Vivre Côté Paris

Chantilly la crème des châteaux

- PAR NOÉMIE BARRÉ. PHOTOS NATHALIE BAETENS.

Avec un nom évocateur de dentelle délicate et de porcelaine décorée, associé à l’univers hippique, Chantilly, ville princière à vingt minutes de la gare du Nord, est riche d’histoires dans l’Histoire. On ne peut pas toutes les raconter. Le mieux est d’y passer une journée ou un week-end pour les découvrir et goûter à la sérénité ambiante…

Ci-contre, perspectiv­e ouverte sur les jardins d’André Le Nôtre, désaxés par rapport au château, dessinés pour le Grand Condé, Louis II de Bourbon, au XVIIe siècle. Parterres et jeux d’eaux ne sont pas sans rappeler ceux de Versailles, mais Le Nôtre plaçait la réalisatio­n de Chantilly au sommet de son art. À droite, au fond, on aperçoit un virage de l’hippodrome.

O1. Sous les volées d’escaliers se nichent dans des grottes des allégories du sculpteur Jean Hardy. En haut, on aperçoit la statue du connétable Anne de Montmorenc­y, érigée par le duc d’Aumale. O2. Des statues du XIXe, d’un blanc éclatant, ornent les parterres du jardin de Le Nôtre. Ici, Pluton par le sculpteur Henri Chapu. O3. Le Petit Château, partie la plus ancienne, est à fleur d’eau. Derrière, en rotonde, on aperçoit la chapelle. O4. Le Temple de Vénus dans le jardin anglais du duc d’Aumale. Page de droite, le Grand Degré, majestueux escalier, relie la terrasse au parc. L’architecte Honoré Daumet s’est vu confier la lourde tâche de reconstrui­re le Grand Château, intégrant une chapelle, des pièces de réception et bien sûr, des galeries pour abriter les collection­s.

O1. Des courses se déroulent sur l’hippodrome depuis 1830. Ici, le Prix du Jockey Club. O2. Sophie Bienaimé est à la tête de la troupe des Grandes Écuries. Elle conçoit avec sa soeur Virginie des spectacles poétiques consacrés à l’art du dressage de haute école. O3. Nattes obligatoir­es pour belle crinière. O4. Rencontre en petit effectif au Polo Club. O5. Même s’ils passent beaucoup de temps en plein air, les chevaux du Polo Club ont leurs écuries. O6. Sculpture de Rémy-François Bridault, sur le tympan de l’une des portes des Grandes Écuries. O7. Chevaux, ânes et poneys Shetland participen­t aux spectacles et animations. O8. Statue équestre du connétable de Montmorenc­y, premier propriétai­re notoire du château. O9. Selle et couverture argentines au Polo Club. 10. Les voûtes en pierre des Grandes Écuries.

Prétexte à l’escapade, le Domaine de Chantilly nous amène à battre la campagne. À peine arrivé, on devine qu’il a traversé des siècles et l’on apprend qu’il a aussi subi les revers de fortune de ses différents propriétai­res. Du Grand Château des princes de Condé, rasé à la Révolution au Petit, dans lequel Henri d’Orléans, duc d’Aumale, fit aménager ses appartemen­ts. Ces derniers, plus intimes, sont émouvants. On croit déceler quelques anachronis­mes – salles de bain modernes, photograph­ies accrochées auprès de tableaux – mais notre guide nous rappelle que le duc a vécu au XIXe siècle. Hier finalement !

Musée à haute personnali­té

Dans la tradition de mécénat de la lignée des Orléans, le duc rassemble ici une incroyable collection de livres et manuscrits, de tableaux et sculptures. Pour les admirer, il faut venir au château, car elles n’en quittent jamais l’enceinte. Sur les murs, on s’étonne de la proximité d’autant de chefs-d’oeuvre, balayant styles et époques, de Raphaël à Ingres, de Carache à Poussin. Nicole Garnier, conservate­ur en chef du Patrimoine, veille sur le musée Condé, “seconde collection de peintures anciennes après celle du Louvre” et s’emploie avec ses équipes à respecter la muséograph­ie voulue par le duc.

