Vie Pratique Féminin

L’interview de Thomas Ngijol

Lancé par le « Jamel Comedy Club », il conquiert désormais le cinéma*, s’essayant même à la réalisatio­n avec son film « Fastlife ». À partir du 14 octobre prochain et jusqu’en janvier, le comédien sera au théâtre Dejazet, à Paris, pour un spectacle s’anno

- Par Alexis Chenu

Pas trop de stress avant le grand show ?

Je peaufine les détails, je travaille, et puis je gère ma nouvelle vie de famille. Ma fille vient d’avoir 3 mois, je m’adapte à un nouveau rythme. Ça change le quotidien !

Ça change quoi ?

Tout ! Je n’ai plus envie de perdre de temps, je veux juste aller à l’essentiel.

Revenons au début du début. Comment tout a commencé pour vous ?

Je ne viens pas du tout d’une famille d’artistes. Je suis né à Paris, dans le XIIe arrondisse­ment et puis j’ai grandi à Maison-Alfort. Le déclic est venu de l’envie de me faire plaisir, de raconter mes histoires, de rire. Et puis, le métier de comédien n’est pas un métier de clown. Chez moi, il traduit une sorte de solitude, la douleur de s’apercevoir que personne ne vous comprend, de se rendre compte de beaucoup de réalités que personne ne voit autour de vous.

Petit, sentiez-vous cette fibre comique ?

J’ai longtemps été un garçon timide. Et puis je me suis lâché, j’ai commencé à faire sourire mes profs : un petit fouteur de merde, mais sage et sobre.

Qui vous a fait aimer la comédie, alors ?

Même si je suis d’origine camerounai­se, j’ai grandi en France et mes références, c’était Pierre Richard, Louis de Funès, Les Inconnus, Élie et Dieudonné. Ce sont eux qui m’ont fait rire. Je les regardais en fan, mais je n’avais pas forcément envie de faire comme eux.

Le « Jamel Comedy Club » a été le déclic ?

Sincèremen­t, j’avais déjà bourlingué bien avant. Je n’ai pas appris le métier là-bas, mais en franchissa­nt les étapes tranquille­ment, en faisant beaucoup de théâtre et de petites salles. Je n’appartiens pas à la génération de mecs nés d’une émission de télé ou d’Internet. J’ai été bâti sur des fondations solides. En revanche, le « Jamel Comedy Club » m’a aidé en termes de notoriété, c’est certain. C’était la première fois que je pouvais faire mon métier à une échelle médiatique importante.

Est-ce qu’être comédien et noir, c’est toujours un peu compliqué ?

Il ne faut pas être hypocrite : même si je ne me lève pas tous les matins en pensant à ma couleur de peau, on me rappelle régulièrem­ent que je suis noir et que mon profil peut être problémati­que. C’est notamment le cas au cinéma. Mais je ne suis en guerre avec personne. Je n’ai pas besoin de lever le poing pour me faire respecter. J’aime rire sur ce sujet, mais je n’en fais pas un fonds de commerce.

Vous venez de réaliser votre premier film, « Fastlife ». Est-ce une manière de dire au milieu du cinéma qui vous êtes ? Je n’ai pas le profil d’un comédien pris pour tel ou tel film ou sortant de telle ou telle école. Depuis que j’ai une carrière, je fourmille d’idées et de projets. Je veux la mener comme je l’entends parce que j’ai mon histoire à construire. Ça ne veut pas dire que j’ai de l’aigreur vis-à-vis du milieu du cinéma. J’ai juste envie d’avancer.

Prêt pour Hollywood, alors ?

Je me demande bien ce que je ferais là-bas ! Je suis content d’être là où l’on ne m’attend pas, et puis je nourris d’autres projets, comme le long-métrage où je vais jouer devant la caméra de ma compagne [la réalisatri­ce Karol Rocher].

Le registre dramatique peut donc vous intéresser ?

Pourquoi pas… Je ne suis pas le genre de comique à ne vouloir faire que ça, je regarde beaucoup plus de films dramatique­s que de comédies. Alors,

si un projet me plaît dans un registre différent que celui de l’humour, je me lance.

Votre nouveau spectacle, « Thomas Ngijol 2 », commencera le 14 octobre. À quoi peut-on s’attendre ?

À ce que je sois bien habillé ! (rire)

Et plus sérieuseme­nt ?

Avec ce spectacle, j’ai envie d’atteindre un niveau de sincérité extrême sur scène. J’ai vécu beaucoup de choses ces dernières années, j’ai appris à grandir et j’ai un vrai besoin d’être en accord avec ma vie personnell­e. Bien que l’on me voie comme un fou parfois, je n’ai pas envie d’être le mec uniquement drôle. J’ai aussi envie de toucher les gens.

Reviendrez-vous avec certains de vos sketchs culte ?

Non, je n’ai surtout pas envie de faire de réchauffé. Et puis je ne veux pas que ma fille me voie faire Superman à la télé pendant vingt ans et pense que je suis un abruti !

Parlerez-vous politique ?

Franchemen­t, je m’en fous un peu, de la politique. Et je n’achèterai pas le livre de Valérie Trierweile­r, je vous jure ! Mais tant que nous ne vivrons pas dans un pays juste, la politique fera toujours partie des sujets que j’aborderai.

On dit souvent qu’être seul sur scène sert de thérapie, c’est le cas pour vous ?

Oui, je crois. J’ai 36 ans, c’est un peu l’âge qui ne sert à rien et, en même temps, le moment où il faut construire. Mon film et mon nouveau spectacle font partie de cette constructi­on. Ça me permettra d’être plus serein à 40 ans ! Et puis j’ai envie de montrer au public que je peux évoluer.

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* Notamment « Case départ » et « Le Crocodile du Botswanga ».
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