Macron face à l’Histoire
Comme s’il cherchait une forme de légitimité dans le passé pour s’inscrire dans une continuité historique, Emmanuel Macron multiplie depuis son élection hommages et commémorations. Figure ainsi sur son agenda, ce vendredi septembre, la célébration du rétablissement de la République, il y a ans, par Léon Gambetta depuis l’Hôtel de Ville de Paris, après l’effondrement à Sedan du Second empire napoléonien. Nul doute qu’il évoquera à cette occasion les ans d’existence de cette IIIe République et ce que nous lui devons : la création d’un régime parlementaire avec les lois constitutionnelles de , l’instauration de la laïcité, la séparation des Eglises et de l’Etat, la liberté de la presse, le régime des associations, l’école gratuite et obligatoire pour tous et bien d’autres textes qui constituent les fondations de notre société actuelle et font de la France un pays singulier dans le monde démocratique. Il est probable que le chef de l’Etat feuillettera également les pages noires ou difficiles de cette période. La Commune bien sûr, au printemps , et l’horrible répression versaillaise pour faire taire ce mouvement qui voulait réaliser les aspirations du monde ouvrier, revendiquait l’émancipation des femmes, plaidait pour une démocratie sociale, etc. Mais aussi la Première Guerre Mondiale, les conséquences de la crise de , la Seconde Guerre Mondiale et la trahison de cette République en par le régime de Vichy. Sans doute abordera-t-il aussi la colonisation. Le fera-t-il sous la forme d’un mea culpa à la mode aujourd’hui ou, sans céder à une commode repentance, en historien éclairant la complexité de l’Histoire ? Autant dire qu’une occasion exceptionnelle s’offre au président de la République d’inscrire son mandat dans un passé, avec ses ombres et ses lumières, dont la France d’aujourd’hui est la fille malmenée. Car, avant de sombrer, la IIIe a su accoucher d’un pays conjuguant république et démocratie, c’est-àdire des principes fondamentaux et le couple élection-Etat de droit. La force de la Ve République est d’avoir restauré ce mariage. Mais son harmonie est désormais remise en cause. Au nom de la démocratie et de la liberté individuelle, les valeurs républicaines, fondées sur l’intérêt général, principe actif de la laïcité, sont contestées et mises à rude épreuve. On le voit avec l’offensive islamiste mais aussi avec une montée de la violence quotidienne qui traduit un effritement du civisme, ciment du vivre ensemble. C’est en raison de ces tensions que nous vivons une période décisive, un de ces moments qui entrent dans les livres d’Histoire car s’y joue tout simplement l’identité d’une nation.