« Je ne me sens pas handicapée, je me sens sportive »
Etudiante à l’université de Toulon, Mélanie Rebreget a obtenu un prix pour le court-métrage Ailes de carbone dans lequel elle évoque son parcours et ses espoirs. Rencontre.
Mélanie Rebreget, étudiante à l’université de Toulon et seule sportive française atteinte de paralysie cérébrale à pratiquer l’athlétisme en fauteuil, a été récompensée, le 24 juin, au concours Handicap étudiant Tous HanScène. Son court-métrage Ailes de carbone a reçu le premier prix de la catégorie sport. Entretien.
Pourquoi avoir choisi le titre Ailes de carbone ?
Carbone, parce que ça colle bien avec le fauteuil, vu que les roues sont en carbone. Et aile, parce que c’est synonyme de liberté et c’est ce que je ressens quand je suis sur mon fauteuil de course. Quand je suis dessus, je ne me sens pas handicapée, je me sens sportive. Je galère pour monter dans le fauteuil, mais une fois que je suis installée, j’oublie tout et je roule !
Que représente cette vidéo pour toi ?
Cette vidéo, elle va bien au-delà du concours. Je l’ai compris dès que je l’ai vue, dès qu’elle a été terminée. Moi qui, de base, n’aime pas me voir à l’écran, j’ai versé ma petite larme. Cette vidéo, c’est une partie de mon parcours. Gagner, c’est une fierté quand même.
Comment as-tu commencé à pratiquer ce sport ?
Laurence Lefranc, qui est ma deuxième maman, m’a fait découvrir ce sport. Je n’ai pas tout de suite commencé sur ce fauteuil. J’ai commencé sur un fauteuil à quatre roues. Au début, c’était juste pour le plaisir, ensuite j’ai commencé à faire de toutes petites compétitions. On a vu que je pouvais faire des résultats et ensuite j’ai été repérée par la fédération française handisport. Quand j’ai commencé à y prendre goût, Laurence m’a tout de suite avertie en me disant : « Fais attention, ton corps va t’imposer certaines limites. » Je pense que je n’ai toujours pas atteint mes limites !
Qu’est-ce que tu aimerais faire pour la suite ?
Mon rêve, c’est de faire les Jeux Paralympiques. Je pense que j’ai mes chances en car les Jeux sont à Paris, donc la France a l’obligation de représenter un maximum de catégories de handicap. En plus, je suis la seule dans ma catégorie parce que j’ai une paralysie cérébrale et que ce sport n’est pas vraiment adapté à cette pathologie. Il est plutôt fait pour les
Mélanie a commencé à pratiquer sur un fauteuil à quatre roues. « Au début, c’était juste pour le plaisir, ensuite j’ai commencé à faire de toutes petites compétitions », explique-t-elle.
tétraplégiques ou les personnes amputées. La fédération ne croit pas en moi parce que je ne suis pas médaillable. Enfin, je peux l’être, mais dans plusieurs années. Ils m’ont dit concrètement que je n’ai pas le bon handicap pour faire ce sport et que je me ridiculise. J’ai donc décidé de contourner le système et de créer mon équipe moi-même. J’ai écrit une lettre que j’ai partagée un peu partout, et j’ai pu trouver un préparateur physique. Mais il me manque un entraîneur d’athlétisme. Il n’y a pas grand monde qui s’y connaisse dans la région. C’est pour ça que j’ai décidé de partir. Je finis ma licence de STAPS et, dès l’été , je déménage à Toulouse. Làbas, il y a une coach qui est prête à m’entraîner
Faute de trouver un entraîneur ici, Mélanie va partir l’été prochain à Toulouse où une coach est prête à l’entraîner en vue des Jeux.
pour les Jeux Paralympiques.
Comment contribuer à faire changer le regard sur le handicap, selon toi?
Pour changer le regard, il faut commencer par de la sensibilisation. Hier, j’ai fait ma première sensibilisation à l’Ecole de la Deuxième Chance. Apparemment, mes mots et ma vidéo ont résonné en eux. C’était vraiment une expérience incroyable.
Le maître-mot de ma vie, c’est la transmission. Je pense que si on fait les choses pour soi, c’est bien. Si on les fait pour soi et pour les autres,
c’est encore mieux. Quand j’étais petite, je vivais des choses pas faciles parce que je n’acceptais pas le handicap et que je n’avais pas de modèle de référence. Je me sentais complètement perdue. C’est seulement lorsque j’ai rencontré Laurence que j’ai compris qu’en fait, j’étais normale. Ces jeunes-là, qui sont handicapés et qui se sentent un peu seuls, je suis sûre qu’il y en a plein. Je veux leur montrer qu’ils ne sont pas seuls, qu’ils vont adopter ce monstre et apprendre à vivre avec.