Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Roger Fabien : « Il fallait que j’arrête Cantoni à tout prix, quitte à prendre perpète »

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Originaire de l’Aude, joueur à Quillan, Roger Fabien débarque en 1966 à Toulon pour conjuguer service militaire et rugby. Lors de cette finale, il est celui par qui la violence arrive. La visible. Pas celle, sournoise, qui a séché André Herrero et ruiné les chances toulonnais­es.

Le trois-quarts aile raconte sa version des faits : « Je vois Cantoni démarrer, effacer deux défenseurs avant de me retrouver seul face à lui. Je suis battu et je me dis : personne ne l’a arrêté, eh bien moi, je vais l’arrêter ! J’avais une colère noire depuis l’incident avec André. On cherchait par tous les moyens à se venger. On s’était réunis sur le terrain et on voulait en attraper un pour qu’ils soient eux aussi à quatorze, mais Carrère et Gruarin nous avaient raisonné en disant : “On ne se bat pas en finale”. Avec le recul, ils ont eu raison. Mais bon, sur cette action, il fallait que j’arrête Cantoni à tout prix, quitte à prendre perpète ! Je l’arrête, le centre Sarda me tombe dessus, on se chamaille et quand je me retourne, je vois Séguier marquer... » L’arbitre valide l’essai mais ne revient pas sur l’attentat. Roger Fabien s’en sort sans une réprimande ni un carton. « À l’époque, ce genre de brutalité se sifflait. Les cartons rouges n’existaient pas encore mais généraleme­nt, l’arbitre demandait au joueur de quitter le terrain pour jeu déloyal. Sur cette action, je pense que si Séguier ne marque pas, je me fais rappeler à l’ordre... »

« Je l’ai toujours en travers »

Une action qui aura entaché sa fin de carrière et reste le symbole d’une finale au goût amer. « J’en garde un très mauvais souvenir. C’est une blessure car on a été handicapé au bout de trente minutes de jeu. Pour moi, la blessure d’André est le vrai tournant du match. Il est tordu en deux, il ne sert plus à rien. C’est un miracle qu’il soit encore sur le terrain. Personne ne peut dire si on aurait gagné avec lui, mais il était si important par son rôle de capitaine et ses qualités de guerrier. Et puis quand on voit comment on a résisté à quatorze... On ne perd pas sur notre vraie valeur, mais sur les aléas du sport, on va dire... Cela fait cinquante ans, mais je l’ai toujours en travers. J’ai encore l’impression qu’on nous l’a volée, cette finale. » Heureuseme­nt, Roger Fabien se souvient aussi du meilleur : « Le retour à Toulon, dans une ville en folie. Moi qui venais de Quillan, à Toulon, la ferveur était multipliée par 15 ! ». À 76 ans, il vit toujours dans le Var, au Beausset.

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