La Cinémathèque célèbre
Prévue au printemps et retardée à cause de la pandémie, l’exposition dédiée au plus populaire des acteurs comiques ouvre aujourd’hui à Paris. Plus qu’un événement : une consécration
Les aficionados de la Nouvelle vague ont dû tirer une drôle de bobine ! Louis de Funès, l’incarnation du « cinéma commercial », intronisé dans le temple du 7e art ? Dans les années soixante, la chose aurait paru loufoque. Et pourquoi pas un acteur de séries B dans le Bureau ovale, tant qu’on y est ? Ou Terminator gouverneur de Californie ? Et puis… il y a eu Ronald Reagan à la Maison blanche. Arnold Schwarzenegger à Sacramento. Et De Funès à la Cinémathèque française. Pour croire en cette idée, et la concrétiser en dépit des obstacles, il a fallu l’obstination d’un homme : Alain Kruger. Ancien rédacteur en chef du magazine Première ,ilasu vaincre les réticences des dirigeants de la vieille maison fondée par Henri Langlois. « Louis n’est pas un simple interprète, argumente-t-il. C’est d’abord un auteur. La persistance de son succès, 37 ans après sa mort, ne peut s’expliquer que par son génie comique. Sa filmographie se confond avec notre histoire, des années noires de l’Occupation au Technicolor des
Trente Glorieuses. Il est la juste incarnation des personnages les plus injustes. » Convaincue, l’administration lui donne carte blanche. Kruger veut faire les choses en grand. Une rétrospective décline jusqu’à l’automne les perles de la filmographie funésienne, des chefs-d’oeuvre de Gérard Oury aux comédies méconnues des années cinquante. Et une exposition, visible jusqu’au 31 mai 2021, réunit des pièces extraordinaires. De la 2-CV du Corniaud, remontée boulon par boulon, à la parure en plumes de L’Avare, en passant par des lettres inédites, même les plus incollables trouvent matière à apprendre et à s’émerveiller. Saviez-vous, par exemple, que Louis avait suggéré Darry Cowl pour remplacer Bourvil dans La Folie des grandeurs ?Que Oury a répondu à la fameuse lettre dans laquelle Truffaut décrypte le succès du Corniaud ? Tout De Funès est là. C’est tout dire.
Il est la juste incarnation des personnages les plus injustes”