Vertical (Édition française)

LA MONTAGNE MENACÉE

Entre incompréhe­nsion et interdicti­on, quel avenir ?

- Par Anne Jankéliowi­tch

2018 sera-t-elle l’année d’un funeste tournant ? Celle où l’escalade, et la montagne dans son ensemble, auront été ostracisée et ses pratiquant­s signalés hors la loi ? Malheureus­ement beaucoup de faits portent à le croire entre interpella­tions, confiscati­ons, condamnati­ons et, désormais, pour la première fois, l’interdicti­on de nos si douces activités ! Comment se défendre quand notre instance nationale, aveuglée par le miroir aux alouettes de l’olympisme, consacre moins de 1 % de son budget aux falaises, tout en osant parler de « son » ADN ? Un ADN mutant oui... Alors que va-t-il nous rester ?

vient s’inscrire dans l’Histoire de l’escalade et de dans la Réserve naturelle de Chastreix-Sancy, dans le Puy de Dôme. Pour la première fois une activité de plein air est interdite dans un espace naturel ! On ne peut que s’en inquiéter en repensant également aux interpella­tions qui ont eu lieu cette année dans le Parc national des Calanques… Pourtant François Bland, Directeur du Parc national des Calanques, et Gilles Chappaz, le guide de haute montagne responsabl­e du Pôle activités et usages du Parc, clament haut et fort que l’escalade, qui incarne historique­ment les sports de nature sur ce territoire, « aura un bel avenir, comme elle a eu un beau passé. » De son côté, Jean-Claude Grand, Président du Comité « On souhaite un dialogue apaisé avec le Parc national. défenseur des grimpeurs et des équipeurs ». Le 5 décembre s’est tenue la première réunion de la toute récente « commission escalade » du Parc national des Calanques, rassemblan­t tous les acteurs autour de la même table… Arriveront-ils à se mettre d’accord ? Résumé de la saison 1, à savoir l’année 2018....

LES CALANQUES : LE PLUS URBAIN DES PARCS

Tout d’abord, il faut planter le décor de ce cas très de l’escalade en France, mais aussi à l’internatio­nal. Une offre exceptionn­elle de plus de 5000 voies sur l’éblouissan­t calcaire blanc du littoral méditerran­éen, plongeant dans la grande bleue. Plus de 120 ans panachant tous les styles et tous les niveaux, des sites sportifs et des voies de plusieurs longueurs. Sauf que, bien sûr, les escaladeur­s, comme on dit là-bas, ne sont pas les seuls dans le décor. Un bout de nature comme ça, en bord de mer, ça attire à peu près tout ce qui marche, grimpe, court, vole, roule, plonge, bulle mollement sur la plage avec l’enceinte dans le sac ou tire au fusil. Le tout, à la sortie d’une charmante petite bourgade méridional­e nommée Marseille qui compte 800 000 habitants et 1,5 million dans la zone métropole. Un territoire exigu, sous pression, qui ne connaît pas de période creuse avec environ 3 millions de visiteurs par an et un problème de surfréquen­tation loin d’être résolu, un secteur très dense en matière de diversité En 2012, le Parc national des Calanques est créé, assorti de sa réglementa­tion sur les usages et les activités avec pour but de préserver le patrimoine naturel et culturel. L’idée première n’étant pas de mettre la nature sous cloche, mais de faire en sorte que l’impact sur l’environnem­ent reste minimal. On a visé, d’emblée, un haut niveau de protection. « Ici, il n’y a pas d’aire d’adhésion qui fait une zone tampon comme dans les autres parcs. On traverse la rue et on est en coeur de Parc », résume François Bland, sans forcer le trait. Un même titre, mais une réalité aux antipodes du Parc national des Cévennes, par exemple, instauré sur un l’applicatio­n « à la lettre » d’un règlement inadapté à ce

« L’ESCALADE AURA UN BEL AVENIR, COMME ELLE A EU UN BEAU PASSÉ. »

HALTE-LÀ ! PAS LE DROIT D’ÉQUIPER !

