Voie ouverte à la réforme de l’assurance-chômage
Le projet de loi permettant une variation des règles d’indemnisation selon la conjoncture économique a été adopté hier. Les modalités restent à préciser.
Le Parlement a adopté définitivement hier le projet de loi ouvrant la voie à une modulation de l’assurance-chômage selon la conjoncture, une perspective qui hérisse la gauche, l’extrême droite et les syndicats.
Les sénateurs ont entériné par 242 voix contre 91 un compromis trouvé avec les députés sur ce texte. Le gouvernement n’a pas eu à recourir devant l’Assemblée nationale à l’arme constitutionnelle du 49.3, grâce à un accord trouvé avec la droite.
L’exécutif martèle qu’il y a urgence face aux difficultés de recrutement des entreprises, et fait de cette réforme une première pierre de sa stratégie pour atteindre le plein-emploi en 2027, soit un taux de chômage d’environ 5 % contre 7,4 % actuellement.
Qu’est-ce qui va changer ?
Ce texte porté par le ministre du Travail, Olivier Dussopt, prévoit dans un premier temps de prolonger les règles actuelles, issues d’une réforme contestée du premier quinquennat Macron. Un décret a été pris en ce sens par anticipation fin octobre. Il enclenche aussi la possibilité, par décret, de moduler certaines règles afin que le régime d’indemnisation soit « plus strict quand trop d’emplois sont non pourvus, plus généreux quand le chômage est élevé », selon la promesse de campagne d’Emmanuel Macron.
Une concertation est en cours avec les partenaires sociaux, et le gouvernement fera connaître lundi prochain « les arbitrages retenus », pour une application de la modulation début 2023. Cette modulation porterait sur la durée maximum d’indemnisation (actuellement de 24 à 36 mois selon l’âge), a indiqué mardi M. Dussopt aux députés. Qui a précisé : « Nous ne prévoyons pas de modifier les conditions d’affiliation au système d’assurance-chômage ». Il faut six mois de travail sur une période de référence de 24 mois pour être éligible.
Le texte a été durci
Députés et sénateurs sont parvenus à un compromis sur ce texte de loi en commission mixte la semaine dernière, mais au prix d’un durcissement imposé par les sénateurs LR, auquel le ministre était initialement opposé. Il a ainsi été ajouté que le refus à deux reprises en un an d’un CDI après un CDD ou un contrat d’intérim sur le même poste, le même lieu et avec la même rémunération, entraînera la perte de l’indemnisation.
Une autre disposition, ajoutée par des amendements de la majorité présidentielle et des députés LR, fait encore débat : l’abandon de poste sera désormais assimilé à une démission, pour limiter l’accès à l’assurance chômage.
Gauche et syndicats vent debout
À l’unisson des syndicats, la gauche critique, elle, « une réforme de droite » dont l’objectif serait de « baisser les indemnités des chômeurs ». Ils sont vus comme « des suspects en puissance, des profiteurs », a encore critiqué hier la sénatrice socialiste Monique Lubin. Avant le vote définitif mardi à l’Assemblée (210 voix contre 140), les Insoumis avaient défendu en vain une dernière motion de rejet de ce texte portant, selon eux, « une vision jetable des salariés ». Les socialistes ont annoncé une saisine du Conseil constitutionnel.
Les députés RN ont également voté contre le projet de loi, par lequel « punition et culpabilisation sont à l’ordre du jour », d’après eux.