Fabrice et Pascal : « Nous avons fait ce qu’il y avait à faire »
La veille du 15 juin 2010, Fabrice Martin-Cocher et Pascal Bonhomme ne se connaissaient pas. Patron d’un garage, pour le premier, et d’une carrosserie pour le second, sur le boulevard du Salamandrier, les deux hommes s’étaient déjà croisés dans le cadre professionnel. Sans plus. Et surtout, sans savoir qu’un jour, le destin allait les réunir dans de si dramatiques circonstances. « Il était un peu plus de 16 heures, ce 15 juin, démarre Fabrice. Je venais de ramener un client et j’étais en voiture, face à Intermarché, sur l’avenue Pierre-Brossolette. Pascal se trouvait derrière moi. Je me suis dit que ça allait s’arrêter. À tort, car l’eau devenait marron et commençait à monter dangereusement. » « Quant à moi, intervient Pascal, je revenais de chez moi et j’étais avec mon fils de 16 ans. Lorsqu’il a vu l’eau monter, il m’a dit : ‘‘Papa, papa, on va se noyer !’’ Mais dans ces moments-là, il est important de savoir garder son calme. Mon premier réflexe a été de mettre mon fils à l’abri. Nous avons nagé jusqu’à la porte d’Intermarché. »
« Scène effroyable » d’un papa cerné par les eaux, son bébé dans les bras
Le père et le fils sont rapidement rejoints par Fabrice qui, lui aussi, fait preuve d’un sang-froid exceptionnel. « Il y avait une espèce de tourbillon à l’angle d’Intermarché, et les voitures nous arrivaient dessus. D’un coup, on a vu un énorme camping-car venir sur nous, fort heureusement amorti par la poubelle fait ce qu’il y avait à faire. C’est tout ».
qui se trouvait à l’entrée du magasin. » Dès lors, Pascal et Fabrice le savent : l’heure n’est plus à la réflexion, mais à l’action. Alors que le premier grimpe sur le toit du camping-car, le second l’aide à faire monter les nombreuses personnes présentes autour d’eux. « Nous étions une cinquantaine à se serrer », se souvient Fabrice
qui, une fois là-haut, aperçoit un totem publicitaire, et décide de s’en servir comme échelle pour que tout le monde puisse accéder au toit du supermarché. les gens crier. » Dans l’esprit de Fabrice et Pascal, l’image la plus marquante restera celle d’un papa, cerné par les eaux et pris au piège sur le rond-point, à quelques mètres de là. « Il tenait son bébé dans les bras. La scène était effroyable et, lorsque les pompiers sont arrivés pour nous hélitreuiller, nous les avons d’abord dirigés vers cet homme, qui en avait plus besoin que nous à ce moment précis!»
« Nous sommes devenus des frères d’eau »
De vrais héros ? Fabrice et Pascal refusent le terme. «Il n’y a aucune gloire à tirer de tout cela. Nous avons fait ce qu’il y avait à faire. C’est tout. D’autres en ont fait autant. » Devenus amis, allant même jusqu’à se définir comme des « frères d’eau », les deux hommes disent aujourd’hui ne pas être traumatisés par ce chapitre de leur vie qui, d’une certaine façon, les a tout de même changés... « Dans la pratique de notre métier, comme dans la vie de tous les jours, il est vrai que l’on a tendance à faire plus attention au respect de l’environnement, reconnaissent-ils. Auparavant, on n’y prêtait pas du tout attention. Ce n’est plus le cas désormais. On essaie d’être le plus vertueux possible pour respecter cette nature qui, lorsqu’elle reprend ses droits, cause les terribles dégâts auxquels nous avons été confrontés. Nous l’avons vécu une fois. Espérons pour nous, pour nos enfants et pour les générations à venir, que ce soit la dernière... »
Tout le monde est resté digne. Résigné”