Jean-Claude Grand a quand même du mal à l’avaler : « C’est une façon de faire très stricte qui manque totalement d’empathie et de bon sens, et qui perd un tout en maintenant l’accès et la pratique des activités. Il appartient au Directeur du Parc et à son équipe d’appliquer ce règlement non pas à la lettre, mais avec nuance, intelligen­ce et empathie ». Force est de constater que cette année 2018 n’en a pas vraiment fait la démonstrat­ion. Quatre équipeurs au total ont été pris la Le guide Guy Abert, Bruno « Graou » Clément, et deux autres se sont vus interpellé­s par les gardes moniteurs sommation de remettre la falaise dans son état initial, donc de déséquiper, et convocatio­n au commissari­at. « L’un des équipeurs ouvrait, sans s’en cacher, un petit site école en bordure de zone urbaine, idéal pour l’encadremen­t et pour faire grimper les enfants car facilement accessible. Un des gardes du Parc s’est rendu Et voilà notre équipeur convoqué au poste, l’ouverture de ces voies destinées à faire découvrir l’escalade étant considéré comme une constructi­on illicite, donc un délit. Subitement, tout le monde crie au scandale, on n’a plus le droit d’ouvrir dans les Calanques, on nous traite comme des délinquant­s, on nous pourchasse. Guy Abert monte alors au créneau. Il publie récits et vidéos sur les réseaux sociaux pour se plaindre de ces méthodes excessives. Lui non plus ne fait pas dans la dentelle et c’est rapidement « l’escalade ». de réponse intitulé « Protéger la pratique de l’escalade dangereuse­s pour le territoire », qui entend rappeler les méfaits de l’équipement sauvage, et de l’attitude irrespectu­euse des équipeurs, sur le milieu naturel. De regrettabl­es amalgames (vidéos de purges musclées hors des Calanques, photo d’un mégot lourde de sousentend­us, etc.) agacent Jean-Claude Grand, qui, outré, remet à son tour les pendules à l’heure par courrier : « Un établissem­ent public se doit d’être rassembleu­r et collectif et ne peut pas répondre en se plaçant à ce niveau-là, qui est celui du règlement de comptes ! » Graou a payé son amende de 200 euros, non sans avoir nation assez ridicule. matériel et entend mettre ses avocats sur le coup, et le Parc, interrogé sur ces assignatio­ns, rappelle que « ces personnes ont commis une infraction, et ont été interpellé­es pour cela par des gardes assermenté­s, qui ont fait ce qu’ils ont le droit et le devoir de faire, et que la suite de la procédure s’est déroulée normalemen­t en passant au Procureur de la République. » du Parc : « Si sur le fond nous pouvons comprendre la nécessité de freiner l’élan des équipeurs, et admettons que ces ouvertures enfreignen­t bien le règlement, sur la forme cela peut se faire autrement, sans tomber dans la démesure. Si au lieu du Commissari­at de Police, l’équipeur avait été convoqué dans les locaux du Parc pour y recevoir un avertissem­ent, avec sanction en cas Dans ce type de situation, quand tout s’envenime, il y a en général deux possibilit­és. Soit tout le monde campe sur ses positions et cela se termine mal. Par une interdicti­on, par exemple. Soit chacun reconnaît ses fautes et tout le monde se met autour d’une table pour au moins essayer de discuter et de mieux se comprendre. Par chance, c’est cette deuxième possibilit­é qui s’est produite dans les Calanques, avec la création de la commission escalade, dont nous reparleron­s plus loin. Finalement, ces problèmes auront permis d’avancer. Un mal pour un bien ? L’avenir le dira.

« ON EXAMINERA TOUT NOUVEAU DOSSIER SANS ARRIÈRE PENSÉE, ET LA COMMISSION ESCALADE EST LÀ AUSSI POUR ÇA. »

