Une animalerie de carton rejoint le fonds de la ville
« Le travail du carton m’a donné une vieillesse fabuleuse », avoue l’artiste Bruno PasquierDesvignes qui a importé le concept d’intégration par l’art. Il lègue à la ville son fabuleux bestiaire
Depuis un an, Bruno Pasquier-Desvignes s’est retiré de l’organisation d’IntegrArte, ces sessions de foisonnement artistique à base de carton qui transcendent les classes sociales. Il a transmis le flambeau à Ghassan El Hoyek. À 90 ans, l’artiste installé à Hyères a souhaité remettre à la ville son fabuleux bestiaire en plus des carnets de voyage de sa jeunesse (1). L’occasion de revenir sur sa fabuleuse carrière artistique.
Ses débuts « J’ai cru que ça tombait du ciel ».
À la sortie de son service militaire, Bruno Pasquier-Desvignes a 25 ans quand il part peindre au Mexique et aux USA. « Le responsable d’un grand hôtel m’a commandé 100 oeuvres, une par chambre, d’une taille supérieure à une valise pour qu’elles ne puissent pas être volées, se souvient-il. Ma vie a été transformée, j’ai cru que ça tombait du ciel. » De retour en Europe, il expose à Paris, Bruxelles, Amsterdam, Lyon, « mais ça ne marchait pas, j’y ai perdu ma chemise. Je suis retourné aux USA où je suis devenu majordome pendant six mois. » En 1961, sur un bateau entre NewYork et les Caraïbes, le Frenchy rencontre un gars qui, croyant en son talent, lui fait exposer en Colombie, au Pérou, en Argentine, en Bolivie. La même année, il arrive en Jamaïque, sans argent. Hébergé par une amie, il a l’opportunité de construire sa maison dans un coin de paradis et de jouir d’un appartement à New-York. « En Jamaïque, j’étais le Gauguin local. Pour les touristes, j’étais une attraction à peindre des poissons sur la plage. Ça me nourrissait très bien. »
Une lady anglaise éponge même ses dettes en proférant : « Vous serez le jardinier de mes rêves ». « De 1975 à 1990, on allait tout le temps en Jamaïque avec ma femme Gwen. Puis on n’a plus vraiment eu le temps avec la découverte d’IntergrArte. »
Ses voyages « Ça ne coûtait rien et ça a duré ans».
Bruno a 38 ans quand il s’embarque dans un tour du monde avec Gwen. « Un mécène m’a encouragé à prendre la route après que j’eus vendu beaucoup de tableaux. Ça ne coûtait rien et ça a duré 4 ans, de 1970 à 1974. Sicile, Iran, Algérie, Tunisie, Maroc, Cachemire, Afghanistan, Nouvelle-Zélande...
on continuait, on n’avait pas de raison de s’arrêter. On s’installait sans s’installer, la vie passait sans qu’on s’en rende compte. » Dans un palais en ruine au Népal, il peint de nombreuses scènes de vie, des oeuvres qui ont traversé les ans. Bruno peint, Gwen rédige. De ces grands carnets de voyage illustrés, jamais édités, émane le parfum désuet des années de bonheur.
IntegrArte « J’ai trouvé ça marrant, mais je n’y croyais pas ».
On a donné de drôles de défis à Bruno PasquierDesvignes : remplir la gare de Grand Station à New York, puis le centre culturel Borges de Buenos Aires, de ses sculptures musicales (Carton fabuloso). Il avait découvert le principe d’IntegrArte, l’’intégration sociale par l’art minimaliste, lors d’un séjour au Chili à l’invitation du photographe Roberto Edwards. « J’ai trouvé ça marrant, mais je n’y croyais pas au début. Mes oeuvres étaient plus complexes, je parlais espagnol comme un cochon et j’avais l’habitude de travailler seul. Et puis ça m’a pris... C’était fantastique, on s’amusait tout le temps dans ces favelas où il n’y avait rien. Cette forme d’art est tellement simple, du carton, un cutter, du fil de fer, qu’elle est ouverte à tous. C’est de la psychologie de chevaux de bois, je disais aux gens “Vous allez inventer de nouvelles choses” et ils le faisaient. Ça a toujours