« Attaquées par les technocrates, nos communes sont plus que jamais pertinentes et modernes »
DAVID LISNARD
Depuis une quinzaine d’années, nous assistons à un processus de recentralisation opéré par l’État qui n’a de cesse de placer les collectivités locales, particulièrement les communes, sous tutelle financière, tout en les encombrant davantage de normes et contraintes bureaucratiques.
Ce mouvement de fond provient d’une idée erronée consistant à croire que les communes seraient trop nombreuses et que leur taille ne leur permettrait pas d’être un échelon pertinent pour répondre aux enjeux du XXIe siècle. C’est par exemple sur la base de ces croyances enseignées dans nos grandes écoles d’administration, creuset d’un conformisme technocratique éloigné des réalités de terrain, que le président de la République avait envisagé la fusion du département des Alpes-Maritimes avec la métropole de Nice.
Or, la taille n’est gage ni d’efficacité ni d’efficience ni d’équité. Si l’intercommunalité peut permettre de mutualiser efficacement certaines prestations, très souvent les grands ensembles politico-administratifs conduisent à une supracommunalité qui dissout de fait le pouvoir communal et supprime ce qui fonctionnait bien. Alors que le travail de proximité n’a jamais été autant nécessaire, nos communes sont de plus en plus entravées, dévitalisées, voire menacées. Ainsi, beaucoup des « contrats » ou appels à projet portés par l’État visent les intercommunalités et délaissent les communes. Parallèlement, des moyens financiers substantiels ont été retirés aux mairies, le transfert de la taxe professionnelle aux communautés d’agglomérations, puis la diminution de la dotation globale de fonctionnement – qui n’est pas une aide de l’État mais un dû –, enfin la nationalisation de la taxe d’habitation.
Et le gouvernement remet au goût du jour le funeste dispositif dit de Cahors, qui encadre les dépenses des communes, alors même que ces dernières sont soumises à la règle d’or qui les oblige à présenter des comptes à l’équilibre, ce que l’État n’a plus fait depuis 1974 ! Hélas, les lourdeurs bureaucratiques et la perte d’autonomie imposées aux communes ne se font pas qu’à l’échelle de l’État. Les législations récentes ont par exemple imposé des schémas régionaux qui dictent la gestion des déchets ou fixent les conditions de répartition des subventions. Pourtant, nos vieilles et belles communes n’ont jamais été aussi modernes et utiles aux habitants comme au pays. Elles sont pragmatiques, avec des élus et des agents de proximité, connus des administrés, responsables, évaluables et sanctionnables.
Villes et villages, derniers creusets de cohésion républicaine, sont les lieux de l’innovation et de la transmission, du patrimoine et de la création. Crèches, écoles, routes, politiques culturelles et sportives, cimetières, loisirs, urbanisme, actions sociales… l’action municipale accompagne la vie de chacun et entretient notre cadre de vie. C’est pourquoi, à la veille de l’ouverture du Congrès de l’Association des
Maires de France (AMF), l’enjeu est de défendre l’échelon communal et les libertés locales, pour apporter des réponses concrètes aux besoins des Français en services de proximité et de qualité, rendre l’action publique performante, refuser l’uniformité tout en renforçant le sentiment d’appartenance à la nation. C’est tout le sens du travail de l’AMF, qui propose une nouvelle décentralisation permettant la subsidiarité, donc la responsabilité, gage d’efficacité et de renouveau civique. Elle réunit les 35 497 communes de France et les intercommunalités dans ce sens et, depuis 1907, promeut ce « pouvoir d’agir » des maires. Parce que, comme l’écrivait Tocqueville,
« c’est dans la commune que réside la force des peuples libres ».
Les lieux de l’innovation et de la transmission, du patrimoine et de la création”