Le coût d’une invasion russe »
l’organisation de la DRM en approchant le recueil du renseignement de l’analyse, une meilleure gestion de l’accroissement exponentiel du volume de données et l’adaptation de la ressource humaine.
On parle beaucoup du cyber-espace. Est-ce un domaine auquel vous portez une attention particulière ?
Le monde cyber est très important, mais il faut l’envisager dans une problématique plus large. En effet, la DRM recherche du renseignement dans tous les milieux (terre, air, mer, espace, cyber, fonds marins). Nos principaux compétiteurs interagissent dans tous ces milieux. Pour bien les comprendre, il faut donc renseigner dans ces cinq milieux.
De quels moyens dispose la DRM ?
La DRM, c’est principalement des capteurs et des analystes. Pour les capteurs, nous disposons de satellites qui nous apportent des images, de centres d’écoute ou encore de bateaux, des avions ou de spécialistes du renseignement humain soit en propre, soit au sein des trois armées. Sur le plan humain, la DRM c’est 2 000 experts, militaires et civils. A cela il faut ajouter les spécialistes du renseignement des trois armées, du cyber et des forces spéciales. Au total, je coordonne l’action des 8 000 femmes et hommes de la Fonction interarmées du renseignement (FIR) avec celle de la DRM. C’est notre « équipe de France » du renseignement militaire.
La DRM est une unité interarmées. Quelle est l’importance de la Marine nationale dans le renseignement ?
La Marine est une composante indispensable à la bonne compréhension des menaces auxquelles nous devons ou devrons faire face. Elle possède des capacités particulières que les autres armées n’ont pas, comme ses sous-marins et des expertises de milieux uniques. Je ne pourrais pas remplir ma mission de directeur du renseignement militaire sans ces spécialistes du renseignement issus de la Marine.
En tant que directeur, quels sont les défis de la DRM à l’heure où les conflits se multiplient ?
J’ai coutume de dire que le renseignement est un domaine infini – regardez le nombre de crises dans le monde – qui dispose de moyens finis, c’est-à-dire limités. En conséquence, mon principal défi, au quotidien, consiste à prioriser nos actions en fonction des intérêts de la France et des armées françaises, pour aujourd’hui et demain. En clair, dans le cas d’un conflit de première importance, je vais y consacrer plus de moyens, plus de capteurs, d’analystes et de ressources humaines. Pour autant, est-ce que je dois abandonner tel ou tel autre conflit ? Si oui, dans quelle proportion ? Tout cela se règle au cas par cas. Par exemple, en Afrique : maintenant que l’opération Barkhane est terminée, doit-on abandonner le renseignement sur les groupes terroristes qui menacent nos intérêts voire la stabilité d’Etats qui nous demandent de l’aide ? Evidemment, non ! Qui dit prioriser, dit renoncer. C’est une véritable responsabilité car ces choix peuvent être lourds de conséquences pour l’avenir.
Surveillez-vous les tensions entre la Grèce et la Turquie ?
Oui, c’est une situation que la DRM ne peut pas ignorer. Mais la guerre en Ukraine et le comportement des Russes passent en priorité.
Vous martelez le mot « priorité ». Quels sont vos critères pour dire qu’un conflit est plus important qu’un autre ?
Là encore, je tranche en fonction de l’intérêt de la Nation. Je n’oublie pas que, de cet arbitrage, découlera la possibilité, ou pas, d’une action de la France.
Une action militaire vise à protéger nos intérêts : nos ressortissants, notre économie, notre souveraineté...
Comment expliquez-vous la multiplication des conflits dans le monde ?
Les dispositifs mis en place après 1945 ont permis de limiter durablement les tensions à travers la planète. Il y a peu, le retour d’un engagement majeur était peu envisageable. Mais aujourd’hui, nous observons une évolution profonde du contexte stratégique, avec une forme de désinhibition du recours à la violence. Le cadre de régulation internationale est désormais remis en question.
‘‘ Le comportement des Russes est surveillé en priorité ”
Quels sont les risques auxquels la France doit faire face ?
On peut mentionner ces grands compétiteurs ou acteurs régionaux qui font usage de la force de manière moins mesurée qu’auparavant. Il y a aussi la menace terroriste qui reste une réalité, même si l’on en parle moins. Il existe une troisième forme de menace, c’est la faiblesse d’un certain nombre d’États qui risquent de s’écrouler ou de devenir des États faillis. Cela pourrait avoir des effets sur la stabilité régionale.
Quelles pourraient être les conséquences de la guerre en Ukraine à moyen terme ?
Elles seront nombreuses. Cela pourrait notamment fragiliser une certaine forme de cohésion européenne.
Des jeunes s’interessent au monde du renseignement, pourriez-vous nous dire pourquoi ils devraient rejoindre la DRM ?
Intégrer la Direction du renseignement militaire, c’est vivre une aventure unique. Un métier en prise directe avec l’actualité, un métier de passion où il faut faire preuve d’imagination et de créativité. Un métier de chasseur qui combine l’adrénaline de cette actualité avec de la technique en constante amélioration. Rejoignez-nous !