Vertical (Édition française)

LIV SANSOZ

LA BOUCLE EST BOUCLÉE

- Par Lucien Martinez

Dans notre numéro d’été, alors qu’il ne lui manquait qu’une seule course pour boucler son périple, nous avions détaillé chacun des itinéraire­s suivis par Liv Sansoz. Le 11 septembre 2018, elle est arrivée au bout de l’intégrale de Peuterey en foulant au passage les deux sommets qui lui manquaient. Retour sur la conclusion d’un projet riche en péripéties.

E du suspense le classement général de la Coupe du monde d’escalade. L’année suivante, elle est championne du monde et pendant encore trois saisons, Liv dominera le circuit internatio­nal. En falaise, la grimpeuse surdouée multiplie également les performanc­es ; les 8b et 8b+ tombent en une poignée d’essais. Même le 8c n’oppose pas grande résistance. En 2000, elle clippe la chaîne de Hasta la Vista au Mont Charleston, une voie cotée 8c/+. À l’époque, seule l’extraterre­stre basque Josune qu’elle sent la victoire proche face à Necessary Evil (8c+), Liv Sansoz se fracture une vertèbre suite à une erreur d’assurage. Ce n’est que le début d’une longue série de blessures, dont un autre gros accident en base Loin d’être abattue, la grimpeuse retrouve peu à peu ses après son premier titre de championne du monde, elle

POUR FINIR EN BEAUTÉ : L’INTÉGRALE DE PEUTEREY

Départ depuis la vallée, côté italien, passage au sommet de l’aiguille Noire de Peuterey (3 772 m), poursuite itinéraire magistral, appelé communémen­t L’intégrale

de Peuterey, que Liv avait à coeur de terminer sa course pour différente­s raisons. J’y suis allée deux fois, à cette Associée à Catherine Destivelle lors la première tentative, leur progressio­n est ralentie par la complexité de la une blessure à l’avant-bras pour Catherine contraint

Une semaine plus tard, Liv bute à nouveau au sommet avance, les orages arrivent, les couloirs ne seront bientôt plus en neige et l’eau va manquer sur les hauteurs. La course semble donc compromise pour cette année. 2019, Liv vaque à d’autres escalades : elle part grimper du côté de l’Eiger avec Roger Schaëli, un alpiniste Peuterey. Elle commence par refuser mais comme le créneau exceptionn­el de beau temps sans vent se précise, l’idée de migrer à Chamonix s’insinue peu à peu en insistant pour l’accompagne­r. Pour Liv, c’est une occasion en or de se libérer l’esprit : « Je me suis dit certain temps. On y pense en permanence. » Parapente dans le sac, ils attaquent la course dans des conditions météo qui tiennent toutes leurs promesses. Les sensations sont excellente­s. « On était hyper con bien », dira-t-elle. Après une courte nuit au bivouac Craveri, ils reprennent vers l’aiguille Blanche dans la pénombre. Leur progressio­n se poursuit sans encombre pour remonter la face sous le Grand Pilier d’Angle : « L’accès était hyper sec, on a brièvement échangé par rapport à ça, tous les deux avec nos doutes. Il fallait un peu d’imaginatio­n pour remonter cette pente de glace couverte de “sable”. À chaque fois que l’on frappait sur la polaire… Les lunettes étaient pleines de sable. On en avait partout dans la bouche, c’est resté au moins une heure entre les dents et les gencives. Je ne dirais pas que c’était inquiétant, c’était particulie­r, et formateur. ont même le temps de savourer le sommet avant de parapente. À 17 h environ, ils décollent. Un peu plus d’une demi-heure plus tard, ils sont à nouveau sur la terre ferme chamoniard­e. Liv Sansoz n’annoncera que le surlendema­in l’achèvement de son savourer et pour réaliser ».

À L’HEURE DU BILAN

Au lendemain de la conclusion de l’aventure, Liv en mement riche, humainemen­t mais aussi en termes de connaissan­ce et d’expérience­s. » La réalisatio­n d’un maximum de courses avec des personnes appréciées lui a permis de passer d’excellents moments en montagne pas se laisser polluer l’esprit par la volonté de boucler le début de ne pas utiliser de remontées mécaniques. On pourrait croire à une contrainte mais ce fut en fait une formidable opportunit­é. En dehors des périodes de fonctionne­ment des téléphériq­ues, des cimes désertes et sauvages se sont offertes à elle : « J’ai redécouver­t des montagnes sauvages. Le Cervin par exemple, quand les remontées de Zermatt ne tournent pas, il n’y a personne. » En revanche, elle a tenu à rappeler l’envers du décor quelque sorte. L’épuisement physique et mental s’invite à la fête à la moindre occasion ; après 38 sommets en moins de 2 mois, un manque de lucidité fut peut-être responsabl­e sa blessure au mollet. La rupture d’un pont de neige lui avait en effet causé une déchirure musculaire puis d’importante­s gelures aux orteils le de sommeil chronique due à la succession des nuits en refuge et dont l’organisme subit les stigmates pendant plusieurs mois : « J’ai accumulé un important manque matin prête à partir. » Attaqué le 2 mars 2017, achevé le 11 septembre 2018, le marathon des festivals ne fait que commencer...

« JE N’AI JAMAIS FAIT DE L’ALPINISME COMME ÇA. »

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 ??  ?? En direction de l’arête Kuffner © Mathis Dumas.
En direction de l’arête Kuffner © Mathis Dumas.
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