Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Pour les soignants

- AXELLE TRUQUET atruquet@nicematin.fr

Les thérapeuti­ques non médicament­euses ont une place à part entière en santé mentale. Le Dr Faredj Cherikh, chef du service d’addictolog­ie du CHU de Nice, a mené des travaux montrant l’intérêt de la pleine conscience dans la gestion du stress, chez les soignants en particulie­r. « Cette discipline permet à la personne de se mettre dans une bulle, de se couper du monde extérieur et de revenir à soi. »

Le psychiatre niçois a aussi noté les atouts que cette propositio­n thérapeuti­que représente pour les patients traités en addictolog­ie, surtout en hospitalis­ation. « Il s’agit d’un service fermé avec des règles à respecter : pas de télévision, une heure de téléphone, et pas plus de 4 cigarettes par jour. Ce n’est pas facile pour les malades parce qu’ils sont dans un environnem­ent qu’ils ne connaissen­t pas. Mais ce côté « retraite » est bénéfice pour le sevrage. L’objectif est de les aider à retrouver un rythme et une bonne hygiène de vie, raconte le Dr Cherikh. Mais surtout, l’objectif est de leur apprendre à gérer l’ennui. Ce n’est absolument pas anecdotiqu­e parce que les périodes de vide et d’ennui correspond­ent aux périodes de consommati­on de produits. En leur donnant des clés pour savoir faire face à ces moments, on leur offre des alternativ­es à la prise des substances addictives. La pleine conscience est en cela un outil précieux. Elle va leur apprendre à réagir différemme­nt et à laisser passer la crise en se concentran­t sur l’instant présent sans jugement. Cette discipline va permettre de renouer avec ses sensations et de se détacher de certaines émotions négatives. »

Finalement, cette pratique a pour but d’aider les personnes en proie à des addictions à prendre du recul et à mieux appréhende­r les phases d’envies. Quand le besoin de consommer le produit se fait sentir, le patient peut prendre l’habitude d’accueillir ces sensations avec moins de crainte ; c’est une manière de détourner son attention et de la focaliser sur autre chose. Progressiv­ement, la personne va être capable de sentir arriver les crises et donc de mieux s’y préparer pour mieux y répondre. Elle va ainsi sortir de ses automatism­es et résister aux compulsion­s. Plusieurs discipline­s

La méditation pleine conscience permet d’aider le malade à faire face aux envies de consommer. dans la même veine sont également plébiscité­es par les profession­nels de santé mentale : yoga, sophrologi­e, hypnose, etc. « Ces techniques ont en commun d’aider la personne à se déconnecte­r et à se recentrer. Bien sûr, cela demande d’être accompagné et d’y aller progressiv­ement. C’est également utile à ceux qui ont un profil hyperactif et hyperconne­cté et qui, bien souvent, ont des problèmes de sommeil. La difficulté étant principale­ment de trouver des profession­nels, regrette le Dr

Le Dr Cherikh a réalisé une étude sur l’impact de la pleine conscience chez les soignants du CHU de Nice pendant le confinemen­t.

souligne le psychiatre. Attention toutefois, il faut noter que les personnes qui ont répondu

Cherikh. Des psys : psychiatre­s, psychologu­es, proposent parfois l’utilisatio­n de la pleine conscience, mais ils sont malheureus­ement assez peu nombreux ».

au questionna­ire (de manière anonyme) ne souffraien­t a priori pas d’addictions. Cela montre cependant bien que cette pratique, en favorisant un meilleur contrôle de ses émotions, permet de mieux gérer les situations de stress. C’est le même mécanisme chez les addicts : en parvenant à maîtriser leurs émotions, ils seraient moins sujets à ce que l’on appelle le craving, c’est-à-dire le fait de ressentir un besoin urgent de consommer un produit. Cette envie pressante et irrésistib­le devient alors plus facile à dompter.

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(Photo Pexels)

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