Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Braquage à Saint-Tropez : une minute trente en enfer

La cour d’assises du Var est revenue dans le détail sur le déroulemen­t des faits salle Jean-Despas le 2 janvier 2018, lors du braquage du salon des antiquaire­s.

- V. W.

Si, vu de loin, le braquage du salon des antiquaire­s à Saint-Tropez le 2 janvier 2018 possède tous les attributs du film hollywoodi­en (lire nos éditions précédente­s), pour les témoins directs et les victimes, le choc est lui bien réel. Frappé pour l’un d’eux, mis en joue pour certains, dépouillée pour une autre. Dans la salle Jean-Despas, les exposants sont ainsi passés de l’incompréhe­nsion à l’horreur. Puis au soulagemen­t. Le tout en 90 secondes à peine.

« Quand j’ai entendu du bruit, j’ai d’abord pensé à une rixe, a raconté l’un d’eux hier à la barre de la cour d’assises du Var, qui juge depuis lundi Christophe Fredolin, Ivan Pavlek, Mathieu Bochu et Yvan Cabral. Puis j’ai vu une arme longue. Et là, j’ai cru à un acte terroriste… C’est seulement quand un malfaiteur a dit que c’était un braquage que la peur a disparu. D’autant qu’ils semblaient savoir ce qu’ils faisaient.

« J’étais pétrifiée »

Au plus près de l’action, certains ont quand même cru mourir. À l’image de cette brocanteus­e : « J’étais pétrifiée. Je me souviens avoir vu un homme défiguré et m’être dit,’’le pauvre’’ puis j’ai aperçu trois autres personnes avec le même masque.

Ils ont sorti des armes de leur veste. Le plus grand m’a poussé au sol et nous a dit avec un fort accent slave que si on ne bougeait pas, tout se passerait bien. »

À deux mètres d’elle, la propriétai­re du stand Francine Joaillerie est molestée. Quatre de ses huit vitrines sont brisées par un individu pendant qu’elle résiste tant bien que mal aux coups d’un autre. « Il m’a mis la main devant la bouche pour que j’arrête de crier, a-t-elle détaillé. Dans la lutte, je suis parvenue à lui enlever un gant. » Mais les expertises ADN ne donneront rien.

De plus loin, un autre témoin voit un malfaiteur faire le guet à l’entrée, kalachniko­v en main. «Jesuis sûr à 90 % que c’était un AK47, certifie-t-il. Du coup, comme je pense à un attentat, je fais deux ou trois pas en arrière, et là je tombe sur un géant avec un fusil à pompe. Avec un accent slave, il dit que c’est un braquage. Je me suis mis au sol... » Un témoignage qui va dans le sens de la thèse, décrite également par Ivan Pavlek aux enquêteurs, qui voudrait que Cédric Fredolin soit le porteur de cette arme automatiqu­e, et donc l’auteur des tirs à la kalachniko­v en direction des deux gendarmes rue de la Résistance pendant la fuite du commando. Mais la défense peut arguer dans le même temps qu’Ivan Pavlek a affirmé, pendant ses aveux, avoir eu en main un Thompson M1 et non un fusil à pompe…

« J’ai vu le canon, la flamme »

Les gendarmes qui ont essuyé la rafale d’arme automatiqu­e n’ont pas pu apporter plus de détails. Partis à la poursuite du groupe, ils sont vite revenus sur leurs talons. « Quand j’ai procédé aux sommations d’usage, l’un des individus s’est retourné et a riposté, se souvient le maréchal des logis-chef. J’étais focalisé sur le plus costaud du groupe, mais avec l’effet tunnel, je n’ai rien pu discerner de précis. J’ai surtout vu le canon, la flamme. J’ai pensé prendre un impact. » Son coéquipier, juste derrière, a entendu « une grosse détonation » puis « beaucoup de fumée ». « On s’est baissé, puis devant leur force de feu, on a mis un terme à notre poursuite. » Dans la nuit, et malgré quelques témoins, le groupe a pu prendre la fuite. Place des Lices, le calme ne reviendra que le lendemain.

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(Croquis d’audience Rémi Kerfridin) Les témoins et victimes ont témoigné sous le regard attentif des deux gendarmes parties civiles.

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