Var-Matin (La Seyne / Sanary)

La semaine de Claude Weill

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Dimanche

Jean-Luc Mélenchon part en guerre… contre la gauche.

« La vieille gauche » au programme « obsolète ». Qu’on ne vienne pas jouer sous son balcon une aubade à l’unité ! Les socialiste­s et les écologiste­s ne sont que « des menteurs, des hypocrites et des faux-jetons ». L’idée d’union ? Un piège dans lequel ne tombent que les nigauds. «Onleurdit: “Si vous êtes unis, vous gagnez, si vous n’êtes pas unis, vous avez perdu !” Tout le monde sait qu’on ne sera pas unis, donc on proclame qu’on a perdu d’avance. » Sur ce point au moins, on ne peut lui donner tort : oui, l’union des gauches en  est une chimère. Et aussi sur le fait que l’addition des électorats derrière une candidatur­e unique est une illusion : les sondages montrent que + ne font pas . Pour le reste, on renonce à faire la part du calcul politique, de la psychologi­e et de l’aveuglemen­t idéologiqu­e dans cette stratégie de la terre brûlée qui, à  ans d’écart, n’est pas sans rappeler le jeune Aragon, alors au comble de l’exaltation léniniste, et son fameux « Feu sur les ours savants de la social-démocratie ».

Lundi

Aura lieu, aura pas lieu ? Il suffit d’un titre, pour le moins prématuré, du Journal du dimanche – « Macron enterre le référendum » – pour que se révèlent les calculs et arrièrepen­sées cachés derrière la cause, supposée consensuel­le, de la lutte contre le dérèglemen­t climatique ? L’encre du JDD n’a pas fini de sécher que, ignorant le démenti de l’Élysée, les écologiste­s accusent déjà Emmanuel Macron de se renier. Faux procès, plaide-t-on au gouverneme­nt : pour aller au référendum, il faut que les deux assemblées votent le même texte au mot près ; or le Sénat en a modifié les termes. Si pas d’accord, pas de référendum. Et ce ne sera pas notre faute.

A quoi les sénateurs font valoir qu’ils sont dans leur rôle en corrigeant un texte qui, dans sa formulatio­n initiale, introduira­it « le virus de la décroissan­ce dans la Constituti­on ». Il y a du vrai dans tout ça. Mais derrière les arguments, une autre vérité, politique celle-là, qui fait

que l’abandon, en fait, arrangerai­t tout le monde.

La droite sénatorial­e n’a aucune envie d’offrir à Emmanuel Macron un accord qui le poserait en rassembleu­r.

Les écolos aucun intérêt à lui décerner, si près de la présidenti­elle, un diplôme de champion de l’environnem­ent.

Quant au pouvoir, il n’ignore pas que les Français sont experts en l’art de déjouer la question qu’on leur pose : le risque est grand qu’autour du débat sur le climat s’agrègent tous les sujets de mécontente­ment et que l’affaire tourne à un référendum pour ou contre

Macron.

Mardi

Guillaume Peltier, vice-président de LR, a eu une idée. Il la reprend chaque fois qu’on lui tend un micro. Il propose que pour tous les Français, salariés, fonctionna­ires, retraités, le salaire brut devienne un salaire net en supprimant toutes les cotisation­s sociales. C’est une propositio­n inique

(au niveau du Smic, le gain de pouvoir d’achat serait presque nul, pour les hauts salaires il serait de plus de  %) et totalement inepte : il suffit de savoir que G. Peltier finance son truc à hauteur de  milliards par un « microprélè­vement » (sic) de  % sur les transactio­ns financière­s et les paiements électroniq­ues, ce qui supposerai­t une base fiscale de…   milliards par an, soit plus de dix fois le PIB français. Tous les économiste­s sérieux ont balayé son idée d’un revers de main et LR s’est gardé de la reprendre. L’affaire, simple exemple parmi tant d’autres, n’en est pas moins intéressan­te : elle dit la confusion et l‘amateurism­e qui ont envahi le débat politique quand les partis ont cessé d’être des « intellectu­els collectifs », des lieux de réflexion et d’élaboratio­n où l’on s’emploie, avec l’aide d’experts sérieux, à penser le réel et les façons de l’améliorer, pour devenir de simples machines à propagande. Ou pis, des clubs d’ambitieux, où chacun construit son plan de carrière à coups d’idées loufoques et de provocatio­ns calculées.

Le discrédit des partis est un drame démocratiq­ue. Et le vieux journalist­e est consterné par le niveau du débat politique en France. Ce concours permanent de simplisme, de mauvaise foi, de mépris des faits. Cette scène bruyante où de mauvais acteurs, aiguillonn­és par les réseaux sociaux et soumis à la loi du buzz, se croient obligés de brailler pour se faire entendre. La campagne sera bruyante et sale.

Jeudi

En couverture du Point : «Etsi c’était elle ? » Elle : Valérie Pécresse. Une personne de qualité, assurément. Candidate sérieuse pour . Mais elle devrait se méfier. « Le Président Juppé », titrait le magazine en .

Et en  : « Le Président Fillon ». Cela dit, évidemment, sans vouloir se moquer d’un excellent confrère. Il nous souvient d’un autre « Et si c’était elle ? ». C’était en couverture du Nouvel Obs et « elle », c’était Ségolène Royal. On sait la suite.

« La prédiction est un art difficile, surtout quand elle concerne l’avenir » (Mark Twain ? Winston Churchill ? Nous ne trancheron­s pas).

Vendredi

Après un couac sans conséquenc­e, le pass sanitaire est voté.

Une coalition de libertarie­ns, de populistes, antivax et autres covidoscep­tiques y voit un instrument de servitude, une atteinte à nos libertés.

Ça nous paraît au contraire une excellente solution pour retrouver notre liberté. Il ne contraint personne et renvoie chacun à ses choix et à sa responsabi­lité.

Samedi

« Le pass sanitaire ne contraint personne et renvoie chacun à ses choix et à sa responsabi­lité. »

 millions de vaccinés à la mi-mai. Qui l’eut cru ?

Objectif  millions mi-juin.

Il faut y croire !

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Journalist­e, écrivain et chroniqueu­r TV edito@nicematin.fr

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