Faut-il dire Renécros ou Rènecros ?
La guerre des accents aura-t-elle lieu à propos de cette anse creusée par la Méditerranée dans les coulées de basalte issues des zones volcanique d’Évenos ? La dénomination de cette baie apparaît pour la première fois sur les cartes du milieu du XVIIIe siècle, explique Jean-Marie Schneider, historien de Bandol. On y voit dessinée l’anse de Renecros (sans accent), en particulier sur celles des cartographes de la famille Cassini où figure « Bandol belle rade ». L’anse est répertoriée « calanque de Renecros ou du Château » pour faire référence au Château des Boyer. L’une d’elles, du pilote des galères du Roy Jacques Ayrouard, comporte le terme « L’Isle Cros ».
Naissance d’une controverse
La controverse naît dans la manière d’orthographier le vocable, en particulier de positionner l’accent aigu ou grave sur l’un des « e », et de facto l’élocution qui en découle. Le plus fréquemment on voit Renécros ou Rènecros (1). Jean Grillon, une référence locale, dit avoir toujours écrit et prononcé Renécros, comme son père Lucien. Ce qui est partagé par bon nombre de « vrais » Bandolais, ainsi que l’attestent également des éditeurs d’anciennes cartes postales. Mais force est de constater que « Rènecros » est aussi utilisée par nos anciens, et d’autres maisons, spécialisées en missives postales, ont opté pour la seconde terminologie.
De l’origine du nom
L’origine du nom de la plage pourrait alors venir de la contraction de « arenas » et « cros » : arenas signifiant « lieu plein de sable », l’étymologie occitane de cros étant « fosse, trou, cavité »... Renecros est bien une anse sableuse. Dans le cadre de la lengo nostro, le Provençal, on a « rena » signifiant « grogner, gronder » qui, avec « cros », donne « l’anse qui grogne »... Allusion au bruit que faisait la mer lors des largades ou par fort vent d’ouest, avant la construction de la digue, en s’engouffrant dans la baie et en battant les murs des propriétés qui la bordaient. Ainsi on connaît l’anse de l’Arène à Cassis, la plage du Cros à Six-Fours, Arène Cros à La Ciotat, la plage du Port du Cros à Cagnes-surMer… Alors Renécros ou Rènecros ? Si l’on consulte nos historiens locaux, Lucien Grillon, nous l’avons vu, est partisan du « é », Raymond Culioli du « è », Marius Cayol écrit Rènecros, Max Moutte passe indifféremment de l’un à l’autre… 1. D’autres appellations existent : on peut lire par exemple René-Cros, ou même Rénecros. On peut exclure ces deux versions, pour la première parce qu’il n’y a probablement jamais eu de Monsieur René Cros, pour la seconde parce qu’elle est sans doute liée à une erreur typographique.