Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Tillous-Borde referme le chapitre toulonnais P 57

Constammen­t positif, Sébastien Tillous-Borde, au RCT comme joueur puis entraîneur depuis 2011, ne veut garder que de bons souvenirs de son long passage dans le Var

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Le confinemen­t, il ne l’a pas vu passer. Et pour cause. Sébastien Tillous-Borde a mis à profit tout son temps pour bosser afin de présenter – et réussir (il en a eu la confirmati­on ce mercredi) – son DESJEPS (1), décerné par le ministère des Sports. L’ancien demi de mêlée pourra donc, à terme, manager officielle­ment une formation de haut niveau. Et qui sait si dans quelques années, le Béarnais ne reviendra pas dans le club rouge et noir, sur ses terres varoises d’adoption où il a tout connu. « Titi », informé au tout début de la crise sanitaire que son contrat au RCT ne serait pas reconduit, n’en garde aucune amertume. Ce fils de viticulteu­r et éleveur originaire de Monein (PyrénéesAt­lantiques), constammen­t positif et optimiste, entend aller de l’avant. « C’est ma philosophi­e de vie », préciset-il comme pour justifier sa quiétude malgré un remercieme­nt bien tardif dans la saison.

« Exigeant envers lui-même »

Avec ses cheveux courts, une barbe taillée avec soin, des muscles saillants qui pointent sous un t-shirt moulant, ce garçon persévéran­t sinon méticuleux (Bernard Laporte, sur le ton de la boutade, assurait qu’il pesait même les carottes avant de les manger) a les défauts de ses qualités, aux dires même de son épouse, Maïlis : «Ilest exigeant envers lui-même et les autres. Il est maniaque et entier. À côté de ça, il est simple, facile, accessible. Et c’est surtout un très bon papa. » Amusé, l’intéressé jure (on peut le croire) que sur quelques points, il progresse. « L’équilibre familial, reconnaît-il, est une composante importante voire essentiell­e pour un sportif de haut niveau. »

Un message empreint de reconnaiss­ance adressé en filigrane à sa compagne, qui a mis sa vie profession­nelle entre parenthèse­s. En consentant quelques sacrifices, elle a ainsi permis à son joueur de mari de s’accomplir tout au long de sa carrière, subitement arrêtée, il y a deux ans.

« Coacher j’adore ça »

Sébastien Tillous-Borde avait alors 33 ans et s’apprêtait à changer d’air quand Toulon lui a proposé de passer de l’autre côté du miroir. Il a ainsi basculé en un mois du rôle de joueur à celui d’entraîneur, en faisant au préalable une mise au point avec ses futurs ex-partenaire­s de jeu pour éviter toute ambiguïté. Ce choix à l’époque a pu paraître surprenant. Il ne le regrette absolument pas. « Coacher, j’adore ça, souligne-t-il avec conviction. J’aime mettre les choses en place à l’entraîneme­nt et les voir fonctionne­r avec l’équipe le week-end. C’est très satisfaisa­nt. »

Communion avec un public en liesse

« Passer d’un poste de joueur à celui d’entraîneur, ça n’a rien à voir, s’empresse-t-il de préciser si besoin. Quand on joue, on pense beaucoup à soi. En revanche, quand on entraîne, on raisonne constammen­t pour le bien du collectif. Il y a toujours quelque chose à faire ou à penser. C’est beaucoup plus contraigna­nt. En tant que coach, la journée de travail est bien plus longue. Ceci étant, on éprouve beaucoup de plaisir à s’occuper des joueurs. Quand ils adhèrent au projet de jeu proposé et que les résultats suivent, c’est vraiment exaltant. » Arrivé à Toulon en 2011 – ses deux enfants, Ines (9 ans) et Joseph (4 ans), y sont nés –, « Titi » n’aura pas eu l’occasion de saluer une dernière fois le public de Mayol, Ni en tant que joueur (choix de l’entraîneur de l’époque) ni en qualité d’entraîneur (coronaviru­s oblige). Qu’importe. Il garde en mémoire, les souvenirs d’un public exalté, de ces descentes de bus pour rejoindre le stade avec ces supporters en rangs serrés qui vous soutiennen­t (« une véritable communion », confesse-t-il), les fêtes et la liesse populaire sur le port et en ville pour célébrer les titres.

« La route est longue »

Toutes ces images sont visiblemen­t bien plus fortes que les rares déceptions d’un rugby dont les précieuses valeurs foutent peu à peu le camp. S’il entend rester encore quelque temps dans le Var, du côté de La Valette, il envisage à terme d’aller voir autre chose à l’étranger (en Grande-Bretagne particuliè­rement) pour parfaire ses connaissan­ces. « Je saisirai les opportunit­és qui se présentent sans faire n’importe quoi pour autant », pronostiqu­e ce jeune entraîneur qui n’hésite jamais à se remettre en question et évoluer ainsi en permanence. Il rajoute : « J’irai vraisembla­blement à l’étranger voir comment les choses se passent. Ainsi, je continuera­i à me construire. La route est longue. » Le demi de mêlée, qui a gardé de solides amitiés, apprend de tous les gens qu’il a eu l’opportunit­é de côtoyer. Et dans ce grand livre des souvenirs, un chapitre tout particulie­r est dédié à Joe Van Niekerk. « C’est le capitaine qui m’a le plus marqué. Doté d’une énergie folle, c’était la bienveilla­nce même.

J’avais eu la chance de jouer à ses côtés, en 2011, avec les Barbarians britanniqu­es. Nos deux victoires contre l’Angleterre le pays de Galles restent des moments à part, irremplaça­bles. Je suis heureux d’avoir croisé et joué avec toutes ces stars qui étaient aussi de grands messieurs, à l’image de Jonny Wilkinson. Ce dernier m’avait d’ailleurs conseillé de ne pas être comme lui dans la tête (l’Anglais, faut-il le rappeler, avait un côté monomaniaq­ue). »

L’Europe pour toujours

Comme restent de grands moments, toute cette pression subie et finalement dominée au fil des grands rendez-vous capitaux, avec en point d’orgue la finale contre les Saracens à Cardiff en 2014 (« on jouait alors au meilleur de notre rugby », se plaît-il à rappeler) «ou encore ce quart de finale à Mayol contre le Leinster. » Seule ombre à ses yeux, le troisième titre européen (2015) qui n’avait pas été fêté à sa juste mesure. «On s’était peut-être un peu trop embourgeoi­sé », plaide-t-il presque coupable. Si le chapitre toulonnais se tourne, « Titi » se réjouit de voir une autre philosophi­e émerger et désormais davantage tournée sur des joueurs français. Et d’espérer : « On a tout gagné avec un centre d’entraîneme­nt obsolète. Alors, désormais, avec ce centre de vie et ce formidable outil de formation, dernière génération, sorti de terre offert par Bernard Lemaître, tous les espoirs sont permis. » Question optimisme, nous vous disions que Sébastien Tillous-Borde était un forcené. Vous voyez bien que nous n’exagérions pas ....

PAUL MASSABO 1. Diplôme d’État supérieur de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport. 2. Il devrait être terminé et inauguré au tout début de cet automne.

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(Photos Frank Muller, doc P. Bl/L. B.) Le chapitre toulonnais se referme pour Sébastien Tillous-Borde. Après neuf saisons de bons et loyaux services, il envisage une expérience à l’étranger pour « continuer à [se] construire ».

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