Laisser entrer l’eau en l’accompagnant, intégrer le risque de submersion
Des aménagements sont déjà à l’oeuvre pour limiter les effets de l’élévation du niveau de la mer. Il y a quelques années, le quai Cronstadt à Toulon a par exemple été rehaussé, tout comme le quai Saturnin à La Seyne : à la moindre dépression, tous deux étaient régulièrement recouverts par les eaux de la Méditerranée. À Menton, des travaux sont en cours pour sécuriser le littoral, mis à rude épreuve ces dernières années, grâce à une digue sous-marine. C’est aussi le scénario d’une digue immergée qui a été retenue pour protéger le double tombolo de la presqu’île de Giens à Hyères. Et probablement aussi celui
qui permettra, un temps, de préserver l’aéroport de Nice.
Des solutions seulement temporaires, souligne Eric Marro, urbaniste au CAUE du Var (Conseil d’architecture, d’urbanisme et d’environnement) : « Les digues auront toujours des limites et rehausser des équipements, ça marche pour des quais, pas pour des villes entières ! Il ne faut pas imaginer que la technique peut tout faire et qu’on peut domestiquer les éléments naturels ».
« Transformer nos villes en Venise ou Amsterdam »
Pour cet expert, la seule véritable solution consiste en « la réimplantation en arrière des équipements qui sont aujourd’hui en première ligne » .Il prend l’exemple de la Maison de la mer, à Cavalaire-sur-Mer, qui ne résisterait pas à la montée des eaux. Mais, dit-il, « il faut s’y mettre dès maintenant », notamment parce que «ça nécessite des investissements fonciers et immobiliers importants ». Dans ce cas, il faut accepter d’abandonner une part des terres à la mer. L’urbaniste plaide ainsi pour une résilience
qui consisterait à « transformer nos villes en Venise ou Amsterdam ». Autrement dit, là où la mer pénètre, plutôt que de lutter vainement, « creusons pour aménager des canaux ». Bien sûr, reconnaît Eric Marro, «ce seraient des travaux importants », mais dans le même temps, certaines villes s’y prêteraient : « La Seyne, par exemple, est en partie construite sur des marécages ! »
Mais pour cet expert, la principale adaptation (et probablement la plus réalisable), c’est l’intégration d’une culture du risque, qui tienne compte de la fragilité des équipements, des constructions face aux éléments. «Il faut construire la ville et ses bâtiments avec des éléments qui assurent la continuité du fonctionnement (télécommunication, électricité, eau potable, chauffage, etc, Ndlr) et la sécurité des personnes à l’intérieur. »
Les matériaux employés doivent eux aussi être adaptés, pour faire face à l’élévation du niveau de la mer, mais aussi au risque de détérioration causé par une trop grande salinité des eaux en sous-sol.