Vertical (Édition française)

THE CLIMBERS : LE LIVRE

Le meilleur livre de montagne de l’année... sans montagnes...

- Par Henri-Luc Rillh

Le travail d’une vie : rendre hommage à ces femmes et à ces hommes qui ont façonné l’histoire, à ces explorateu­rs de sommets, à ces prospecteu­rs d’itinéraire­s et de faces vierges qui ont souvent poussé leur engagement jusqu’à une irréversib­le extrémité. Désormais, ils sont rattrapés par le temps et la vie qui passent. Jim Herrington les présente sans fioritures, totalement dépouillés de l’aura qui les a illuminés lors de leurs exploits. Des clichés puissants sur une vérité troublante.

Grimpeur, rockeur, nomade et l’auteur de ce livre : le photograph­e américain Jim Herrington. Après une vie à immortalis­er des célébrités pour les plus grands magazines américains, il nous révèle ici son secret : son amour pour les grands espaces, rugueux et sauvages, et incidemmen­t pour l’escalade et l’alpinisme qu’il appréhende comme des pratiques exploratoi­res de territoire­s empreints de mystères et d’inconnu. Adepte du travail de mémoire, il a commencé à remonter le temps en suivant, tout d’abord, les vieilles légendes de la musique américaine, du blues, de la country, du rockabil grimpeurs des années 1920 étaient Fasciné par ceux qui ont marqué l’alpinisme, il ne lui en fallait pas moins pour se lancer dans sa quête d’im-mortalisat­ion, tout d’abord aux États-Unis puis dans le monde entier. Pendant 20 ans, il les a donc le plus beau sourire ou dans la plus belle pièce de leur maison... Extraits des environnem­ents de leurs exploits passés, débarrassé­s de leurs habits de lumière, il les a ramenés à leur condition d’êtres humains presque normaux.

En voyant la couverture, certes, on commence par penser « encore un livre de ou pour les vieux… ». En fait, non, radicaleme­nt anti-conformist­e, il s’adresse à des lecteurs qui souhaitent ne pas être trompés et qui recherchen­t une forme d’honnêteté, de vérité, sur l’être. La préface d’Alex Honnold témoigne que ce livre est prit du moins. Les développem­ents de Greg Child sur chacun d’entre eux fournit en complément une lecture totalement inédite sur les faits historique­s qui les ont fait entrer dans la légende de nos activités. Les photos de Jim sont loin du standard du portrait de famille. Elles nous parlent en s’adressant à nos émotions, en nous faisant entrer dans l’environnem­ent bien réel des personnage­s, avec leurs espoirs, comblés ou déçus, avec leurs rêves, accomplis ou inachevés, avec leurs blessures et leurs souffrance­s, leurs sentiments de plénitude et d’accompliss­ement souvent empreints d’inquiétude et d’angoisse. C’est fort, presque brutal, peut-être réconforta­nt, quelquefoi­s dérangeant mais tout le temps fascinant. Il est à peine croyable de voir ces personnage­s ainsi. Chacun de ces soixante portraits convoque l’imaginatio­n tant les images sont intenses et puissammen­t évocatrice­s. Ces photos nous montrent ces héros dans un monde normal, tels des acteurs sortis de scène. Tout dans les images semble classique et banal, cependant, émanant de la noblesse des attitudes et des regards, l’aventure s’y invite. Les stigmates de leurs âpres combats, visibles sur les corps et les visages, font de ces personnage­s des héros mystiques, des conquérant­s d’un autre temps. La mémoire de leurs ascensions et de leur vie apparaît alors comme l’histoire d’un monde hors norme. Si l’on devait ne retenir que deux mots qui irradient chaque page, ils pourraient être : aventure humaine.

Cette année, The Climbers, aura été, plus que jamais, le symbole de ce travail de mémoire sur les héros de nos sports. Geneviève « Sonia » Livanos est décédée le 15 avril 2018, Jim « The bird » Bridwell le 16 février et Tom Frost, le 24 août. © Jim Herrington.

LES STIGMATES DE LEURS ÂPRES COMBATS FONT DE CES PERSONNAGE­S DES HÉROS MYSTIQUES, DES CONQUÉRANT­S D’UN AUTRE TEMPS

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 ??  ?? Thomas « Tom » Hornbein (1930-). Il réalisa, le 22 mai 1963, la première ascension historique de l’arête ouest de l’Everest en passant, entre 8 000 et 8 500 m, par un couloir raide et escarpé qui porte aujourd’hui son nom. C’est là que disparut le jeune snowboarde­r français Marco Siffredi, le 8 septembre 2002, en tentant sa seconde descente de l’Everest. Médecin, Tom Hornbein a largement contribué au développem­ent des systèmes respiratoi­res pour la haute altitude. Il s’est vu décerné cette année, le 14 avril, le Lifetime Achievemen­t Award par le Mountainee­rs club de Seattle. © Jim Herrington.
Thomas « Tom » Hornbein (1930-). Il réalisa, le 22 mai 1963, la première ascension historique de l’arête ouest de l’Everest en passant, entre 8 000 et 8 500 m, par un couloir raide et escarpé qui porte aujourd’hui son nom. C’est là que disparut le jeune snowboarde­r français Marco Siffredi, le 8 septembre 2002, en tentant sa seconde descente de l’Everest. Médecin, Tom Hornbein a largement contribué au développem­ent des systèmes respiratoi­res pour la haute altitude. Il s’est vu décerné cette année, le 14 avril, le Lifetime Achievemen­t Award par le Mountainee­rs club de Seattle. © Jim Herrington.

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