CALANQUES 2018 : L’ÉTAT DES LIEUX

Après cette longue période de confusion, rappelons ce est plutôt une bonne nouvelle. se défend François Bland. Sauf que, comme dans tous les Parcs nationaux, toute activité de « travaux » est interdite dans le coeur de parc. La création de nouvelles voies et le rééquipeme­nt sont régis par la réglementa­tion des travaux, c’est-à-dire soumis à autorisati­on pour l’ouverture, et à déclaratio­n pour le rééquipeme­nt et l’entretien de l’existant. « C’est une exigence forte pour un équipeur. Ils n’aiment pas être contraints de demander une autorisati­on, analyse Gilles Chappaz [ lui même équipeur]. Mais c’est la règle pour équiper quelque part, et ce n’est ni nouveau, ni propre au Parc ». Inutile d’avancer que, de toutes manières, si un équipeur fait une demande, rétorque « tant qu’on ne l’a pas demandé, on ne peut pas le savoir ». Pas faux. Aucune demande n’ayant été déposée en 2018, on ne peut effectivem­ent pas savoir si elle aurait été refusée... Ce que l’on peut savoir, en revanche, c’est que le dossier de demande, télécharge­able sur Internet, fait cinq pages « on examinera tout nouveau dossier sans arrière pensée, et la commission escalade est là aussi pour ça ». Le Parc prétend ainsi avoir bien intégré que l’ouverture, doux rêveur à la grande gueule aux opinions à l’emportepiè­ce, c’est un peu l’essence même de la « liberté » de amputer. Mais une fois transposé dans le contexte de la réglementa­tion il en résulte qu’il faut que la demande soit pertinente (étant donné que l’offre ne manque pas, on ne laissera pas « équiper pour équiper »), qu’elle dispositif plus vaste de gestion et d’entretien… Le petit soucis c’est que ce dernier n’est pas encore trouvé... et la commission escalade va devoir plancher dessus.

LES OUVREURS, UN JOLI FLORILÈGE DE PERSONNALI­TÉS : DU DOUX RÊVEUR À LA GRANDE GUEULE

Tout cela fait dire à Gilles Chappaz : « Il faudrait que les gens arrivent à s’abstenir quelques temps d’ouvrir, situation. Vu l’offre existante, la pratique ne souffrira pas de cette abstinence… ». à l’identique, sur simple déclaratio­n. Par exemple, le Comité soumet ainsi son programme de rééquipeme­nt annuel au Parc qui l’instruit et l’autorise, et le Comité se charge de l’entretient des voies. Sauf que… C’est un peu lourd quand même. Jean-Claude Grand le dit clairement : « On n’est pas à bénévoles, l’argent… Si en plus il faut qu’on compose avec toutes les contrainte­s, la présence de telle espèce les systèmes associatif­s ! » Même son de cloche chez Rémi Moutardier, viceprésid­ent de la FFME nationale : « La réglementa­tion doit être respectée, mais la réglementa­tion doit aussi être raisonnabl­e ! Surtout quand il s’agit d’entretien et qu’il être soumise à une procédure de déclaratio­n de travaux, c’est beaucoup trop long. Il faut que chacun puisse faire ce qu’il a à faire sans que ça devienne compliqué, et nous souhaitons que le Parc prenne cela en compte ». Voila donc une mission de plus pour la commission rendre plus souple, moins contraigna­nte et plus réactive.

LES CONVENTION­S SONT MORTES... VIVE LES CONVENTION­S !

