atteindre un escalier pentu, dont le sommet laisse entrevoir une porte en bois de couleur bleue. L’ouvrant sans un bruit, soeur Agnès entre alors dans la chapelle du Sacré-Coeur, lieu emblématique de la communauté, et prend place sur la dernière rangée de bancs. Devant elle, une dizaine de soeurs s’adonnent à leurs prières quotidiennes. Leurs murmures sont à peine perceptibles et leur concentration, imperturbable. « En plus des sept heures de prières collectives, chacune de nous accomplit des oraisons personnelles, à raison d’une heure et demie par jour au sein de la chapelle, souffle la prieure. Le premier office démarre à 6h15, le dernier s’achève à 22 h. » Et entre les temps de prière, les moniales ne chôment pas. Bien au contraire. Reprenant son chemin, soeur Agnès décrit ce qu’est une journée type au sein du monastère : « Tous les matins, réveil entre 5h30 et 5h45 pour tout le monde. Celles qui veulent dormir un peu plus doivent le signaler sur un tableau commun la veille. » Ici, pas de réveil sur les tables de nuit. Une soeur se charge de sonner la cloche. « Ensuite, poursuit-elle, lorsque nous ne sommes pas à la chapelle, nous travaillons. Ménage, repassage, cuisine, vaisselle, jardinage, etc., nous avons de quoi nous occuper. Nous le faisons toujours par deux, mais nous changeons d’emploi et de binôme tous les quinze jours. Chez nous, personne n’a le droit de dire : je ne sais pas faire. Nous disons : je vais apprendre. Cela donne confiance en soi et apprend la bienveillance. Par exemple, quand on a soi-même nettoyé des kilomètres de couloir, on comprend l’importance de respecter le travail des autres. » À l’extérieur, après avoir traversé les jardins fleuris du monastère, soeur Agnès retrouve les soeurs
Bernadette et Véronique, occupées à vider les cagettes de fraises pour la préparation de la confiture. «La cuisine est un travail qui n’attend pas, on ne peut pas le remettre au lendemain, sourit-elle. Pour ce qui est de l’approvisionnement, il nous arrive de faire des courses, mais nous sommes aidées par des associations de bienfaisance. Et, comme ici avec les fraises, les supermarchés de la ville nous donnent leurs invendus une fois par semaine. » Soeur Agnès est soudainement interpellée par soeur Sophie, qui invite à la rejoindre dans la partie réservée à la lingerie. « Tout ce que nous avons sur le dos, nous le confectionnons, explique-telle. Au moment de leur prise d’habits, les soeurs apprennent à faire et à repriser. Comme nous avons fait voeu de pauvreté, ces apprentissages sont très importants. Et rien de ce que vous voyez là n’est à nous. Nous n’avons aucune attache matérielle. » Les manteaux de choeur, accrochés sur la penderie mobile derrière elle, affichent pourtant des initiales cousues à l’intérieur du col. « Nous sommes quand même obligées de faire du sur-mesure. Avec son mètre soixante, soeur Agnès ne pourrait pas porter la même taille de vêtement que moi, et mon mètre soixante-dix », plaisante soeur Sophie. Puis, arrivée dans la salle de couture, aux tiroirs soigneusement étiquetés, elle reprend : « Tout doit être rangé et organisé, pour que les soeurs qui nous succéderont ici dans quinze jours puissent s’y retrouver. Nous ne sommes pas la vieille fille qui travaille pour soi, seule dans son coin. » Cela étant, la cohabitation n’est pas toujours évidente. « Surtout entre femmes, concède soeur Agnès. Les éclats de voix sont très rares, et je n’ai jamais assisté de ma vie à une bagarre. Mais il y a eu des heurts. Ceuxci se résorbent naturellement car nous ne sommes pas un groupe de copines, mais une famille unie dans la consolation éternelle de Jésus. Et contrairement à ce que l’on peut retrouver dans une vie professionnelle, il n’y a ni ambition, ni domination, ni volonté d’écraser l’autre. Tout cela n’a aucun intérêt pour nous… »
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Nous ne sommes pas la vieille fille qui travaille seule dans son coin”