Griffé glamour
Paris l’inspire, l’éblouit, mais c’est à Marseille que la photographe Malika Mokadem a fait escale.
Paris l’inspire, l’éblouit, mais c’est á Marseille que la photographe Malika Mokadem a décidé de faire escale. Pour combien de temps? L’avenir le dira. Cet esprit nomade aime l’énergie de cette ville qui mèle toutes les cultures du Sud et d’ailleurs. Elle a fait d’un h™tel particulier du centre, un palais atypique qui accueille styles et influences. Entre ombres et lumières, ses propres images y ont trouvé naturellement leur place.
CC’est ici que ses madones sulfureuses s’inventent devant l’objectif. La portraitiste Malika Mokadem a fait de son hôtel particulier marseillais la scène idéale pour apprivoiser ses modèles au jeu de l’image. Un décor trempé où se juxtaposent les mondes. Tous les mondes. Une bohème glamour et nomade, encombrée de malles, de valises et de mappemondes où le goût de l’ailleurs est toujours à portée de regard. “Paris et Marseille ne font qu’un, l’un ne s’envisage pas sans l’autre ! ” Pour elle, la capitale est un lieu de mode, de prises de vues, de “voyages” aux Puces, à la recherche d’une pièce de velours, d’une relique de dentelle ou de breloques étincelantes. C’est aussi le renouveau de l’hôtel La Maison Souquet, sous la griffe feutrée de Jacques Garcia, ou les salons du restaurant Lapérouse, des rendez-vous devenus ports d’attache. L’humeur slave, l’Orient et la surenchère des atmosphères de boudoirs l’enchantent. Son antre marseillais en reprend les inspirations. Animaux empaillés, canapé capitonné rose buvard où l’on peut s’allonger et “manquer de tenue ! ”, soulignet-elle. Ici, le noir, s’envisage comme une veste de smoking, mais aussi une toile de fond prête à accueillir l’audace des couleurs voisines. Des cascades de lustres à pampilles traversent les pièces, frôlent le velours céladon des fauteuils de Gio Ponti. Un décor de faste et de fête qui s’accompagne de robes du soir et de coiffes de cabaret vintage portées comme une reine, en version blonde ou brune.
Des portraits à la noirceur romantique
Sur son bras un tatouage du visage de l’actrice Louise Brooks. Malika aime les frondeuses, les dissidentes et l’audace des cocottes, ces muses d’artistes du Paris des Années folles “quand les femmes deviennent des hommes comme les autres…”, dit-elle, les mêmes s’affichent impérieuses dans ses photos. “J’aime raconter des histoires dans les lieux que j’occupe comme dans mes images, je crée des personnages, j’utilise mes modèles comme des actrices. Des femmes de la vie, de la rue, pas des professionnelles, que je capture en lumière naturelle.” La lecture, la musique, la poésie, la noirceur mélancolique d’un Baudelaire inspirent des postures quasi mystiques.
Des tirages velours charbon
Le choix du noir et blanc exclusif, inscrit ses images dans l’intemporalité. La blancheur statuaire, de ses portraits choisis, porte la femme au rang d’intouchable. “J’utilise le principe du numérique associé au procédé Piezography. Une technique d’impression à base d’encre composée de pigments au charbon qui donne une pureté extrême au noir et blanc. Sept niveaux de gris au lieu de trois dans le système classique offrent cet aspect si mystérieux.” Cette finition velours mat dramatise la pose de ses “filles” et donne au tirage l’impression d’une seconde peau. Diane Arbus et les images au collodion de Julia Margaret Cameron sont des références comme la théâtralité des femmes d’Irina Ionesco. Source intarissable d’inspiration. Malika Mokadem (malikamokadem-photography.com) est chez Raw Beauty Gallery (rawbeauty.nl). Elle expose à la Eastside Gallery de Moscou en décembre, mskeastside.com.