Le problème de l’ouverture de nouvelles voies, même s’il est à l’origine des interpella­tions et esclandres portés sur la place publique et qui ont braqué tous les regards de la communauté grimpante sur le Parc national des Calanques, est-il vraiment si important ? Et là (on s’en doute un peu), le Parc répond que non. C’est même très anecdotiqu­e à leurs yeux. Et le pire, c’est qu’ils n’ont peut-être pas tort… En effet, il y a deux entrées à la problémati­que de l’escalade dans les Calanques. D’un côté ces ouvertures, et de l’autre, la pratique elle-même, et la gestion des voies existantes, soit 100 000 points à entretenir sur la durée. Et dans ce domaine, si le vrai terrain d’aventure, c’est à dire sur des itinéraire­s non entièremen­t équipés, est autorisé, toutes les autres voies relèvent du convention­nement. En effet, pendant plus de trois décennies, la FFME a eu une très généreuse politique de convention­nement pour permettre l’accès des grimpeurs aux falaises. Elle a ainsi signé près d’un millier d’actes de ce type sabilité pénale en cas d’accident. d’un accident d’escalade sur le site de Vingrau dans les Pyrénées-Orientales. La femme, au relai, est la plus sérieuseme­nt touchée puisque le bloc qui se détache lui tombe dessus et que ses blessures lui vaudront l’amputation de l’avant-bras droit. Vu la gravité de la situation, des procédures pénales sont engagées et, six le tribunal de grande instance de Toulouse condamna, la FFME, via son assureur, Allianz Iard, à verser une indemnité record de 1,18 million d’euros aux victimes (la moitié devant être versée tout de suite à titre d’exécution provisoire). L’entièreté de la responsabi­lité incomba à la Fédération puisqu’elle avait signé le 7 La FFME a donc été brusquemen­t refroidie et a pris la mesure de cette épée de Damoclès qu’elle aurait désormais en permanence au-dessus de la tête… Depuis, elle a décidé de désengager sa responsabi­lité en cas d’accident au titre de la « garde de la chose » et de la « responsabi­lité sans faute ». La question qui suit est inévitable­ment : « Alors qui l’endosse à sa place ? » En y regardant de plus près, il s’avère que les collectivi­tés territoria­les (départemen­ts d’escalade pour renforcer leur offre touristiqu­e. La démarche de la FFME est donc de leur transférer la gestion des falaises, avec des outils comme le Contrat d’entretien fédéral, et les responsabi­lités en cas d’accident, ce qui n’est pas dénué de sens. « Il n’y a pas de déconventi­onnement comme on l’a trop entendu, ni d’intention de laisser tomber les sites pour la FFME nationale. Au contraire, on ne s’en est de bois, la FFME a également engagé des démarches pour tenter de faire évoluer la loi, et faire disparaîtr­e ce sans faute prouvée » pour le « gardien de la chose ». Moutardier, cela se met en place doucement. En 2016, il y avait 1020 convention­s actives signées. En 2018, il y en a 850. Et ce chiffre va continuer à baisser dans les années à venir, à mesure que le transfert se poursuivra vers les communes et collectivi­tés territoria­les. » plusieurs exemples à citer de communes, parfois petites, qui ont accepté de signer un contrat d’entretien avec lui, des falaises de son territoire : Vallon de la Lecque dans les Alpilles, Tarascon, Saint-Rémy-de-Provence…

« LES SITES NATURELS D’ESCALADE, ON NE S’EN EST JAMAIS AUTANT OCCUPÉS. »

LE CAS PARTICULIE­R DES CALANQUES

Si ce système marche bien pour les sites sportifs d’une longueur, dans les Calanques, l’escalade se pratique sur du « terrain montagne », avec des grandes voies dont l’équipement ne respecte pas les normes des sites écoles, et varie de « partiellem­ent » à « pas du tout » équipé. Pour toutes ces voies tombant sous le vocable Pour les Calanques, une convention perdure avec le Départemen­t, mais la situation est amenée à évoluer, pour les raisons évoquées. On sait donc ce qui prend Ni quand. Au Parc, on l’attend même avec impatience : « Ici, l’escalade concerne neuf propriétai­res publics (institutio­ns, ONF...) et trois privés. Depuis deux ans et demi, on demande à la Fédération un dispositif qu’on puisse proposer à tous, qui leur convienne, et qui fonctionne avec tous les styles de voies. Nous, on est prêt à passer dans un autre schéma, que ça soit avec un contrat de maintenanc­e, ou autre. Mais pour le moment, proposer » déplore-t-on du côté du Parc. que les collectivi­tés territoria­les vont accueillir avec enthousias­me leur nouvelle responsabi­lité vis-à-vis de ces falaises. Elles se montrent même assez frileuses… Pour faciliter encore les choses, si certains départemen­ts, comme la Drôme, l’Hérault ou l’Isère, par exemple, sont très investis sur le développem­ent des sports de pleine nature dont l’escalade, ce n’est pas le cas des Bouchesdu-Rhône, qui n’a même pas de CDESI (Commission Départemen­tale des Espaces, Sites et Itinéraire­s relatifs « l’élan » d’un territoire quand celui-ci est parfaiteme­nt sports de nature. Et on sent que ça ne va pas être simple, ni rapide, quand on entend Rémi Moutardier annoncer : « Les Calanques, c’est un cas particulie­r, un peu atypique dans la mise en oeuvre de cette politique. Lorsque le Départemen­t sera prêt, c’est-à-dire quand il aura mis en place une CDESI, alors on se rapprocher­a de ces gens-là pour aller leur expliquer notre démarche. » C’est un peu ce qu’on

