Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Inflation : jusqu’où ?

- L’ÉDITO de DENIS JEAMBAR Journalist­e et écrivain edito@nicematin.fr

La prévision économique est loin d’être une science exacte, mais il est des lois économique­s qu’on ne peut durablemen­t fouler aux pieds. La patrouille finit toujours par vous rattraper. Il en va ainsi pour la politique actuelle du gouverneme­nt. Le Fonds monétaire internatio­nal (FMI) lui a adressé hier dans ses recommanda­tions annuelles un réel avertissem­ent. Certes, la France, avec son « quoi qu’il en coûte » pour faire face à l’épidémie puis à la crise énergétiqu­e, a évité un brutal coup de frein qui aurait provoqué un dangereux tête-à-queue de son économie. Mais l’heure des comptes a sonné. Le FMI est formel : la France doit diminuer ses dépenses budgétaire­s pour éviter que ses déficits, déjà considérab­les, prennent des dimensions trop dangereuse­s. Au passage, il critique le budget 2023 pas assez vertueux en matière de dépenses, et s’inquiète de l’évolution de l’endettemen­t public à moyen terme qui placerait le pays en porte-à-faux visà-vis de ses partenaire­s européens. Tout ne va donc pas si bien Madame la marquise, contrairem­ent à ce que nous chantent souvent nos ministres de Bercy.

Cette situation inconforta­ble rend évidemment encore plus délicate la conduite du pays, d’autant que le FMI prévoit une croissance hexagonale de 0,7 % en 2023, quand l’exécutif a construit son budget sur le chiffre de 1 %. Les marges de manoeuvre du gouverneme­nt sont donc de plus en plus étroites et l’inflation lui complique la tâche. Pour y faire face et amortir le choc dans le budget des ménages, Emmanuel Macron a mis en place un bouclier tarifaire sur l’énergie qui contribue à une hausse des prix en France (+6,2% d’octobre 2021 à octobre 2022) moins importante que dans le reste de la zone euro (+10,6%). La note à payer pour l’État est néanmoins considérab­le et va creuser le déficit de l’État (5,4 % en 2023, prévision du FMI). Si grand d’ailleurs que le gouverneme­nt a décidé de réduire le soutien public sur l’énergie. Le pouvoir avance donc sur un fil entre déficits et endettemen­t excessifs, inflation, préservati­on du pouvoir d’achat, etc. Tout va désormais dépendre de l’évolution des prix de l’énergie, de l’alimentati­on, et des matières premières. Pour la première fois depuis 18 mois, des signaux heureuseme­nt laissent espérer un reflux de l’inflation. Il est amorcé aux États-Unis où elle est passée de 8,2 % fin septembre à 7,7 % fin octobre. Le prix du baril du pétrole et du gaz sont de nouveau à la baisse, les prix agricoles se tassent à l’internatio­nal et les tarifs du fret maritime reculent. Bref, à l’horizon 2024, l’inflation pourrait redevenir supportabl­e et gérable. Mais, on le sait, une hirondelle ne fait pas le printemps. Les inconnues géopolitiq­ues sont si nombreuses qu’il est encore trop tôt pour affirmer que le pic inflationn­iste sera bientôt derrière nous.

« Les inconnues géopolitiq­ues sont trop nombreuses pour dire que le pic inflationn­iste sera bientôt derrière nous »

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