En Tunisie, le nouveau président s’attaque à la corruption
Moins d’une semaine après s’être emparé de l’ensemble du pouvoir exécutif et suspendu l’activité du Parlement pour un mois, le président tunisien Kais Saied a lancé une offensive anticorruption, réclamant des comptes à plusieurs centaines d’hommes d’affaires accusés de détournement de fonds sous Ben Ali.
Lors d'une rencontre avec le président du patronat (Utica), M. Saied, qui n’a pas encore nommé de Premier ministre, a fustigé « ceux qui pillent l’argent public » : ils sont 460 à devoir 13,5 milliards de dinars (4 milliards d’euros) à l’État, a-t-il lancé, en citant un ancien rapport d’une commission d’enquête sur la corruption et les malversations sous l’ancien régime du dictateur Zine El Abidine Ben Ali.
Une enquête contre le parti Ennahdha
« Cet argent doit revenir au peuple tunisien », a martelé le président. Pour cela, il compte offrir à ces hommes d’affaires un arrangement judiciaire. En échange de l’abandon des poursuites, les sommes remboursées bénéficieraient aux régions marginalisées de Tunisie.
Il a aussi réclamé une relance de la production de phosphate, l’une des rares ressources naturelles du pays. Ancien fleuron de l’économie tunisienne, la Compagnie des phosphates de Gafsa (CPG) a vu sa production s’effondrer depuis la révolution de 2011, à cause d’un manque d’investissements et de troubles sociaux à répétition. Quelques heures avant cette prise de parole, le parquet, placé sous l’autorité de M. Saied dans le cadre des nouvelles mesures d’urgence, a publiquement annoncé l’ouverture d’une enquête contre plusieurs partis, soupçonnés de financement étranger de leur campagne électorale en 2019. Ouverte le 14 juillet, avant le coup de force du président, elle vise la formation d’inspiration islamiste Ennahdha, qui a participé à toutes les coalitions gouvernementales depuis la révolution de 2011, ainsi que son allié Qalb Tounes et le parti Aïch Tounsi.