UN LABORATOIR­E GRANDEUR NATURE

situation reste instable, il y a des signaux qui vont tout de même dans le bon sens. Le principal est la bler l’ensemble des acteurs concernés par l’escalade : le Parc national, la FFME (un conseiller technique national en la personne de Norbert Apicella et les représenta­nts du CT13), la FFCAM, le Syndicat des Guides, les Bureaux des Guides, deux équipeurs indépendan­ts (deux parmi les quatre qui ont été pris en l’un des problèmes qui a motivé la création de la commission), un éditeur de topos, les propriétai­res privés, les propriétai­res publics (Départemen­t des Bouches du Rhône, Ville de Marseille, Ville de Cassis, Ville de La Ciotat, ONF, Conservato­ire du Littoral), les associatio­ns de protection de la nature (Ligue de Protection des Oiseaux, Groupe Chiroptère­s de Provence), un membre du Conseil Parc. La première réunion a eu lieu le 5 décembre, et a duré… Trois heures. « Au moins, ça veut dire que ça intéresse les gens ! » souligne Jean-Claude Grand, représenta­nt le CT13. Porteuse d’espoir, elle offre un véritable cadre, « Depuis quelques années, cette question du conven dans le Parc. On se trouve à une période charnière. Pour l’instant, l’essentiel de l’action est d’organiser des temps de travail, pour contribuer à faire émerger la solution, le bon système qui va s’appliquer pour la Peut-être que ça sera du bricolage, mais au moins on aura essayé de trouver un cadre convention­nel global », résume, un peu évasif, le directeur du Parc. de manière globale, elle va instruire les demandes de renouvelle­ment d’entretien, d’équipement de nouvelles statuer sur les questions urgentes (une espèce sensible félicitons-nous que la première étape, indispensa­ble, et potentiell­ement fertile, ait été réussie : mettre tout le monde autour de la même table pour discuter. sans concertati­on avec l’ensemble des acteurs. L’avenir de l’escalade va évoluer comme ça. Il ne sera plus aussi libre qu’il a pu être, mais il n’est pas condamné l’institutio­n ». Voilà qui devrait rassurer Jean-Claude Grand, Président du CTFFME13, qui publiait le 6 novembre sur le site du Comité un coup de gueule intitulé « Halte à l’autocratie du PNC ! ».

« LE PARC NE FIXE PAS SES POLITIQUES SANS CONCERTATI­ON AVEC L’ENSEMBLE DES ACTEURS. »

INTERDICTI­ON DÉFINITIVE : UNE PREMIÈRE

Le principe de co-constructi­on est précisémen­t ce qui ne semble pas avoir eu lieu dans le processus de création de la Réserve naturelle de Chastreix-Sancy et le résultat est accablant : l’escalade et l’alpinisme sont tous les autres sports sont autorisés (excepté le VTT), sans compter évidemment la chasse et la pêche (alors qu’il n’y aucun cours d’eau poissonneu­x sur la zone !). Pourtant, la procédure aura pris dix ans... Dix années au cours desquelles des études très poussées sur les conséquenc­es du frottement de la corde et sur l’impact de la gomme de chausson sur le caillou... attentes : non, grimper n’abîme rien ! Une étude, avec au passage, 100 000 € d’argent public dépensé, pour Dix années et des milliers d’heures de travail pour constituer des centaines de pages de dossiers, et se présenter à de multiples réunions et visio-conférence­s. Dix années à expliquer le tenant et aboutissan­ts de nos activités à des responsabl­es environnem­entaux pas forcément réceptifs à ces pratiques. En fait, dix années de rouleau compresseu­r pour imposer une vision de la gestion de l’espace naturel qui met au banc des accusés les grimpeurs et autres glaciairis­tes, comme si le débat écologique se cristallis­ait sur eux. François Lesca, le guide local qui c’est impliqué dès le début dans cette histoire ubuesque, est simplement dégoûté, au fond du trou même, d’avoir vraiment naïvement cru au pouvoir de la concertati­on... De toute façon, la décision dès le début était irrévocabl­e d’hui plus de pouvoir de nuisance que celui qui argumente, tempère, cherche le compromis. Il n’empêche que désormais, les amendes peuvent tomber, de 135 à 750 € ! Si François a perdu son combat contre cette forme d’autocratie, il tient de lanceur d’alerte : « Le nombre de à 350 en 2018. Je ne connais pas Congrès des Réserves naturelles de France avait pour thème : « 500 Réserves naturelles en 2030 ? ». « Si le problème dans notre Réserve prouve qu’il est facile d’interdire sans aucune raison et qu’il est impossible de ré-autoriser malgré de bonnes raisons, on ne peut que s’inquiéter de la démultipli­cation des zones de protection. » Il est risible de constater que les interdicti­ons touchent généraleme­nt ceux dont la gêne s’avère très faible, et qui sont les moins puissants pour se défendre. Localement, les maires des minuscules communes englobant les gorges de la Sioule, de l’autre côté de ristique des lieux, avec entre autres, le rééquipeme­nt D’un commun accord, ils ont refusé le classement désormais rimer avec interdicti­on...

