P8 À Coste Chaude, le projet décrié est enterré
Le complexe résidentiel de 140 logements dans la pinède de la rue Fernand-Bonifay ne verra pas le jour. Nathalie Bicais annonce qu’elle refuse le permis au projet porté par Vinci Immobilier
Le sujet a défrayé la chronique de ces deux dernières années. Il a d’abord suscité une mobilisation forte des habitants de la colline concernée. Selon le commissaire enquêteur, en charge du dossier fin 2019, le projet de 140 logements collectifs à Coste Chaude avait même entraîné une « psychose ». Plus de 400 personnes étaient venues manifester leur hostilité lors de l’enquête publique sur la révision du plan local d’urbanisme (PLU) qui permettait sa mise en oeuvre. Le dossier s’est aussi retrouvé au coeur de la dernière campagne municipale. Une période durant laquelle Nathalie Bicais – comme tous les opposants à l’équipe sortante –, avait promis de l’arrêter dès que possible. C’est ce qu’elle vient de faire. « Nous avions jusqu’au 23 août pour nous positionner définitivement sur ce projet (les délais avaient été rallongés du fait de la crise sanitaire, Ndlr). Quelques jours avant l’échéance, j’ai décidé de refuser le permis de construire. Et je l’ai fait en connaissant toutes les conséquences », assure Nathalie Bicais.
1. Pourquoi le rejet ?
« Ce projet était incohérent à plusieurs titres, souligne la maire. D’un côté, l’État et les citoyens demandent aux élus de limiter l’urbanisation et l’imperméabilisation des sols, mais aussi de préserver la biodiversité (1). De l’autre, les collectivités sont sommées de construire toujours plus de logements sociaux. En outre, le projet immobilier à Coste Chaude a été lancé sans aucune réflexion sur l’aménagement de ce quartier où les infrastructures ne sont pas du tout adaptées à l’accueil de 500 personnes supplémentaires. Par ailleurs, durant la période de confinement, on a vu le besoin de retrouver des circuits courts d’approvisionnement en produits frais, avec une agriculture de proximité. Or Coste Chaude est, historiquement, une terre agricole. Pour toutes ces raisons, je respecte ma promesse de campagne d’arrêter le projet immobilier. Ma décision n’est une surprise pour personne car tous les acteurs du dossier, que j’ai rencontrés cet été, ont bien conscience de ma volonté de tenir mes engagements. »
2. Quels acteurs concernés ?
Nathalie Bicais a fait part de sa décision à l’Etablissement public foncier régional (EPFR) qui avait procédé au remembrement des parcelles de Coste Chaude, rachetant les terrains à des propriétaires privés pour près de 3 millions d’euros. La maire a aussi rencontré les dirigeants du groupe Vinci Immobilier, lequel était prêt à réaliser la construction des 140 logements – et qui avait d’ailleurs revu son projet à la baisse après négociation avec l’équipe de Marc Vuillemot. Reste que Vinci avait engagé environ 500 000 € de frais d’études pour concevoir le projet. Enfin, Nathalie Bicais indique travailler sur ce dossier avec la Métropole, désormais compétente en matière d’urbanisme : « Nous sommes solidaires sur ce dossier et un représentant de TPM participe aux discussions que nous engageons ».
3. Quel coût pour la ville ?
« Avec l’EPFR, répond Nathalie Bicais, il faut trouver un arrangement sur le coût du foncier. Nous entrons en discussion mais, sachant qu’il s’agit d’un établissement de soutien aux collectivités, j’ai eu l’assurance de sa collaboration pour nous aider à sortir de cette opération ». Concernant Vinci, poursuit la maire, « le groupe n’est évidemment pas très heureux de notre décision, d’autant que son projet étant conforme au PLU, il n’y a aucun élément urbanistique pour l’empêcher. Mais aller au contentieux n’est pas dans son intérêt car il sait qu’il y aura d’autres opérations – par exemple dans le cadre de la réhabilitation du centre-ville - et qu’il a besoin d’entretenir des relations saines avec la collectivité. Et pour nous, il est intéressant de travailler avec de tels groupes reconnus pour leurs compétences ». Donc, là aussi, des négociations s’engagent : « On est parti sur une discussion concernant les modalités de remboursement des frais engagés par le promoteur », indique Nathalie Bicais. Pour l’heure, il est donc difficile d’évaluer les conséquences financières pour la ville du rejet du permis de construire.
4. Quel projet àlaplace?
« Sur ce terrain historiquement agricole, nous voulons remettre une activité de cette nature », annonce la maire. S’il est trop tôt pour entrer dans le détail, Nathalie Bicais évoque l’installation d’un agriculteur, voire la mise en place d’une ferme pédagogique. « Il est utile de réapprendre le goût et la qualité des bons produits aux enfants. Ce pourrait être aussi l’occasion de valoriser notre cuisine centrale, qui serait davantage approvisionnée en produits frais pour servir des repas aux écoles voire aux maisons de retraite ». L’activité qui sera installée sur le site pourrait l’être moyennant le versement d’un loyer à l’EPFR, propriétaire des terrains, permettant ainsi de lui rembourser, sur une très longue durée, le coût de l’achat des parcelles, envisage la maire. Pour l’heure, conclut Nathalie Bicais, « nous n’en sommes qu’au début de la réflexion. Il faut désormais évaluer toutes les situations. Les discussions commencent avec les uns et les autres, et nous travaillerons aussi avec la Chambre d’agriculture pour la réalisation du nouveau projet ». La maire précise enfin qu’elle envisage de procéder à une révision du PLU, avec la métropole TPM, afin d’éviter que de tels projets immobiliers ne puissent à nouveau émerger.
1. Plusieurs espèces de flore typique, dont des orchidées, ont été recensées à Coste Chaude.