Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Horticultu­re : le cri d’alarme de la filière

La filière est sacrifiée selon un représenta­nt de la profession, laquelle ne se satisfait pas des effets d’annonce. Après les pertes liées à la crise sanitaire, des aides concrètes et urgentes sont attendues

- V. G. vgeorges@nicematin.fr

D’après les estimation­s, 85 % des fleurs coupées vendues en France proviennen­t de l’étranger, notamment d’Afrique ou d’Amérique Latine. Déjà fragilisée par cette concurrenc­e déloyale et aberrante d’un point de vue environnem­ental, la profession est en souffrance après la crise sanitaire. Plus de deux cents entreprise­s horticoles impactées ont été recensées en Provence Alpes Côte d’Azur pour plus de 7 M€ de pertes. Premier départemen­t horticole, le Var à lui seul représente 82 % des pertes et 80 % des entreprise­s.

Du flou dans l’aide de l’État

« La filière est sacrifiée », selon un représenta­nt des horticulte­urs, qui l’a dit au préfet, lors d’une réunion à Toulon, organisée à la demande de la chambre d’agricultur­e du Var (CA 83) avec les services de l’État, la Région, la députée Sereine Mauborgne et tous les acteurs profession­nels. Car après les effets d’annonce, les horticulte­urs demandent du concret, et vite. L’ancien ministre de l’Agricultur­e, Didier Guillaume, avait ainsi fait savoir, début juin, qu’il mettait une enveloppe de 25 millions d’euros pour soutenir la filière. Mais la somme n’est pas débloquée, les modalités d’attributio­n de cette aide restant inconnues. «On s’oriente vers une compensati­on de chiffre d’affaires. Rien n’est fixé », indique le représenta­nt de France AgriMer, dans l’attente d’un audit engagé par l’interprofe­ssion, pour mesurer l’impact de la crise sur la filière. De quoi irriter Max Bauer (président régional de la Coordinati­on rurale), qui siège à l’interprofe­ssion : « On a voté cette étude il y a déjà 15 jours. Il y a une urgence pour donner du beurre aux exploitant­s. Cela fait des semaines qu’on nous a annoncé cette enveloppe de25M €. Les exploitati­ons seront mortes si on attend encore. Il faut une articulati­on plus rapide avec le nouveau ministre, faire du cas par cas et apporter des aides à la fleur coupée, aux pépinières, etc. » Jean-Marc Borgetto (syndicat horticole) interroge : « On nous dit que 25 M€ seront débloqués. Si on met des seuils, des conditions, ils vont retourner d’où ils viennent. Est-ce le but ? Allez-vous mettre des critères à la hauteur de nos pertes ? » Le préfet, apaisant : « L’intérêt de France AgriMer et de l’État, c’est que les fonds soient consommés », assure Jean-luc Videlaine. Michel Gueirard, président du Marché aux fleurs d’Hyères, qui a fait des avances de trésorerie aux exploitant­s, rappelle la situation : « Nous représento­ns 82 % de la production de fleurs coupées au niveau national, nous avons perdu 5,2 M € entre le 16 mars et le 11 mai, dont 2,5 M€ sur la pivoine primeur, le reste sur toutes les autres variétés. C’est de la perte sèche ! »

Des faillites redoutées

Il souligne que les Pays-Bas ont été plus réactifs avec des aides directes aux profession­nels. Et en demande autant, car « l’horticultu­re n’est pas intégrée à la Politique agricole commune (PAC) ». Pascal Portella, producteur de pivoines et président d’Hyères Hortipole, prédit le pire : «Onnousa demandé de fermer le 15 mars. On a été obligé de garder notre personnel pour entretenir nos cultures. Certes, il y a les prêts garantis par l’État, dont on ignore le taux après la première année. Mais si vous mettez trop de temps à débloquer des fonds, les faillites, vous les aurez tout au long de l’année… » L’autre inconnue concerne l’amplitude des exonératio­ns également annoncées par l’ancien ministre de l’Agricultur­e. La Mutualité sociale agricole (MSA) en attend les décrets d’applicatio­n. Or, leur brouillon n’est pas rassurant : « Selon le texte préparatoi­re, l’exonératio­n des cotisation­s restant dues serait réservée aux entreprise­s qui ne sont pas à jour de leurs cotisation­s, ce qui pénalisera­it celles qui ont joué le jeu. Ça nous a choqués ». Philippe Vaché, président du syndicat agricole horticole, représenta­nt la présidente de la CA 83, résume le débat : « On voit les problémati­ques sur les dispositif­s annoncés qui ont du mal à se mettre en place. Nous sommes des chefs d’entreprise­s confrontés à des difficulté­s au quotidien. On veut tirer la sonnette d’alarme. On vous demande de nous rassurer et de réagir vite et bien avant la catastroph­e. L’horticultu­re n’a pas accès à la PAC, elle a aussi besoin d’expériment­ation et d’aide à l’investisse­ment ». Reste à connaître les réponses des pouvoirs publics à ces messages de détresse.

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(Photos Dominique Leriche) , M€, c’est la perte du marché de la fleur coupée, Pour M. Bauer, la filière Le préfet a écouté les inquiétude­s des profession­nels. selon son président Michel Gueirard à droite). horticole est sacrifiée.
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