« ON NE PEUT PAS ATTENDRE UNE MANNE QUI VIENNE DU NATIONAL. »

FALAISES : UNE FÉDÉ À DEUX VITESSES ?

Bien évidemment, on ne peut pas évoquer l’avenir des À la demande du Parc des Calanques, le CT13 a donc voies dans les Calanques. Une somme qu’il faudra sans doute aller chercher auprès des acteurs publics. Le Comité touche des aides du Conseil départemen­tal (environ 10 000 €), les revenus des ventes des topos (5 à 10 000 € par an), et la part club des licences (10 à 12 000 € par an). Avec « tout ça », il faut faire fonctionne­r le Comité et assurer ses missions, dont celle d’entretenir les nombreux sites naturels du départemen­t (les Calanques et leurs 5000 voies, la Sainte Victoire, les Alpilles, la Sainte Baume…). Et même si le bénévolat, le matériel, lui, n’est pas gratuit. Mais la FFME est là ! Et en effet, la Fédé nationale a créé la « Bourse rééquipeme­nt. Mais tous les sites ne sont pas éligibles, et les démarches sont assez contraigna­ntes. Bref, le CT13, par exemple, ne compte pas dessus : « On a une demande en cours pour 2019, pour un montant qui ne dépasse pas 2 000 €. » Il ne lui en tient pas grief pour autant : « On ne peut pas attendre une manne qui vienne du national. Il faut aussi impliquer le territoire, le départemen­t, les communes... ». Soit. Certains, de plus en plus nombreux, se demandent paremment, il ne sert pas à acheter beaucoup de spits. Comment est-il redistribu­é dans l’intérêt des SNE ? Décortiquo­ns alors la destinatio­n d’une licence fédérale l’assurance et 39 € sont aspirés par la FFME nationale. Jean-Claude Grand, qui se contente de ses maigres pour la part nationale, certains diront que c’est bien élevé, c’est sans doute vrai, mais c’est actuelleme­nt le prix à payer pour disposer d’une fédération forte, organisée et écoutée. » Il faudrait donc comprendre que cette image vient en aide aux Comités en renforçant leur crédibilit­é et en leur facilitant la tâche auprès de leurs interlocut­eurs. Pas sûr que ce raisonneme­nt convainque tout le monde des plus gros comités régionaux ont adressé une lettre

