Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Le Paradis de Ben Mazué

Exilé à La Réunion, le Biotois est revenu en métropole après avoir connu de grands bouleverse­ments dans son existence. Des joies, des fêlures et des questionne­ments qui ont nourri Paradis, son quatrième album.

- JIMMY BOURSICOT jboursicot@nicematin.fr

Au même âge, d’autres ont déjà empilé les récompense­s ou se sont brûlé les ailes, à force de traîner trop près des spotlights. Pas le genre de notre homme. Sans faire de bruit, il avance, toujours un peu plus loin. Ben Mazué aura bientôt 40 ans. Sa réussite, il la construit pièce après pièce, comme un artisan brillant qui mettrait toujours autant de coeur et de talent à l’ouvrage. Benjamin Mazuet a eu le temps de se construire. Avant de donner dans la musique, le natif de Nice, qui a grandi entre Biot et Paris, a terminé ses études de médecine.

L’Olympia et un disque d’or

La suite s’est dessinée progressiv­ement. « Je n’ai pas eu de moment fort qui m’a permis de rentrer par la grande porte. J’ai commencé à jouer dans de petites salles, vides. Puis très lentement, elles ont commencé à être plus remplies. Aujourd’hui, je crois que cette persévéran­ce me permet de savourer beaucoup plus ce que je vis. »

Au milieu des années 2000, il se faisait les dents dans les rues de son village biotois, les soirs de Fête de la musique. En 2018, son nom s’étalait en rouge néon sur la façade de L’Olympia. Sorti un an plus tôt, son troisième album devenait disque d’or.

To-do list

Le projet s’intitulait La Femme

idéale. Un « portrait » de son épouse, la mère de ses deux fistons. Après ces deux beaux succès,

la petite famille décide de s’installer à La Réunion. « C’était un rêve. Je ne sais pas si tu fais ça, mais moi, j’ai une sorte de liste, avec des cases à cocher. Devenir joueur de foot pro, par exemple. Bon ça, c’est mal barré », s’amuse Ben Mazué au téléphone.

« Mais La Réunion, c’est exceptionn­el. Tu as la mer, la plage, la route, les rails, la montagne. Un peu comme dans les Alpes-Maritimes ! Je ne savais pas à quoi m’attendre en allant vivre là-bas, à tous les niveaux. »

Plus clair qu’obscur

Au bord de l’océan Indien, Ben Mazué, auteur-compositeu­r-interprète, régulièrem­ent sollicité par des artistes de premier plan (lire ci-dessous), a écrit l’essentiel de Paradis. Un joli conte de voyage concocté par un mari et un papa aux anges ? Oui... et non. Durant cette échappée belle, son histoire d’amour a pris fin. Sur l’album, Divin exil précède

Nulle part . Il y a de la mélancolie, de la tristesse aussi. Jamais d’hostilité ou d’aigreur. Mister Mazué fait partie de ceux qui essaient toujours de voir le bon côté des choses. « Aujourd’hui, c’est presque mal vu. Mais on peut être lucide tout en restant optimiste. Ça vaut le coup d’essayer, dans toutes les situations. »

Marches inspirante­s

Pour donner forme à Paradis ,le Sudiste a eu besoin de grandes bouffées d’oxygène. Il courait, parfois. Il marchait, souvent. « Ce n’est

pas toujours facile de se rassembler, sans être traversé par d’autres pensées. Là, j’avançais et je me retrouvais, sans téléphone portable ou quoi que ce soit pour me distraire. »

En fredonnant, il a commencé à charpenter ses chansons. Les mots, il les avait déjà, pas très

loin. « Les grands virages de ma vie, c’est ma matière première pour écrire. Mais quand je couche des émotions sur papier, je le fais en espérant qu’elles feront écho chez d’autres personnes. »

Bande organisée

Côté musique, on retrouve du piano-voix, des cordes et des cuivres qui réchauffen­t l’âme. Juste ce qu’il faut, sans verser dans le grandiloqu­ent. « On a beaucoup travaillé sur la réalisatio­n chez moi, avec Guillaume Poncelet. On se connaît très bien, ça facilite les choses. Jamais je n’ai eu autant l’impression d’être arrivé si proche du son que je voulais proposer. »

Ben Mazué a su bien s’entourer. Sur Gaffe aux autres, il a invité Jérémy Frerot. Poupie partage le micro avec lui sur Le Coeur nous anime, et Anaide Rozam l’a rejoint pour Semaine A semaine B , ritournell­e des parents séparés.

Demain, quadra serein

Un autre obstacle se présentera bientôt devant le lauréat du Grand Prix Révélation Sacem 2019. Le 24 janvier, il basculera dans une nouvelle décennie. Le

sujet est abordé sur Quarantain­e. « Les amours cabossées / les talents qu’on se prête / Les blessures qui restent et les addictions qu’on arrête. / La carrière, les enfants, les projets qu’on maîtrise/ 40 ans je t’attends, j’ai pas peur de

ta crise », dit la chanson. On vérifie si les paroles sont toujours

d’actualité. « Oui, oui. Je ne me suis pas forcément beaucoup documenté, mais j’ai l’impression que ceux qui connaissen­t la crise de la quarantain­e, ce sont des gens qui se rendent compte que leur jeunesse est passée. Et qu’ils l’ont vécu comme il le fallait, plutôt que comme ils les voulaient. De mon côté, ça va. Je suis plutôt en phase avec celui que j’étais à 20 ans. »

‘‘ On peut être lucide tout en restant optimiste”

‘‘ Je suis plutôt en phase avec celui que j’étais à  ans”

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Paradis. (Columbia) 13 titres.

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