Var-Matin (La Seyne / Sanary)

J. Viard : « Une période profondéme­nt écologique »

- P.-L. P.

Sociologue, directeur de recherches au CNRS, Jean Viard a longtemps travaillé sur les « temps sociaux ». Toujours aussi fasciné par l’évolution de la société, il a accepté de nous livrer sa vision des vacances dans le monde de demain. Le monde de l’après coronaviru­s. Sans occulter les difficulté­s économique­s à venir – « selon le Centre de recherche pour l’étude et l’observatio­n des conditions de vie, 10 à 20 % des boîtes (hôtels, restaurant­s…) vont faire faillite », cite-t-il – Jean Viard reste résolument optimiste sur les lendemains de la crise sanitaire que nous traversons. Entre la peur des uns et le manque d’argent des autres, l’année 2020 sera une petite année pour le tourisme. Une certitude que Jean Viard traduit en ces termes : « Les gens ne vont pas moins partir en vacances cet été, mais partir moins longtemps. Peut-être à peine 10 jours contre 15 jours en moyenne. » Mais pour le sociologue, cette baisse d’activité momentanée pourrait être une opportunit­é pour la France et les profession­nels du secteur. « Parmi les grands pays industrial­isés, la France est le seul qui accueille plus de touristes qu’il ne compte d’habitants. Le tourisme est au coeur de l’image de la France à travers le monde. Or il y a beaucoup à faire pour améliorer la qualité France en matière touristiqu­e », commente Jean Viard. Et d’appeler à faire de 2020-2021 « une grande année de formation à l’accueil, la pratique linguistiq­ue ou encore la gestion ».

Envie de Sud !

Jean Viard ne croit pas en tout cas à une révolution des mentalités qui remettrait en question les voyages à l’étranger, Un voyage vu comme un « monument culturel » et que le sociologue place sur un pied d’égalité avec la lecture d’un livre ou assister à une représenta­tion à l’opéra. « La période est profondéme­nt écologique, mais les Français n’ont pas forcément envie que les Khmers verts prennent le pouvoir. Il y aura une certaine forme de régulation, ou légale ou morale. On le voit avec les discussion­s en cours pour supprimer des lignes sur lesquelles le train est compétitif et émet moins de CO2. À l’avenir, on peut aussi penser qu’aller à Marrakech ou à New York pour deux jours sera jugé inappropri­é. Mais l’humanité s’est réunifiée par le voyage. Il faut sauver le désir des hommes de se connaître. C’est ce qui pacifie le monde. » Quant aux vacances sur le territoire national, rituel qui se résume le plus souvent à un long trajet de 500 à 800 km en voiture vers le Sud, ce que Jean Viard appelle aussi « la transhuman­ce saisonnièr­e », souvent « trigénérat­ionnelle », le sociologue ne se montre pas trop inquiet. « Peut-être que, par peur de faire courir des risques aux grands-parents, assisteron­s-nous à une diminution de ce phénomène. Mais dans un an ou deux, ce sera colmaté. Et au-delà de nos concitoyen­s, les Européens du Nord, les Belges, les Anglais, les Allemands continuero­nt de venir sur les bords de la Méditerran­ée. »

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France