« C’était une vision de guerre » se souviennent des témoins
■ Bernard Mouttet, maire de Cuers : « Il a dormi à quelques mètres de chez mes parents ». Élu en juin dernier, le nouveau premier magistrat, a rendu hommage aux victimes ce jeudi septembre, à heures, en présence des familles, dans l’intimité. Il se souvient de ce jour « maudit » : « Eric Borel a passé la nuit près du lotissement du Mas du Rayol, sous un arbre, à quelques mètres de chez mes parents, avant de poursuivre son parcours meurtrier à Cuers. À cette époque, je tenais le Moulin du Gapeau et j’étais allé chercher du pain. Lorsque je suis arrivé dans le village, c’était effroyable. Il y avait de cadavres au sol, sur les trottoirs, recouverts de draps blancs. Je me souviens ensuite des hélicoptères qui prenaient en charge les victimes. C’était presque irréel. Vingt-cinq ans plus tard, ces souvenirs ne se sont jamais effacés ».
■ Gérard Cabri, premier adjoint en : « Mon fils a croisé le tueur et a fait demi-tour ». « Ce jour-là, c’était le jour des sénatoriales. Nous étions partis voter (pour les sénatoriales, Ndlr) avec Guy Guigou, le maire, à Toulon et nous sommes revenus rapidement dès que nous avons eu connaissance du drame. Nous avons découvert l’horreur. Des adultes et un enfant était tombé sous les balles. Imaginez, ils étaient simplement allés, un dimanche matin, chercher le pain, faire un retrait au distributeur de billets, promener un chien ! Mon fils, qui était en voiture, a croisé le tueur et, alerté, a pu faire demitour... Notre devoir, ensuite, a été de soutenir les familles psychologiquement et financièrement. Je me souviens notamment de ce papa de cinq enfants et de sa famille plongée dans le deuil et des difficultés qu’ils ont éprouvées. Il y a eu des dons, des subventions, une solidarité. C’est un souvenir atroce ».
■ Robert Daumas, adjoint à l’urbanisme en : « J’ai dû aller reconnaître les corps ». Un mot lui revient à l’esprit : terrible. « Guy Guigou a été informé dans un premier temps d’un assassinat alors que nous étions en partance pour Toulon et pour le vote des sénatoriales. À notre retour, ce fut le choc. On nous a dit qu’il y avait eu une tuerie, avec plusieurs cadavres dans les rues. Tout s’est accéléré. Il a fallu recevoir les autorités. J’ai dû aller au gymnase où étaient regroupés les corps pour les reconnaître. Les portes du stade avaient été fermées et les familles attendaient dans un profond désarroi derrière les grilles. Je ne souhaite plus revivre une telle chose, une telle vision de guerre. J’ai ressenti un tel sentiment d’injustice face à la folie qui avait frappé un gamin qui avait un regard presque angélique. Cuers, c’était un village de habitants, où chacun se connaissait de vue. Là, c’était le chaos avec des familles endeuillées, des médias qui arrivaient de tous côtés, même de l’étranger. Ensuite, il a fallu gérer les obsèques, l’après... ».