Qatar, top départ !
Il y a douze ans le petit émirat obtenait à la surprise générale l’organisation du Mondial. Le coup d’envoi est donné aujourd’hui et les enjeux seront autant sportifs que politiques.
✓ Déjà dans l’histoire
Quel que soit le spectacle qu’offriront les géants du jeu, ce Mondial2022 restera dans les annales. C’est le premier dans le monde arabe ; le premier aussi à interrompre une saison de football professionnel, programmé à la fin de l’automne pour éviter les chaleurs insupportables de ce pays désertique minuscule, grand comme Chypre ou la région parisienne. Surtout, jamais un pays organisateur n’avait affronté un tel flot ininterrompu de critiques : il y eut d’abord les accusations de corruption pour emporter sur le fil la décision de la Fifa en 2010 face au géant américain. Puis vinrent les critiques sur l’impact environnemental d’un événement qui, selon diverses estimations, aurait coûté plus de 200 milliards d’euros, et nécessité des infrastructures pharaoniques, avec la construction de sept stades climatisés et la rénovation du huitième. Le Qatar cherchera à éteindre ces incendies.
✓ Des protestations
Que feront les capitaines des huit sélections qui ont annoncé leur intention de porter un brassard multicolore lors de leurs rencontres pour soutenir la diversité et envoyer un message au Qatar, pays où homosexualité et relations sexuelles hors mariage sont des délits. Le Niçois Hugo Lloris a finalement renoncé à cette initiative qui déplaisait à Gianni Infantino, lequel a sèchement demandé aux 32 sélections de «se concentrer sur le football ». Hier, le président de la Fifa en a remis une couche (lire page suivante) mais il n’est pas certain que sa conférence de presse inaugurale ait calmé les velléités de protestations. Le président de la Fédération allemande (DFB) Bernd Neuendorf a notamment annoncé être « prêt à payer les amendes » qui pourraient être infligées par la Fifa à son pays. « Dire qu’on ne devrait pas se concentrer sur les droits humains à l’occasion du Mondial, cela m’a vraiment irrité » ,at-il lancé, alors que le capitaine de la Mannschaft Manuel Neuer fait partie des capitaines qui ont promis de porter le brassard arc-en-ciel. Le sort réservé aux travailleurs migrants, qui font fonctionner ce pays de moins de trois millions d’habitants, dont près de 90 % d’étrangers, a également été pointé du doigt. Et le sujet ne manquera pas de revenir sur la table au cours du tournoi. Le Qatar, qui décèle du « racisme » derrière ces attaques, insiste sur les progrès apportés à sa législation sociale en un temps record, et dément que des milliers d’ouvriers aient trouvé la mort sur ses chantiers.
✓ Quel accueil pour le public ?
Les autorités qataries ont à plusieurs reprises promis que tous les fans seraient accueillis « sans discrimination », tout en appelant le million de visiteurs attendus à respecter culture et sensibilités locales. Mais la volte-face des autorités qataries, qui ont subitement interdit vendredi la vente d’alcool près des stades, pose déjà question.
✓ Une compétition ouverte
Tous les acteurs seront là, prêts à animer un des plus grands événements planétaires qui réunira plus d’un milliard de téléspectateurs pour la finale le 18 décembre, dans le superbe stade de Lusail, coquille dorée posée aux portes du désert.
La compétition s’annonce très ouverte. Les Français, diminués par les blessures mais dont l’effectif reste impressionnant, rêvent d’un deuxième sacre mondial de rang. Les Argentins veulent voir Lionel Messi, 35 ans, rejoindre Diego Maradona dans la légende albiceleste avec un premier titre. Les Anglais, bredouilles depuis 1966, les Espagnols ou les Allemands rajeunis sont d’autres candidats à la victoire finale, comme les Pays-Bas de l’expérimenté Louis van Gaal. Sans doute plus qu’une Belgique en déclin ou le Portugal perturbé par le divorce retentissant de Cristiano Ronaldo avec Manchester United.