Depuis 1873, des architectes portent le nom de Dubuisson. Invitation chez Sylvain Dubuisson.
Depuis 1873, de père en fils, des architectes portent le nom de Dubuisson… Mais ce qui les différencie serait le dessin par-delà l’aspect décoratif, une certaine forme de langage. Comme dans l’appartement de Sylvain Dubuisson.
Une écriture du temps, depuis plus d’un siècle, passe du style Art déco pour Émile et sa première voûte de béton armé, à une période moderne avec Jean et sa barre à Montparnasse. Sylvain, le fils devenu à son tour père, signe ici son ingénieux lieu de vie : en 55 m2 ! Une forme vitale d’assemblage d’espaces, pour vivre ensemble et séparément. De son côté, son fils Thomas reprend la conversation familiale en réhabilitant, avec Frank Gehry, le musée des Arts et Traditions Populaires, construit dans les années 1960 par son aïeul. L’architecture comme objet d’une conversation familiale se prolonge. Ici, l’objet dit de mobilier, se matérialise en pensée littéraire et porte le titre : Beaucoup de bruit pour rien, en référence à Shakespeare, pour une lampe qui illumine une carte postale sélectionnée. Si c’est un lutrin, il peut porter le regard d’un être aimé à travers un socle miroir et se nommer : Connaissance. C’est avant tout un corps de lettres qui nous fait face, quand Sylvain Dubuisson présente l’idée qu’il se fait d’une chaise, d’une horloge… ou encore de l’architecture, comme : Diogène, le tonneau du philosophe réinterprété en unité d’habitation. Il faut prendre l’homme à la lettre, et l’oeuvre-objet s’anime au-delà de la forme, dans une dimension poétique. Cet appartement bien parisien du XVIIIe siècle est devenu meuble lui-même, cabinet de curiosités à tiroirs secrets. À questionner l’objet du quotidien, l’architecte révèle sa mission. Par la maîtrise de la fonction, il libère la forme. Le symbolique, l’imaginaire et le réel sont bien liés en sa demeure. Du palier, la porte s’ouvre sur une table de salle à manger en wacapou, qui une fois repliée est maintenue en totem par trois allumettes… La pièce commune est tour à tour bibliothèque, cuisine et surtout lieu de rencontre. Ici, le mobilier tend à la bascule, comme ces chaises dessinées pour la bibliothèque Sainte-Geneviève, aux pieds légèrement arrondis. Point de repère, le principe même de la salle de bain n’existe pas. On s’enferme dans une Grande jarre en Corian pour prendre sa douche, et à l’autre extrémité de l’appartement, où se trouve la chambre d’ami, un lit de repos s’ouvre sur une baignoire encastrée. Dans l’ombre, un mur coulisse et laisse découvrir des cellules de verre. C’est là que se tient la famille. Trois chambres, alvéoles où l’on se rassemble tout en gardant sa distance. Les niveaux de sommeil sont différents. On dort perché au-dessus de ce qui nous habille, ou les yeux perdus dans une coupole de lumière. Ou bien encore, appuyé sur des rêves d’enfants, à la tête d’un lit qui se plie et se déplie en coffre à jouet. Des étagères en plongeoir, des dessous de lit en baignoire, jusqu’à la table qui se lève : cet appartement entre fonctionnel et imaginaire ne prolonget-il pas l’espace intérieur ? Chez Sylvain Dubuisson le meuble devient une oeuvre, qui s’ouvre, s’empile, s’illumine. Les portes ne claquent pas, elles coulissent. On quitte le lieu comme on referme un livre.
LES ADRESSES DE SYLVAIN DUBUISSON
Pour l’excellence de leurs savoir-faire. Golfe Agencement à Vannes. Ateliers du Marais à Saint-Nazaire. Ateliers Saint-Jacques à SaintRémy-lès-Chevreuse. Pour sa collection de cadres anciens et son savoir-faire. Antoine Béchet Encadrement. Pour la beauté des bijoux de ce joaillier. Vincent Avenches. Pour ses arts de la table. Xanadou. Pour cet espace newyorkais présentant la qualité du savoir-faire français. Ma table « Tout Si Two » réalisée avec les Ateliers Saint Jacques y est présentée actuellement. Galerie Par Excellence. Pour leurs bouquets de fleurs. Jardin du Louvre.