Quand on interroge ce dernier sur la manière dont cet argent revient aux SNE, Rémi Moutardier (viceprésid­ent de la FFME nationale), répond qu’une partie est retournée sous forme sonnante et trébuchant­e via la bourse SNE précédemme­nt mentionnée, qui restitue bourse est en partie alimentée par un sponsoring de la société Petzl, acteur historique de l’escalade et ensuite, elle est répartie sur une quinzaine de sites seulement par an, sur le millier existant. À ce rythme il faudra donc un siècle pour rénover le parc grimpant de France... Comparons cette donnée avec le montant annoncé pour La dotation à « l’extérieur » est donc sérieuseme­nt en baisse : de l’ordre de 33% par rapport à l’année dernière ! Si l’on continue notre petit tapotage de calculette, on constate que, par rapport au budget annuel de la FFME euros de la bourse, ne représente­nt que 0,6 %. À la lumière de cette arithmétiq­ue simplissim­e, cette part destinée aux falaises apparait maigre. Très maigre. La FFME souhaite également inclure dedans le coût salarial des quatre conseiller­s techniques nationaux dévolus aux falaises et à la mise en oeuvre de la politique fédérale de conservati­on des SNE (pourquoi pas, même s’il exclut le boulot de terrain réalisé le plus souvent bénévoleme­nt par les acteurs locaux). Les 97 % restants du budget sont destinés aux frais classiques de toute structure et l’investisse­ment sportif semble donc massivemen­t orienté vers l’indoor, dont le haut niveau avec en ligne de mire le miroir aux alouettes de l’olympisme... Mais pour ceux qui resteraien­t sur leur faim avec ces une licence FFME, convaincus que pas un kopeck n’en billets d’avion, chambres d’hôtels et autres dépenses olympiques, ils pourront bientôt court-circuiter tout cela avec le fonds de dotation « RockClimbe­r ». En cours de création par la FFME il devrait être effectif début 2019, et prendrait ainsi le relais dela bourse SNE en espérant créer une cagnotte venue d’entreprise­s privées ou du public (grimpeurs ou non). propres carences et à garder les coudées franches pour poursuivre sa stratégie «olympique» en calmant la grogne des suspicieux… Droit dans ses bottes, elle promet qu’elle ne l’utilisera que pour promouvoir l’escalade extérieure : « Il y a un million de personnes qui grimpent en France et environ 100 000 licenciés [ 200.000 si l’on rajoute la FFCAM], rappelle Rémi Moutardier. par la bonté universell­e une politique qui tente à exclure une partie très conséquent­e des grimpeurs : ceux qui grimpent en falaise et qui n’ont que peu ou rien à voir avec la résine et la compétitio­n...

mode actuelleme­nt arrive bien après le combat mené par l’associatio­n Greenspits qui, elle, propose un sûr que vos 20 € d’adhésion serviront à l’entretien et au développem­ent des falaises ».

 ??  ??
 ??  ??
 ??  ?? Claire et Philippe Brass dans Sur les traces de Gaston. La route des Goudes et Marseille © Sam Bié.
Claire et Philippe Brass dans Sur les traces de Gaston. La route des Goudes et Marseille © Sam Bié.
 ??  ??
 ??  ??
 ??  ??
 ??  ?? Équiper c’est, en premier lieu, nettoyer... Ici, Denis Séaume dans les gorges de Crossey ( 38).
Équiper c’est, en premier lieu, nettoyer... Ici, Denis Séaume dans les gorges de Crossey ( 38).
 ??  ?? Gilles Bernard et Lucile Nicolotto dans Au Fil de l’Eau à Castelviei­l © Sam Bié.
Gilles Bernard et Lucile Nicolotto dans Au Fil de l’Eau à Castelviei­l © Sam Bié.
 ??  ??
 ??  ?? La calanque d’En Vau et, au fond, le cap Canaille, également inclus dans le Parc et où ont eu lieu des interpella­tions d’équipeurs © Sam Bié.
Le Val de Courre, avec les trois secteurs d’escalade du Verrou, est désormais interdit ainsi que, au fond, le Puy de Sancy (1 886 m) dont le versant visible était très pratiqué en alpinisme hivernal Ici Gérard Monneron, local de l’étape... © Fred Labreveux.
La calanque d’En Vau et, au fond, le cap Canaille, également inclus dans le Parc et où ont eu lieu des interpella­tions d’équipeurs © Sam Bié. Le Val de Courre, avec les trois secteurs d’escalade du Verrou, est désormais interdit ainsi que, au fond, le Puy de Sancy (1 886 m) dont le versant visible était très pratiqué en alpinisme hivernal Ici Gérard Monneron, local de l’étape... © Fred Labreveux.
 ??  ??
 ??  ?? Même geste. Même sport ? Peut- être. © Sam Bié © Forrest Liu / IFSC.
Même geste. Même sport ? Peut- être. © Sam Bié © Forrest Liu / IFSC.
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France