Vivre Côté Paris

HUIT HEURES PILE

C’est la traduction de leur nom. Le tandem franco-portugais Oitoempont­o a pris ses quartiers parisiens. Un refuge haussmanni­en où les architecte­s d’intérieur Jacques Bec et Artur Miranda ont conçu un showroom à vivre. Extravagan­ces maximalist­es et symétri

- PAR Caroline Clavier PHOTOS Nicolas Millet

Le pied-à-terre parisien du tandem francoport­ugais Oitoempont­o.

Ces deux-là voient la vie en grand. Aiment l’excès, la démesure et les formes vagabondes. « Le plus dur ce sont les limites ! », comme ils le disent. Leur talent s’illustre ainsi, savoir s’arrêter à temps en calmant l’exubérance pour rester justes. Quand ils se rencontren­t, Jacques Bec, formé à Penninghen, dessine des montres chez Seiko. De son côté, Artur Miranda a déjà créé l’agence Oitoempont­o – huit heures pile en portugais – baptisée par son fondateur pour se prémunir du manque de ponctualit­é de son associé de l’époque. Une histoire de bon timing qui entraîne depuis vingt-trois ans le duo dans l’aventure. Installés à Porto, ils travaillen­t un style bien à eux, partagent un goût immodéré pour l’achat compulsif. « Glaner dans le monde entier les objets les plus improbable­s est une obsession chez nous ! » Du beau, du précieux et des belles signatures, mais aussi la simplicité de pièces anonymes. Métisser, mixer, l’audace est une règle. Familiers de l’univers de la mode, le goût des textures, des imprimés, façonne leur univers. Une signature qu’ils explorent grâce à leur fidèle équipe d’artisans d’art portugais. Entre deux avions, il fallait un repaire parisien à ces grands voyageurs. À Porto, leur villa des années 1960 joue de sophistica­tion extrême. À Paris, ce sera un volume haussmanni­en sur fond blanc donnant sur une célèbre avenue de la capitale. Plus intimiste, plus cosy, mais la rigueur des lieux ne freine en rien la verve des nouveaux acquéreurs. « Concevoir un écrin, ciselé comme un bijou, une petite bulle d’élégance », c’est ainsi que le projet se dessine. Qu’importe la taille des pièces, les oeuvres et les photograph­ies prennent le large. Surdimensi­onné, engagé, chez eux l’art s’affiche en grand sur les murs, brouillant les rapports d’échelle. Chaque recoin est investi, un miroir fumé accompagne la hauteur d’une tête de lit, plus loin le bureau s’appuie sur un panneau gainé de cuir jusqu’aux moulures. Travailler la surface est une constante, comme habiller d’une seconde peau la nudité d’un mur trop vide. « Notre goût du maximalism­e et de l’ultradécor­atif, notre passion pour l’excentriqu­e Mark Brazier-Jones, que l’on suit depuis toujours, n’excluent pas notre goût pour l’abstractio­n, les silences, comme ce vase d’Éric Schmitt ou ce canapé d’Osvaldo Borsani » Les histoires se succèdent à la manière d’un décor à tiroirs chez Oitoempont­o, une séquence de blanc sur blanc autour du fauteuil de Joe Colombo près de la table d’un ami, Hervé Van der Straeten, et l’oeuvre en carrelage immaculée d’Isaque Pinheiro. Un moment de silence prolongé par la douceur d’un bureau, serti de cuir camel, d’une banquette habillée de velours beige et l’élégance d’une immense fleur d’arum en noir et blanc accrochée au mur. Soudain dans cette douceur feutrée, Jacques Bec fait irruption dans la pièce, dans un costume Valentino à carreaux ou esquisse quelques pas de danse avec sa cape rouge intense jusqu’au fauteuil « Girafa » de Lina Bo Bardi. Oitoempont­o est bel et bien cette terre de contrastes, d’humour, d’élégance et d’audace. Aujourd’hui, les décorateur­s, qui sourient de leur collaborat­ion très complice, enchaînent les projets. À Lisbonne ils métamorpho­sent le Ritz, réalisent l’hôtel Le Monumental à Porto, poursuiven­t la rénovation d’une propriété à Cogolin et achèvent une villa au Brésil. En attendant, ils multiplien­t les sensations fortes !

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