Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Forcené à Toulon : « J’aime bien le bruit de l’arme qui s’enclenche »

- E. M.

« J’étais dans mon coup de folie, j’aime me rappeler de mon armement, j’aime bien entendre le bruit de l’arme qui s’enclenche… » L’homme qui comparait par visioconfé­rence devant le tribunal correction­nel de Toulon se présente comme un ancien militaire à la dérive. Âgé de 38 ans, il se tient les bras comme s’il portait une camisole de force. Il se lève, se rassoie, se relève, approche son visage de la caméra. Il parle si près du micro qu’un grésilleme­nt couvre sa voix dans les haut-parleurs de la salle d’audience. C’est ce trentenair­e qui, la semaine dernière, a suscité l’émoi dans la rue d’Alger, au coeur de Toulon, alors qu’il se trouvait sur le balcon d’une connaissan­ce (nos éditions du 10 novembre). « J’étais tout seul, je pensais être seul, j’étais au deuxième étage, débite-t-il frénétique­ment. Ils m’ont dit de jeter mon arme mais je ne voulais pas la casser. Pourquoi je ne l’ai pas jetée ? De toute façon, ils allaient me la prendre… J’ai réfléchi trop tard .» Deux colonnes de policiers, protégées par des boucliers balistique­s, ont déboulé dans la cage d’escalier de l’immeuble. « Je les ai insultés parce que je croyais que j’allais mourir, je ne voulais tuer personne. » L’arme était factice, réplique fidèle d’un pistolet automatiqu­e. « J’ai toujours un pistolet à billes sur moi pour tirer sur les cannettes .»

Syndrome post-traumatiqu­e

Ce jour-là, le prévenu avait bu quatre bières et avalé un anxiolytiq­ue fourni par un ami. « Il m’a dit que ça me ferait du bien (...) J’ai fait deux fois l’Afghanista­n, j’ai eu un choc post-traumatiqu­e mais je n’ai plus de suivi. C’est la police qui m’a aidé, ils m’ont amené aux urgences », explique-t-il en s’agitant. Son avocat, Me Kévin Travart lui demande de se calmer et plaide « le burn-out dont sont victimes beaucoup de militaires de retour de théâtres de guerre ». Le prévenu, sans domicile fixe depuis 2008, n’a retenu que la partie ferme de la peine requise par le ministère public. « La peine de six mois me va très bien, ça me fera le plus grand bien .» Mais le tribunal présidé par Audrey Estienne décide de ne pas juger le trentenair­e sans l’avis d’un expert psychiatre. « Mais je connais déjà mon état », proteste le prévenu. En attendant, il restera en prison. « Ah, ça me rassure parce que je n’ai pas d’argent. » Il comparaîtr­a à nouveau dans quelques semaines. « J’ai une double fracture du fémur, je ne peux plus travailler de ma vie, comment voulez-vous que je paie des amendes… », marmonne-t-il avant de regagner sa cellule.

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(Photo P. Bl.) Le forcené serait un vétéran de l’armée atteint d’un syndrome posttrauma­tique.

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