Les six préoccupations des maires ruraux du Var
Les transferts de compétences, le plan de relance de l’État, la compensation de la fin de la taxe d’habitation, l’aménagement du territoire… Les élus partagent nombre d’inquiétudes
L’épidémie de COVID-19 a mis en lumière leur rôle capital. Les maires, et particulièrement en zone rurale, ont protégé, accompagné, soutenu leur population depuis l’arrivée du virus. Ils ont « organisé la solidarité, le confinement, les circuits alimentaires courts, la transmission des devoirs aux enfants, la poursuite de la vie sociale, le repérage des personnes en difficulté, l’ouverture de centres de consultation, etc. » André Guiol le président de l’association des maires ruraux et son successeur, Michel Gros, élu avec un nouveau bureau (1), l’ont rappelé haut et fort hier à Néoules (2), après une minute de silence en hommage au professeur d’histoire-géographie assassiné vendredi soir. Si leur place est importante, les maires ruraux se battent depuis des années pour que l’échelon communal ne disparaisse pas, pour conserver des compétences ainsi que des moyens d’accomplir leur mission. Car, soulignentils « qu’aurait fait l’État sans ses communes ? » Tour d’horizon de leurs préoccupations.
❶ Les compétences
La loi Engagement proximité, promulguée en décembre 2019, n’a pas apporté toutes les réponses aux attentes des maires ruraux, notamment dans le domaine du transfert des compétences eau et assainissement, eau pluviale. D’autres combats les attendent contre « le risque de transfert forcé de nos PLU, en les transformant en PLUI (pour intercommunaux), alors que les schémas de cohérence et d’organisation du territoire (SCOT) sont déjà là pour ça ». De plus en plus de conseils municipaux délibèrent d’ailleurs contre ces transferts.
❷ La compensation de la taxe d’habitation
« Cela fait des années qu’on soulève ce problème » a lancé le sénateur Jean Bacci, maire de Moissac-Bellevue. Si le maintien des bases de l’année 2020 pour le calcul de la compensation de la taxe d’habitation, dont tous les contribuables doivent être exemptés d’ici 2023, est confirmé, les élus ont dit redouter que les entreprises supportent une part de cette compensation via la cotisation foncière des entreprises. Mais pas seulement. « Les communes recevront la part départementale de la taxe foncière qui leur sera reversée. Le différentiel, 900 M€, sera pris en charge par l’État. Pendant la période transitoire jusqu’en 2023, les communes garderont la main sur l’évolution des taux de la taxe d’habitation et la taxe d’habitation sur la résidence secondaire. Une analyse et un coefficient correcteur seront faits commune par comme et année par année. Le Département et les EPCI qui perdent leur part de la taxe d’habitation et de la taxe foncière, auront une compensation par un impôt très dynamique, la TVA » selon Gérard Blanc, adjoint au directeur départemental des finances publiques (DDFiP). Ce dernier a assuré que « le gouvernement a été attentif de sorte qu’il n’y ait pas de perte pour que le bloc communal retrouve une totale marge de manoeuvre d’ici 2023 ». Les maires s’inquiètent donc du périmètre de ce « bloc communal ».
❸ Le plan de relance
« Les petites communes n’ont pas l’engineering pour monter les dossiers » visant à obtenir leur part du plan de relance, a remarqué Jérémy Giuliano, maire du Val. M. Blanc a répondu que « la DDFiP est consciente » et a conseillé «une mutualisation des collectivités » en attendant la mise en place de l’agence nationale de la cohésion des territoires, chargée de faire fonctionner ensemble des services qui existent déjà.
❹ Les lenteurs des services
Qu’il s’agisse des décharges sauvages, ou d’urbanisme, plusieurs maires, se sont plaint des carences des services de l’État de proximité ou des lenteurs de ces derniers, en particulier la DDTM et la justice. Le préfet du Var, Evence
Richard, a indiqué travailler sur ce dossier avec les parquets afin de « définir un protocole ».
❺ L’aménagement du territoire
Le maire de Callian et conseiller départemental, François Cavallier a interrogé sur l’absence d’un lycée en Pays de Fayence, dont les neuf villages comptent ensemble 31 000 habitants et un nombre de lycéens suffisant. Cette « ruralité nombreuse » est à ses yeux pénalisée : « Ce serait un lycée de confort. On sous-entend par là : vous avez voulu vivre à la campagne, assumez. Vous n’avez qu’à mettre vos enfants dans des bus à 6 heures du matin, a-t-il dit. Je vous mets au défi de trouver une ville de 30 000 habitants sans lycée ». Pour le préfet « on peut prendre comme référence le nombre d’habitants mais aussi le nombre d’élèves. Il n’y a pas de règle fixe (...). Il faut renouer avec le système de l’internat même si c’est frustrant pour les parents. Cela permet de disposer d’un cadre d’éducation rénové ».
❻ Les terres agricoles
Valérie Marcy, maire de La Motte, a regretté le désengagement du Département dans le financement du déploiement du canal de Provence. Il permet d’irriguer les terres agricoles, et pour certaines communes, d’aller chercher de la ressource en eau. Si c’est une autre conséquence des transferts de compétences, cette élue a souligné que « certains départements continuent d’assumer ce financement ». Et d’enfoncer le clou : «On protège les terres agricoles, on veut tous défendre la ruralité, soutenir la viticulture mais aussi une autre agriculture. C’est un contresens de perdre des financements ». Sur l’ensemble de ces problématiques, le préfet a répété sa totale disponibilité : « ma porte est ouverte et celles des sous-préfets aussi ». 1. Michel Gros (La Roquebrussanne) président ; Suzanne Arnaud (Riboux) première vice-présidente ; Hervé Philibert (Ginasservis) deuxième vice-président ; Bernard De Boisgelin (Saint-Martin de Pallières) trésorier ; Blandine Monier (Évenos) secrétaire ; Franck Pero (Bras) trésorier adjoint ,Valérie Marcy (La Motte) secrétaire adjointe ; Nathalie Pérez-Leroux (La Roque-Esclapon) ; Jean-Pierre Véran (Cotignac) ; Hélène Verduyn, (Signes) ; Marjorie Viort (Le Thoronet). 2. Étaient présents les députés Valérie Gomez-Bassac, Sereine Mauborgne, Philippe Michel Kleisbauer, les sénateurs Jean Bacci, Michel Bonnus, le président de l’association des maires du Var Hubert Falco, Philippe Vittel et François de Canson, conseillers régionaux, etc.