Promenade à facettes

Retour à l’air libre, dans le parc du Domaine. Si ce n’est pas Versailles, il y a quelques similitude­s ! Entourés d’une vaste forêt, on sillonne les grands parterres créés par Le Nôtre, on folâtre dans le jardin anglo-chinois, avec une pause obligée au restaurant du Hameau pour des fraises chantilly et on poursuit la promenade romantique dans le jardin anglais. Là aussi, la magie de la diversité des styles agit. En matière de diversité, Yves Bienaimé, personnage incontourn­able de Chantilly, s’y connaît ! Écuyer, il a sauvé les Grandes Écuries, puis, depuis une dizaine d’années, il accueille dans son Potager des Princes, un projet “dédié aux familles et aux enfants”. Un lieu touchant et poétique, aux multiples facettes – jardin d’agrément, parc animalier, animés d’ateliers… – sorti de son imaginatio­n, qu’il a débordante.

Là où le cheval est roi

Dans cette ville princière, le cheval est roi ! Ce qui frappe en arrivant, c’est son omniprésen­ce. D’abord, avec les Grandes Écuries, un véritable palais du XVIIIe siècle, destiné à rassembler carrosses, chevaux, chiens de meutes et le personnel. “Parmi eux, il y avait de nombreux

lads, pour qui fut d’ailleurs construite l’église anglicane et qui initièrent une communauté anglaise cantilienn­e, encore bien présente aujourd’hui ”, nous explique la lady du salon de thé The English Shop. La vie des Grandes Écuries est rythmée par le musée vivant du Cheval créé par Yves Bienaimé. Sa fille Sophie est directrice artistique des spectacles équestres. Le matin, on peut avoir la chance d’apercevoir dans la cour, les cavalières et leurs chevaux s’exercer. Ou assister à l’entraîneme­nt des chevaux de courses, sur la piste de l’hippodrome. Ou encore, venir voir un match de polo. La réputation élitiste de ce sport n’est pas juste ici! Pascal Renauldon, cavalier et joueur, s’est employé à nous faire changer d’avis: “Avec l’arrivée des Argentins pour la saison, l’ambiance est festive. Lors des matchs, les pelouses se remplissen­t de groupes d’amis, venus assister au spectacle, accompagné­s de pique-nique”. Simple et convivial, le polo!

Ville de bons goûts

Est-ce parce que le cuisinier Vatel a officié pour le Grand Condé que les Cantiliens ne sont pas insensible­s à la gourmandis­e ? On s’aperçoit qu’ici, on aime passer de joyeux moments à table autour de plats de bistrot et de jolis flacons. Ou dans le cadre feutré, du restaurant gastronomi­que de l’Auberge du Jeu de Paume. Les saveurs de Chantilly sont multiples et généreuses. Et si nous prenions aussi le temps d’y goûter en s’invitant au Domaine, le temps d’une journée d’été ?

O1. Le général Millet, administra­teur du domaine de Chantilly pour l’Institut de France, dans la Galerie des Actions de Monsieur le Prince. O2. Le salon Violet, dans les appartemen­ts privés, à la décoration Louis-Philippe. O3. Le cabinet des Livres. Même sans être un bibliophil­e averti, la richesse et la variété des ouvrages émeuvent. Ici est conservé le livre de prières Les Très Riches Heures du duc de Berry. O4. Enfilade de portes dans les Grands Appartemen­ts où l’on admire les dorures et peintures du cabinet d’angle, de la Grande Singerie… O5. Coupole dans la galerie de Peintures. O6. L’escalier d’honneur. O7. Restaurati­on de mosaïque. O8. La chambre de la duchesse d’Aumale. O9. Un des trésors de la collection du duc d’Aumale, Simonetta de Piero di Cosimo. 10. La Tribune, dont le nom et la forme se réfèrent à la salle des Offices de Florence.

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