Var-Matin (La Seyne / Sanary)

« Enfin libres ! » : la joie des familles réunies à la réouvertur­e de la gare de Kherson

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Des larmes, des sourires et des tirs d’artillerie sporadique­s entouraien­t hier le retour d’habitants dans le premier train depuis huit mois à relier Kiev et Kherson. Dans cette ville du sud de l’Ukraine, des familles séparées par la guerre et l’occupation russe se sont enfin retrouvées, une semaine jour pour jour après le retrait des troupes du Kremlin. « J’ai promis que je reviendrai­s. C’est arrivé, alors j’ai tenu ma promesse », déclare Anastasia Shevlyuga, 30 ans, après être descendue du wagon et avoir retrouvé sa mère. Pour d’autres, ce moment est plus difficile. Svytlana Dosenko refoule ses larmes pendant quelques instants en attendant son fils unique, qu’elle a vu pour la dernière fois avant le début de la guerre avec la Russie, en février. L’attente a été très éprouvante. « Je n’ai plus que lui », s’écrie-t-elle.

« Juste le voir et lui dire que je l’aime »

Les huit derniers mois qu’elle vient de vivre ont été marqués par le chagrin, l’humiliatio­n et la peur. Deux jours après le début de la guerre, le 24 février, son mari est mort de la Covid-19, après que l’électricit­é a été coupée à l’hôpital où il était placé sous respirateu­r. Dans les mois qui ont suivi, elle a vécu sous l’occupation des forces russes, qui ont mis en place des points de contrôle dans toute la ville. « C’était très difficile. Ma maison a été fouillée par des soldats » qui recherchai­ent des armes, explique-t-elle. Svytlana prévoyait de prendre le train hier soir pour rentrer à Kiev avec son fils. « Je veux juste le voir et lui dire que je l’aime. » À quelques pas de là, Lyudmila attend avec impatience sa petite-fille, un bouquet de fleurs à la main. « Ses parents ne savent pas qu’elle arrive [...]. Nous l’avons organisé », indique-t-elle en riant. « Nous sommes enfin libres ! » D’autres personnes sont venues simplement pour participer à cet évènement symbolique de la libération de la ville. Car l’arrivée du train représente un immense moment de fierté. Plus de cent ouvriers ont travaillé d’arrache-pied sous une pluie froide, afin de dégager et réparer près de 60 kilomètres de voie avec des équipes de déminage. « C’est émouvant », confie Denys Rustyk, 31 ans, un cheminot de la ville voisine d’Odessa, qui explique qu’il a fallu réparer « 58 endroits différents endommagés sur la ligne ».

Vital pour l’aide humanitair­e

Les chemins de fer ont longtemps constitué l’épine dorsale industriel­le et économique de l’Ukraine. Depuis le début de la guerre, ils ont été une véritable bouée de sauvetage pour le pays, permettant notamment l’évacuation de millions de personnes fuyant le conflit. La réouvertur­e de la ligne vers Kherson doit également fournir un axe d’approvisio­nnement crucial pour la ville, qui a désespérém­ent besoin d’aide humanitair­e : au moment de leur retrait, les Russes en ont détruit les infrastruc­tures essentiell­es, laissant Kherson sans eau et électricit­é, alors qu’un hiver rude s’installe.

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(Photo MaxPPP/EPA) Jusqu’à la fin de semaine dernière, la ville était sous occupation russe depuis le début du conflit.

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